Les investisseurs doivent analyser la situation sous plusieurs angles lorsque des conflits surviennent entre un conseil d'administration et le PDG d'une entreprise. (Photo: courtoisie)
BALADO. Le moins que l’on puisse dire, c’est le que le bras de fer entre le conseil d’administration de Les Vêtements de Sport Gildan (GIL, 43,91$) et son ancien président et chef de la direction Glenn Chamandy a fait couler beaucoup d’encre depuis décembre dernier.
Le conflit s’est répercuté sur la valeur du titre de l’entreprise, dont la valeur était de 49,61$ à la fermeture de la Bourse de Toronto le 8 décembre, avant d’être secoué par les changements annoncés à la haute direction trois jours plus tard. Il a depuis touché un creux de 41,32$ le 16 janvier, avant d’amorcer une remontée.
Steve Bélisle, gestionnaire de portefeuille à Gestion de placements Manuvie, estime que les investisseurs doivent analyser la situation sous plusieurs angles lorsque des conflits surviennent entre un conseil d’administration et le PDG d’une entreprise.
«Premièrement, ce qui est inquiétant, ce sont les allégations du conseil d’administration à l’effet que Glenn Chamandy considérait d’effectuer deux grosses acquisitions à l’extérieur des compétences de l’entreprise, et aurait utilisé beaucoup d’endettement. Ces acquisitions auraient pu provoquer une destruction de valeur pour les actionnaires», dit-il.
Il ajoute que les marchés regardent surtout comment les acquisitions peuvent contribuer à faire progresser le bénéfice par action. Selon lui, il s’agit d’un indicateur qui peut être trompeur lorsque les acquisitions ajoutent de la dette au bilan de la société. «Nous préférons mesurer le taux de rendement interne du déploiement du capital, on veut qu’il soit supérieur au coût d’acquisition, c’est ce qui permet de créer de la valeur», dit-il.
Un autre point inquiétant à analyser porte sur les allégations selons lesquelles l’ex-PDG tentait de saboter le plan de l’entreprise à sa propre succession.
Toutefois, Steve Bélisle souligne que le nouveau PDG de Gildan, Vince Tyra, aurait une feuille de route peu reluisante. «Toutefois, comme actionnaire, il ne faut pas mettre trop d’emphase sur l’identité du PDG d’une entreprise. Au final, une bonne entreprise restera bonne peu importe qui sera à sa tête», croit-il.
À son avis, les investisseurs peuvent se protéger de conflits comme celui qui secoue le fabricant de vêtements en analysant la bonne gouvernance des entreprises. «Ça commence avec un conseil d’administration indépendant, ce qui est le cas à 91% chez Gildan. Un autre élément, c’est comment la rémunération du PDG est structurée», dit-il.
À l’entreprie, la rémunération est à long terme, mais est motivée par la croissance des revenus, ce qui peut être fait par endettement. «En 2022, on a ajouté un volet lié à la performance du titre», dit-il.
Steve Bélisle ajoute que deux éléments ne font pas partie des bonnes règles de gouvernance, soit la possibilité pour les dirigeants d’une entreprise d’utiliser une «dragée toxique» ou des «parachutes dorés» pour contrer une offre publique d’achat.
Lorsqu’une entreprise comme Gildan doit affronter un conflit à la haute direction, il est certain que les investisseurs doivent se poser la question à savoir si la bisbille peut pénaliser le titre à moyen terme. Selon le gestionnaire de portefeuille, on pourrait craindre le départ d’employés clés, ce qui enverrait un signal négatif. «On peut aussi craindre que le nouveau PDG mette en place une nouvelle stratégie qui divergerait de ce que nous considérons comme le meilleur chemin pour créer de la valeur pour les actionnaires», dit-il.
Cela dit, il concède que le récent recul du titre rend son évaluation plus attrayante.
*Gestion de Placements Manuvie possède des actions de Gildan.