Le télétravail permet de réduire le trafic et les émissions de gaz à effet de serre. (Photo: Laith Abdulkareem pour unsplash.com)
EXPERT INVITÉ. J’arrive tout juste de vacances au lac Saint-Jean, où l’eau particulièrement chaude et les ciels rougeâtres dus aux incendies de forêt m’empêchent d’ignorer la réalité des changements climatiques. C’est très perturbant. Sachant que 75 % des émissions de CO2 proviennent de l’activité de nos entreprises, il est pertinent de réfléchir aux actions à prendre à l’aube de la reprise de nos activités.
Mieux utiliser nos équipements
Le secteur du numérique a un poids environnemental majeur. En 2020, il représentait environ 10% de la consommation électrique mondiale et était responsable d’environ 4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), un chiffre qui pourrait dépasser 14% d’ici 2040. La production d’équipements électroniques, comme les téléphones intelligents, est particulièrement polluante: chaque appareil génère en moyenne 85kg de CO2 équivalent. De plus, plus de 60 millions de tonnes de déchets électroniques sont produites chaque année, la plupart se retrouvant dans des décharges de pays en développement. Le Québec est le 6e plus gros importateur mondial de matériaux per capita.
Pour atténuer ces impacts, il faut adopter des stratégies de gestion durable. Cela inclut l’optimisation de la durée de vie des appareils en favorisant la réparation plutôt que le remplacement, et la mise en place de programmes de recyclage en interne. Prioriser l’achat de matériel auprès de fournisseurs engagés dans l’utilisation de matériaux recyclés ou à faible empreinte carbone est une autre action concrète. Sensibiliser les employés à la consommation responsable et adopter des pratiques de sobriété numérique peut aussi réduire notre empreinte environnementale.
Optimiser la collaboration à distance et le télétravail
L’adoption massive du télétravail, accélérée par la pandémie, a démontré que de nombreuses entreprises peuvent fonctionner efficacement sans que leurs employés aient besoin de se déplacer quotidiennement. Cette tendance, facilitée par les outils numériques, contribue directement à la réduction des émissions de GES en diminuant la dépendance aux véhicules pour les déplacements domicile-travail. Une étude estime que si les employés télétravaillaient à distance la moitié du temps, cela pourrait réduire les émissions de GES de l’équivalent de 10 millions de voitures par an.
C’est non négligeable. Sachant qu’en plus, cela favorise l’équilibre travail/vie personnelle, il faut continuer à faire du travail hybride la norme.
De manière plus générale et stratégique, il est possible de faire en sorte que les plans de transformation numérique des organisations contribuent directement à la lutte aux changements climatiques.
Une meilleure utilisation de la technologie permet de rationaliser les processus internes, réduisant ainsi le gaspillage des ressources.
Par exemple, la numérisation des documents réduit l’utilisation de papier, ce qui diminue la déforestation et les émissions de CO2 associées à la production de papier. En moyenne, chaque tonne de papier recyclé permet d’économiser environ 2,5 tonnes de CO2.
L’automatisation permet d’optimiser l’utilisation des ressources en augmentant l’efficacité des opérations. Par exemple, l’automatisation des systèmes de gestion de l’énergie dans les bâtiments peut réduire significativement la consommation d’énergie. Les capteurs intelligents peuvent ajuster l’éclairage et la climatisation en fonction de la présence des occupants, réduisant la consommation d’énergie jusqu’à 30%.
L’utilisation de technologies numériques comme l’Internet des Objets (IoT) permettent d’optimiser les chaines d’approvisionnement. Des algorithmes peuvent analyser les données en temps réel pour optimiser les itinéraires des véhicules de livraison, réduisant ainsi la consommation de carburant et les émissions de CO2.
Au final, une transition vers un numérique responsable peut servir les objectifs d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques. La sobriété numérique, qui consiste à consommer moins et mieux, est essentielle pour l’atténuation. Elle réduit les besoins matériels d’infrastructure tout en contribuant à une meilleure inclusivité et santé mentale. En adoptant cette approche, nous pouvons faire des choix technologiques plus responsables et orientés vers une expérience humaine globale, au-delà des bénéfices économiques.