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Acquisitions d’entreprises : entre raison et émotions

Événements Les Affaires|Publié le 06 juin 2019

Acquisitions d’entreprises : entre raison et émotions

Même si le marché actuel est favorable aux vendeurs, le prix n’est pas toujours l’élément déterminant lors de la vente d’une entreprise. Plusieurs propriétaires se préoccupent de ce qui va arriver pour l’entreprise et les employés après la vente, selon Richard Voyer, vice-président et directeur général de Soprema, une entreprise française de produits d’étanchéité et d’isolation dont le siège social nord-américain est à Drummondville. « Il y a une valeur rattachée à cela. » M. Voyer est l’un des dirigeants qui ont partagé expériences et conseils, le 4 juin dernier à Montréal, lors de la Conférence Fusions et acquisitions des Événements Les Affaires.

Éviter de tomber en amour

Au-delà des chiffres, plusieurs transactions impliquent de composer avec les émotions. Le cas classique, c’est celui du vendeur qui mélange valeur sentimentale et valeur réelle. « Au début, le prix était vraiment trop élevé, a raconté Marie-Christine Drolet, qui a acheté AtmanCo, la firme de tests psychométriques pour laquelle elle travaillait depuis 12 ans. Avant de chercher du financement, j’ai attendu quatre mois que le prix devienne plus raisonnable. »

Toutefois, les émotions se vivent des deux côtés de la table. Souvent en effet, des acheteurs tombent en amour avec la cible au risque de ne plus voir clair. C’est pourquoi Minh Thanh Tran, directeur Stratégie et Fusions & acquisitions chez BRP, conseille de former une équipe à l’interne capable d’évaluer objectivement la pertinence d’une acquisition. « Quand on entre dans un processus d’achat, c’est facile de s’exciter. Il faut donc avoir l’avis de personnes qui ne sont pas impliquées dans le day to day de la transaction. »

Marie-Christine Drolet a quant à elle rédigé une lettre d’intention très précise qui lui a permis de se protéger pendant la transaction.« J’ai prévu des jalons que le vendeur devait réaliser pour que je poursuive la démarche. Je voulais avoir la discipline de ne pas m’attacher à un deal à tout prix. »

Plusieurs têtes valent mieux qu’une

L’importance d’être bien entouré a été soulignée à plusieurs reprises pendant la conférence. Par exemple, Louis Langelier et son associé ont formé un comité consultatif informel lors des démarches menant à une participation majoritaire dans Multinautic International, un fabricant de systèmes de quais. « Quand on avait une question ou qu’on vivait un écueil, on passait un coup de fil et on avait de l’aide. Certaines de ces personnes ont même rencontré les financiers avec nous. Ça démontrait qu’on était capables de travailler en équipe. »

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Une question de culture

La compatibilité des cultures d’entreprise est un autre aspect à scruter. Martin Noël, vice-président principal et chef de la direction financière de Premier Tech, a vécu une expérience où le vendeur ne voulait pas ébruiter le fait que son entreprise était à vendre. « On a visité l’usine de nuit et le reste du temps, on était confinés dans le bureau de ses avocats. On n’a pas pu parler aux travailleurs, ressentir l’entreprise. »

Une acquisition que Premier Tech a regrettée, car les cultures des deux entreprises étaient trop différentes. « On voulait faire croître l’entreprise, l’amener vers le monde, mais ses gens voulaient faire leur train-train quotidien et rentrer dormir à la maison le soir », a illustré le conférencier. Depuis, son équipe ne conclut pas une transaction sans avoir parlé avec les travailleurs.

Des surprises pas reposantes

Toute acquisition comporte son lot d’imprévus et de défis. Il y a quelques années, Soprema a acquis un distributeur canadien de matériaux de construction. « Être manufacturier et être distributeur, c’est deux choses bien différentes, a constaté Richard Voyer. Il ne s’agit pas non plus des mêmes marges. En production, on gère des dollars. En distribution, des sous noirs. Et on a réalisé qu’on était nuls dans la gestion des microdétails. »

La clé du succès a été de trouver la bonne personne pour diriger l’entreprise achetée. L’atteinte de la rentabilité n’a pas été facile et cette transaction a été un gros risque financier pour Soprema. Mais aujourd’hui, l’entreprise se félicite. « On a fait cette acquisition pour contrôler notre réseau de distribution, car cela constitue une barrière à l’entrée pour les compétiteurs étrangers », a indiqué le conférencier.

Les manières de faire des affaires varient grandement selon les pays. Premier Tech l’a constaté lorsqu’elle a pris une participation minoritaire dans une entreprise indienne de traitement des eaux usées il y a deux ans.

« On a appris que ça n’en finit plus de finir, a dit Martin Noël, qui a piloté une cinquantaine d’acquisitions au fil des ans. On a négocié une convention d’actionnaires, mais le lendemain, le surlendemain et six mois après, c’était à revoir. Même chose entre entreprises en Inde. Elles négocient des conditions à coups de 500 000 $, mais les termes de paiement ne sont à peu près jamais honorés. »

Qui mène le navire ?

Comme Premier Tech réalise des acquisitions en série, le maintien en place de l’équipe de direction est l’une des conditions du succès. Pour cela, elle peut offrir aux employés clés des incitatifs financiers, comme l’émission d’unités de participation (phantom stock options). Et s’il y a un propriétaire dirigeant, la clause d’earn-out est parfois utilisée pour le retenir quelques années et « faire le pont entre ses attentes financières et le prix qu’on est prêts à payer », a précisé Martin Noël.

François-Xavier Robert, qui a acheté avec son frère le fabricant de manteaux Quartz Co. et deux autres petites entreprises, pense au contraire qu’il faut prévoir une porte de sortie rapide pour les vendeurs. « Au début, le cédant nous aide, mais il devient vite un frein à l’innovation et au changement. Souvent, le modèle d’affaires est parfait à ses yeux. Et c’est difficile d’améliorer la perfection… »

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