Les ministres des Finances et les banquiers centraux du groupe G20 ont donné leur aval mercredi à une suspension immédiate et pour une durée d’un an de la dette des pays les plus pauvres particulièrement fragilisés par la crise provoquée par la pandémie du coronavirus.
« Cette suspension du service de la dette prend effet immédiatement », a déclaré Mohammed al-Jadaan, le ministre des Finances saoudien lors d’une conférence de presse virtuelle à l’issue d’une réunion du G20.
« C’est une annonce vraiment importante, qui signifie que les pays pauvres n’ont pas besoin de s’inquiéter de faire face à leurs échéances au cours des 12 prochains mois », a-t-il ajouté, précisant que le moratoire allait libérer 20 milliards de dollars de liquidités, qui pourront être utilisées à combattre la pandémie dans ces pays aux moyens limités et aux infrastructures fragiles.
Il s’est aussi félicité de « l’engagement clair » des parties prenantes.
« C’est une initiative puissante (…) qui contribuera beaucoup à protéger la vie et les moyens de subsistance de millions de personnes les plus vulnérables », ont réagi dans un communiqué commun Kristalina Georgieva et David Malpass, respectivement directrice générale du Fonds monétaire international et président de la Banque mondiale.
« Portée historique »
Les deux institutions de Washington « agiront rapidement pour répondre à la demande du G20 de soutenir cette action en travaillant étroitement avec ces pays », ont-ils ajouté.
Le FMI et la Banque mondiale défendaient cette idée depuis plusieurs semaines. Et le Fonds avait, lui, approuvé lundi un moratoire sur les remboursements de dette pour 25 pays, la plupart situés en Afrique.
La suspension provisoire du service de la dette des pays les plus pauvres par le G20 constitue un « acte de solidarité internationale de portée historique », a estimé mercredi le ministre allemand des Finances, Olaf Scholz.
« Nous laissons ainsi aux pays concernés de grandes marges de manœuvre financières pour investir dans la protection sanitaire de leurs populations, immédiatement et sans examen chronophage au cas par cas », a-t-il commenté.
Mardi, le G7 s’était dit favorable à une telle initiative pour aider ces pays à faire face aux impacts sanitaires et économiques de la pandémie due au nouveau coronavirus, mais à condition de recevoir l’aval du G20.
Les ministres et les Banques centrales des vingt plus riches économies du monde ont indiqué dans un communiqué que les pays s’étaient « mis d’accord sur une approche coordonnée avec un échéancier commun fournissant les principales caractéristiques de cette initiative (…) qui a également été approuvée par le Club de Paris ».
Ils ont aussi exhorté les créanciers privés à participer à l’initiative.
Temps exceptionnels, action exceptionnelle
« Nous sommes déterminés à ne ménager aucun effort pour protéger les vies humaines », a souligné Mohammed al-Jadaan.
En cette période inédite, il faut soutenir autant que possible l’économie mondiale et s’assurer de la résilience du système financier.
« Nous devons poursuivre nos efforts et les amplifier », a également opiné le ministre saoudien, alors que les gouvernements ont déjà dépensé des milliers de milliards de dollars pour endiguer l’impact de la pandémie, qui paralyse des pans entiers de l’économie mondiale.
La COVID-19 a contaminé plus de deux millions de personnes dans le monde.
Les gouvernements se sont résolus à confiner leur population, fermer les commerces non essentiels et réduire drastiquement le trafic aérien.
Le FMI a prévenu mardi que le nouveau coronavirus provoquerait cette année la plus grave récession économique depuis la Grande Dépression des années 30.
Le PIB mondial va se contracter de 3 % et peut-être même davantage si la pandémie n’est pas arrêtée à la fin juin et si les mesures de confinement devaient se poursuivre au second semestre de cette année.
Ce « Grand confinement » (« Great lockdown »), comme l’a baptisé le FMI, coûtera 9 000 milliards de dollars à l’économie mondiale en 2020 et 2021, soit « davantage que les économies du Japon et de l’Allemagne combinées », avait précisé l’économiste en chef de l’institution Gita Gopinath.
Dix-huit chefs d’État européens et africains avaient déjà appelé à un allègement de la dette ainsi qu’à un plan de relance d’environ 100 milliards de dollars pour le continent africain.
« En ces temps exceptionnels, nous avons besoin d’action exceptionnelle », a martelé mercredi Kristalina Georgieva, au cours d’une conférence de presse virtuelle.