La pandémie a permis à plusieurs personnes d’entamer des conversations avec leurs proches en ce qui a trait à la planification des décès, normalisant peut-être ce qui est souvent considéré comme un processus difficile et délicat. (Photo: 123RF)
BLOGUE INVITÉ. Il est difficile de l’admettre, mais la mort ne se soucie pas de notre âge. Quel est donc le bon moment pour faire faire notre testament?
Le nombre de décès dus à la Covid au Canada s’élève aujourd’hui à plus de 22 000. De ces morts, le Québec en compte près de la moitié, ce qui en fait la province la plus endeuillée au Canada. Il s’agit d’environ 10 500 vies québécoises écourtées en raison de la pandémie. La grande majorité de ces personnes seraient encore en vie cette année pour célébrer un anniversaire et je suis presque certaine qu’elles n’imaginaient pas qu’une pandémie de cette ampleur mettrait un terme à leur existence.
S’il peut ressortir quelque chose de positif de cette situation, c’est qu’elle a certainement permis à plusieurs personnes d’entamer des conversations avec leurs proches en ce qui a trait à la planification des décès, normalisant peut-être ce qui est souvent considéré comme un processus difficile et délicat.
Ma fille a eu 18 ans en 2020. Cela peut paraître un peu macabre, mais avec la normalisation des décès, nous avons décidé d’avoir une conversation avec elle. En effet, nous avons non seulement parlé de la mort, mais nous avons aussi discuté de la planification de ses volontés via un testament. Il ne faut surtout pas sous-estimer la capacité de nos jeunes à comprendre les enjeux reliés à la mort. Et à 18 ans, ils et elles sont en âge légal de rédiger un testament s’ils ou elles le souhaitent.
Il arrive souvent qu’un premier testament ou une modification de testament existant survienne à la suite d’un déménagement dans une autre province ou un autre pays, à une nouvelle union, à la naissance ou à l’adoption d’un enfant, à la réception d’un héritage inattendu, à l’achat d’une maison, ou au diagnostic d’une maladie, par exemple. Cependant, il est vrai que ces situations riment rarement avec jeune adulte de 18 ans. Il est donc pertinent de se demander quel est le bon âge pour faire faire son premier testament. Est-ce qu’une personne de 18 ans est trop jeune?
J’ai l’honneur de lire de nombreux testaments dans le cadre de mes fonctions, et la plupart du temps, ce n’est ni l’âge ni la valeur de la succession qui me touche, mais plutôt l’histoire de la personne derrière les mots. La vraie valeur d’un testament réside dans la réflexion que ce bout de papier a exigée ainsi que dans le message qu’une personne laisse derrière elle. Les testateurs, c’est-à-dire ceux qui rédigent le testament, ont la responsabilité de mettre sur papier la fin du parcours d’une vie et savent habituellement le faire avec soin.
Je suis personnellement d’avis que chaque personne a une responsabilité sociale en ce qui concerne son héritage et l’organisation de sa succession, et c’est ce que j’ai partagé à ma fille. La mort est indifférente à votre âge ou à votre solde de compte bancaire. Beaucoup de jeunes adultes ne se soucient pas de leur testament parce qu’ils ou elles estiment ne pas avoir suffisamment d’argent. Cependant, il n’est pas nécessaire d’avoir une fortune pour avoir des préférences quant à la façon de répartir les sous si l’on décède. C’est pour cette raison que j’ai encouragé ma fille à réfléchir à ce qu’elle souhaiterait pour ses économies «si jamais» et à mettre le tout par écrit dans un testament. Bien que la rédaction d’un testament devant notaire reste l’option que je recommande, il existe d’autres méthodes qui peuvent peut-être attirer les plus jeunes, et j’en parlerai dans un prochain billet.
La pandémie nous a certainement donné l’occasion de discuter de la mort avec nos proches, et peut-être même avec nos adolescents et jeunes adultes pour certains. Si l’on planifie son parcours universitaire et ses vacances post-pandémie, pourquoi ne planifierait-on pas également notre planification successorale tout aussi naturellement? Évidemment, ma fille a grincé des dents, mais j’ai espoir qu’elle sera maintenant plus à l’aise de discuter du sujet et que l’idée fera un petit bout de chemin!
La mort finira par tous nous toucher à un moment ou à un autre. Il va de soi que plus on en parlera, mieux nos jeunes adultes seront préparés.