La Banque du Canada est maintenant engagée dans une accélération de la baisse de ses taux. (Photo: Adrian Wyld / La Presse Canadienne)
EXPERT INVITÉ. Après avoir haussé son taux directeur à dix reprises de mars 2022 à juillet 2023, la Banque du Canada est maintenant engagée dans une accélération de la baisse de ses taux. En juin dernier, elle amorçait ce virage en l’abaissant d’un quart de point de pourcentage à 4,75%, soit sa première réduction en plus de quatre ans. Elle récidivait à la fin juillet pour le porter à 4,50%.
Or, il faut désormais s’attendre à ce que la Banque du Canada annonce une troisième diminution consécutive des taux d’intérêt en septembre, de même qu’à chacune de ses réunions d’ici la fin de l’année, ce qui porterait alors le taux à 3,75%.
Manque à dépenser de 77G$
La baisse de l’inflation, qui a ralenti en juillet à 2,5% et ainsi affiché son plus bas taux en plus de trois ans ne laisse pas d’autres choix à la Banque du Canada. D’autant plus que les dépenses de consommation s’essoufflent et ont donc des répercussions sur l’activité économique.
La hausse des taux d’intérêt se fait aujourd’hui grandement sentir alors que les paiements d’intérêt hypothécaire et autres au Canada ont augmenté de 77 milliards de dollars depuis mars 2022! Ce chiffre astronomique a sans surprise entraîné depuis le début de l’année une forte baisse dans le secteur des ventes au détail qui, du même coup, a perdu à ce jour 148 000 emplois en 2024.
D’ailleurs, chose rare, il n’y a pas eu de création d’emplois au pays pendant deux mois consécutifs, en juin et juillet derniers. L’économie canadienne a même perdu 1400 emplois en juin et 2800 emplois en juillet et le taux de chômage, qui s’élevait alors à 6,4%, est à la hausse depuis avril 2023.
La bonne nouvelle, c’est que l’inflation continue à se rapprocher de la cible de 2%. Et que l’économie canadienne, malgré une faible croissance de son PIB qui devrait terminer l’année à 1%, n’est pas menacée d’entrer en récession.
Pas de récession américaine en vue
Début août, la chute du marché boursier américain et des principales places financières à travers le monde a rapidement fait brandir le spectre d’une récession imminente aux États-Unis. Attribuée entre autres au relèvement inattendu des taux d’intérêt au Japon, cette forte correction témoignait plutôt du ralentissement de l’économie américaine. La publication de statistiques sur l’emploi et de certains indicateurs en baisse comme celui de l’activité manufacturière ISM a entraîné les craintes d’une récession.
En juillet, l’économie américaine a en effet créé seulement 114 000 emplois tandis que le taux de chômage augmentait légèrement de 4,1% à 4,3%, son plus haut niveau depuis 2021. L’attention s’est donc détournée de l’inflation, qui continue de ralentir, pour se concentrer sur le ralentissement du marché du travail et l’activité économique américaine. Ce qui a fortement fait réagir à la baisse les marchés financiers qui, après un début de mois difficile, ont depuis repris du poil de la bête.
Ce ralentissement économique, qui s’exprime par la situation sur le marché du travail, ne mènera pas pour autant les États-Unis vers une récession. Le ralentissement de l’emploi était attendu alors que la consommation américaine ne cesse de décroître depuis le début de l’année. Mais il y aura certainement — et finalement — une baisse des taux directeurs de la Réserve fédérale américaine, dès septembre. La Fed, comme le fait la Banque du Canada depuis juin dernier, commencera alors à jeter du lest sur sa politique monétaire restrictive.
Ce ralentissement de l’activité économique américaine ne devrait toutefois pas avoir d’effet significatif sur le Canada. Les exportations canadiennes et québécoises sont et resteront encore élevées.