Logo - Les Affaires
Logo - Les Affaires
Louis J. Duhamel

À géométrie variable

Louis J. Duhamel

Expert(e) invité(e)

Manufacturier: trois tendances emballantes en Amérique du Nord

Louis J. Duhamel|Mis à jour le 07 octobre 2024

Manufacturier: trois tendances emballantes en Amérique du Nord

Les investissements des entreprises québécoises seront en hausse, notamment en ce qui a trait à la catégorie machines et équipements. (Photo: courtoisie de Clé en main industriel Québec / CEMIQ)

EXPERT INVITÉ. L’économiste réputé Pierre Cléroux de la Banque de développement du Canada (BDC) nous apprenait la semaine dernière, lors d’un dîner-conférence de Drummond Économique, que l’économie canadienne était nettement en voie d’amélioration.  Plusieurs excellentes nouvelles en ressortent.

1. Les dépenses en capital repartent

On parle ici d’un retour à la normale prévu en 2025, après 4 ans de choc pandémique. Avec un taux d’inflation à 2%, la baisse des taux d’intérêt ira assurément en s’accélérant. L’épargne des ménages demeurant relativement élevée au Canada, cela annonce une hausse notoire de la consommation pour l’an prochain, selon Pierre Cléroux.

De leur côté, les investissements des entreprises québécoises seront en hausse, notamment en ce qui a trait à la catégorie machines et équipements, ce qui me réjouit personnellement. 

Les investissements gouvernementaux devraient continuer, enTRE autres au niveau des grands projets économiques et énergétiques.

Enfin, on nous annonçait également que les mises en chantier augmenteraient, même si cela ne sera pas suffisant pour résorber la crise du logement.

Dans une perspective moins festive, le marché du travail devrait se resserrer avec la croissance économique et une possible baisse de l’immigration.

Eh oui, la misère engendrée par la pénurie de main-d’œuvre sera de retour!

Enfin, nos gouvernements, qui cumulent maintenant des déficits et une dette plus importante, auront moins de marge de manœuvre. Ils seront donc moins résilients pour faire face à d’éventuelles crises.

C’est à surveiller de près.

2. Les Américains rapatrient leurs chaînes de valeur

Maintenant que la conjoncture économique s’y prête de plus en plus et que la mondialisation continue de perdre des plumes, le temps est venu de se positionner par rapport à la grande opportunité des 10 prochaines années.

Je parle bien sûr du mouvement de relocalisation d’entreprises américaines et des chaînes de valeur aux États-Unis.

Récemment, l’organisme américain «The Reshoring Initiative» annonçait d’ailleurs la relocalisation de près de 300 000 emplois aux États-Unis durant le premier semestre de  2023, soit le deuxième meilleur score historique.

Les facteurs favorisant cette conjoncture sont bien sûr les politiques industrielles affirmées du gouvernement américain, ainsi que les événements géopolitiques planétaires qui favorisent un rapprochement des chaînes d’approvisionnement et la fabrication locale.

On parle ici essentiellement des tensions entre les États-Unis et la Chine, mais aussi de la situation à Taïwan, de la guerre en Ukraine et du conflit Israël/Hamas.

Ces risques amènent les entreprises américaines à vouloir garder davantage leurs actifs aux États-Unis et à rapprocher leurs chaînes d’approvisionnement.

Elles profitent ainsi d’une main-d’œuvre locale plus qualifiée et capitalisent sur la baisse des investissements en Europe, qui sont redirigés en partie vers les États-Unis en raison de la guerre en Ukraine.

La sécurité économique et la souveraineté manufacturière dictent maintenant la tendance aux États-Unis, peu importe le gouvernement en place. Cela tombe bien pour nous, puisque les principaux secteurs concernés qui ramènent des emplois sont les véhicules électriques, les batteries et les semi-conducteurs.

On peut d’ailleurs s’attendre à ce que Kamala Harris ou Donald Trump légifère davantage afin de protéger la compétitivité des filières économiques et des entreprises américaines.

3. Nos entreprises peuvent substituer davantage d’importations

Mais la vraie question est comment le Québec et le reste du Canada vont profiter pleinement de cette manne continentale?

Le «friend shoring» devient un état de fait en Amérique du Nord.

La décision du gouvernement canadien d’imposer des tarifs conséquents de 100% sur les importations de véhicules électriques chinois en fait foi. Même si cela nuit malheureusement à l’atteinte de nos cibles climatiques.

Il devient urgent de cibler les secteurs et les catégories de nos importations pour lesquelles une logique économique existe pour une fabrication locale ici au Québec, et ce, avec un potentiel d’exportation en Amérique du Nord.

Voilà un projet économique emballant pour l’économie du Québec des 5 à 10 prochaines années.

Ce seront nos grandes entreprises et nos PME qui mèneront la marche.

Une étude dirigée par votre humble serviteur en collaboration avec E&B DATA en 2018 avait déjà identifié certaines cibles.

Il est plus que temps de se mettre à l’ouvrage, surtout avec l’élection américaine cet automne.