Acquisition d’entreprise : Les principaux pièges à éviter
Événements Les Affaires|Publié le 05 avril 2019Plusieurs choses peuvent mal tourner lors d’une fusion ou d’une acquisition. Quelles sont les principales causes d’échec? Les erreurs à éviter? Comment réduire les risques? Des entrepreneurs et des experts discuteront de ces questions lors de la conférence Fusions et acquisitions, présentée par les Événements Les Affaires le 4 juin prochain à Montréal. Stéphane Drouin, président de la firme-conseil Groupe C, témoigne dans cette entrevue de son expérience en la matière.
Y a-t-il un problème qui revient souvent lors des acquisitions?
Stéphane Drouin : L’écart entre la valeur réelle de l’entreprise et la valeur émotive que lui confère le vendeur est une des principales causes d’échec. Cela peut faire déraper une transaction. Même devant des arguments rationnels, certains vendeurs continuent de s’accrocher au prix que leur entreprise vaut à leurs yeux. Et il est très difficile pour les acquéreurs de les ramener vers un prix plus réaliste. Dans cette situation, la meilleure chose est de demander au vendeur de faire évaluer son entreprise par ses propres conseillers financiers, s’il ne l’a pas déjà fait. Il faut dire aussi que lorsqu’un vendeur n’est pas capable de départager la valeur émotive de son entreprise de sa valeur réelle, c’est peut-être qu’il n’est pas prêt à vendre.
Quel autre écueil voyez-vous ?
S.D. : Souvent, le vendeur et l’acquéreur s’entendent verbalement sur certains aspects. Ensuite, les comptables et les avocats entrent dans le dossier et sont mal à l’aise avec certains points. Ils veulent tellement protéger leur client qu’il ne s’agit plus d’une situation gagnant-gagnant. Les professionnels jouent un rôle essentiel dans les transactions. Mais ils doivent faire en sorte que les deux parties en ressortent gagnantes.
À quoi faut-il porter le plus attention quand on veut acheter une entreprise?
S.D. : Il faut comprendre les intentions du vendeur et le contexte dans lequel il se trouve. Pourquoi vend-il son entreprise? Est-il vraiment déterminé à vendre ou est-il plutôt dans un mode d’exploration? Il est important aussi de savoir si d’autres acquéreurs potentiels sont dans le portrait. Il y a des acheteurs qui omettent de s’en informer et qui se retrouvent à faire office de faire-valoir pour faire grimper les enchères. C’est une situation qui survient plus souvent lorsqu’un des acheteurs est un particulier et l’autre, une entreprise. J’ai vu des acquéreurs qui étaient convaincus de signer pour réaliser à la dernière minute qu’on s’était servi d’eux.
Une erreur à éviter à tout prix?
S.D. : Tomber en amour avec l’entreprise qu’on veut acheter est le plus grand danger qui guette l’acquéreur. Comme il porte des lunettes roses, il ne pose pas les bonnes questions. Il n’entend pas ce qu’il ne veut pas entendre et il n’approfondit pas ce qui devrait l’être. Il faut avoir l’attitude inverse et chercher toutes les raisons pour lesquelles on ne devrait pas réaliser cette transaction.
Quelle bonne pratique suggérez-vous aux acheteurs?
S.D. : Pour les aider dans leur décision, je leur suggère de faire un tableau de quatre colonnes. Dans la première, ils inscrivent les faits et les chiffres. Dans la seconde, ils notent ce que leur comptable, leur avocat, leurs collègues, leurs associés et d’autres membres de leur entourage disent de cette transaction. La troisième colonne renferme ce qu’ils pensent de ce dossier en tant qu’acheteurs, mais de la façon la plus rationnelle possible. Pour finir, ils écrivent ce qu’ils ressentent, ce que leur petite voix intérieure leur dit.
Que faire si notre petite voix nous fait hésiter alors que tout le reste semble beau?
S.D. : Il faut l’entendre comme une sonnette d’alarme et essayer de comprendre pourquoi on a ce sentiment. Il y a peut-être une roche qu’on n’a pas soulevée. Il faut réviser le dossier, poser d’autres questions. Parfois, il vaut mieux manquer ce qui semble une bonne affaire que de conclure une transaction alors qu’on a un doute.