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Le mutualisme comme réponse à nos aspirations sociétales

Le courrier des lecteurs|Publié il y a 28 minutes

Le mutualisme comme réponse à nos aspirations sociétales

«Agir avec l’appui de l’ensemble de ses commettants est un défi stimulant!» (Photo: 123RF)

Un texte de Geneviève Fortier, C.Q. Fellow CRHA, chef de la direction de Promutuel Assurance

COURRIER DES LECTEURS. Nos milieux de travail jonglent avec de nouvelles réalités dont on ne parlait guère il y a quelques années à peine : lutte contre les changements climatiques, accroissement de la diversité et inclusion, réduction des écarts de richesse, réconciliation avec les Premières Nations, valorisation d’une saine gouvernance et culture philanthropique.


Au moment où se tient la Semaine de la coopération et de la mutualité, il y a lieu de se demander si le modèle coopératif et mutualiste ne constitue pas la réponse optimale aux enjeux qui façonnent notre société et l’incarnation de la manière dont nous devons guider nos grandes organisations.

Révolution sociétale


En Europe, plus encore qu’en Amérique, on observe l’émergence et la montée en puissance d’un courant que l’on nomme le capitalisme des parties prenantes en opposition au capitalisme actionnarial et ses excès.

À travers ce mouvement, on exhorte les dirigeants d’entreprises à prendre position, mais surtout à considérer des intérêts plus larges (clients, fournisseurs, employés, communautés locales et société en général), afin de prendre des décisions plus durables visant l’intérêt commun.C’est l’application du concept d’acceptabilité sociale… Mais à l’inverse!

Certains pourraient voir cela comme un obstacle. Je le vois comme une source de motivation sans pareille. Agir avec l’appui de l’ensemble de ses commettants est un défi stimulant!

Changer l’ordre des choses

La nécessité d’agir sur les gaz à effet de serre (GES), qui accélèrent les changements climatiques, a contribué à la naissance des principes ESG. Ces trois mêmes lettres, réarrangées, incluent désormais les concepts de gouvernance et les considérations sociales.

Je me plais souvent à rappeler que, du haut de ses 172 ans d’histoire, Promutuel Assurance a toujours appliqué les principes ESG, bien avant qu’ils ne deviennent une norme incontournable. Même chose pour les notions d’équité, de diversité et d’inclusion.

En fait, Promutuel Assurance fut justement créée en réponse à une injustice subie par une partie de la population québécoise.

Personne ne voulait assurer les agriculteurs dans les régions rurales. Alors ils se sont regroupés, ont créé leur propre mutuelle d’assurance, devenue aujourd’hui l’une des entreprises québécoises les plus respectées et l’assureur grand public le plus recommandé.

Croissance raisonnée

Il est vrai qu’une mutuelle ne répond pas aux mêmes impératifs qu’une société par actions. Mais il est faux de prétendre que la nécessité de croître de manière rentable est moins présente chez nous sous prétexte que nous sommes une mutuelle.

En fait, nous avons aussi le devoir d’offrir d’excellents résultats à nos propriétaires, soit nos 639 000 membres-assurés. Or, l’une des conditions incontournables est de demeurer fidèles à nos valeurs. C’est une démarche de croissance raisonnée où le rendement et les valeurs doivent être combinés et cohabiter, jamais au détriment l’un de l’autre.

Nos résultats démontrent qu’il est possible de générer de la performance et de la profitabilité et de réinvestir les surplus dans l’organisation pour la rendre encore plus efficiente et plus compétitive, et cela, tout en respectant ce que nous sommes.


Transformation nécessaire

Les changements climatiques requestionnent nos aspirations sociétales profondes et commandent des transformations draconiennes de nos comportements.

On le constate, le regard des citoyens envers les corporations a changé. Le rapport de force est inversé. Nos concitoyens choisissent d’acheter un produit ou un service auprès d’entreprises en qui ils ont confiance et qu’ils respectent pour la cohérence entre leurs valeurs et celles de l’organisation.

La fameuse pyramide de Maslow s’est inversée : prix des aliments, crise du logement, qualité de l’air, hausse de la violence. Nos besoins primaires – se nourrir, se loger, respirer -, autrefois à la base de la pyramide et qu’on tenait souvent pour acquis, sont de plus en plus difficiles à combler.

Notre société, riche et éduquée, nous lance un défi de transformation devant lequel nous ne pouvons demeurer de glace.

L’heure des décisions a sonné


La population réclame une répartition plus équitable de la richesse, la protection des plus vulnérables, l’adoption de pratiques durables pour les générations futures. Comme employeur, il est de notre responsabilité de travailler à accroître la diversité, l’égalité et l’inclusion et surtout pas parce que c’est bon pour notre marque employeur, mais parce que ça compte pour vrai. Parce que la richesse de la
différence permet de bâtir des entreprises plus performantes.

L’éducation, la collaboration pour créer des solutions novatrices, l’entraide, la justice, la démocratie et la solidarité ainsi que l’intelligence collective, sont tout aussi essentielles à la construction d’une société forte et autonome.

C’est la définition parfaite du mutualisme.

La culture du profit et de l’enrichissement des actionnaires à outrance a eu sa chance. L’heure est venue de travailler à l’enrichissement collectif et d’investir dans notre transformation collective. De poser des gestes qui comptent, aussi petits soient-ils.

Quand je regarde l’évolution de la société, les aspirations de la prochaine génération et les défis qui se pointent à l’horizon, la coopération et le mutualisme s’érigent définitivement comme une voie privilégiée à emprunter.