Le gazon semble souvent plus vert dans une autre entreprise, mais c'est loin d'être le cas. (Photo: 123RF)
BLOGUE INVITÉ. Le 20 juillet 2021, j’écrivais dans mon blogue sur «le grand réveil» — un phénomène mondial selon lequel à la sortie de la pandémie, un nombre record de personnes quittaient leur emploi. Une enquête de Microsoft à ce moment montrait que 40% de la main-d’œuvre mondiale envisageait de quitter son emploi dans la prochaine année. Plus récemment en mars dernier, une enquête de Gartner révélait que 70% des employés du milieu technologique avaient une forte intention de rester avec leur employeur actuel.
Maintenant, une année après la parution de mon blogue, une nouvelle tendance se dessine, celle du «grand regret»!
Qu’est-ce que le «grand regret»?
Alors que la «grande démission» semble toujours en route avec plus de 4,4 millions d’Américains ayant quitté leur emploi au cours du dernier mois — il est certain que d’évaluer les avantages et les inconvénients de quitter votre poste pour un nouveau est souvent très difficile. C’est certainement ce qui fait que plusieurs personnes ayant fait partie de la vague de la «grande démission» regrettent aujourd’hui leur choix.
Selon un récent sondage du journal «USA Today», un travailleur sur cinq regrette d’avoir quitté son ancien emploi au cours des deux dernières années, et seulement 26% aiment suffisamment leur nouvel emploi pour y rester. De plus, 30% des répondants ont estimé que leur nouveau rôle était différent de ce à quoi ils s’attendaient et 36% ont estimé que leur équilibre travail-vie personnelle a souffert à la suite de leur récent changement d’emploi.
Et si le «grand regret» n’était que la «grande réalité»?
Il est possible de se questionner sur la raison de cette vague de «grand regret». Est-ce parce que les gens ont démissionné beaucoup trop rapidement et n’ont pas vraiment fait preuve de discernement et d’analyse dans leur processus de changement d’emploi? Ou serait-il probable que vu la concurrence énorme pour retenir et attirer les talents de plus en plus compétitifs, les titres de poste accrocheurs et les descriptions de poste gonflées ne représentaient pas vraiment la réalité?
Les deux sont possibles, mais une explication plus probable est que l’herbe plus verte espérée chez le voisin n’existe pas et que cet idéal du travail que beaucoup ont développé pendant la pandémie n’est pas réel.
La fin du travail tel que nous le connaissons
Après deux ans de crise et de travail à domicile, beaucoup ont du mal à se réajuster à mesure que les restrictions liées à la COVID s’assouplissent et que le monde s’ouvre à nouveau. Les attitudes des gens envers le travail et ce qu’ils attendent de leur travail ont changé de manière importante. Ils se sont habitués à une nouvelle «normalité» où la qualité de vie prime. Mais ce n’est pas tout à fait la nouvelle normalité.
Cela ne veut pas dire que nous sommes revenus comme avant. Au contraire, la pandémie a laissé un héritage positif et rendu le travail beaucoup plus humain. Le travail flexible est maintenant largement accepté. On parle plus que jamais de santé mentale (mais toujours pas assez) et on reconnaît beaucoup plus la valeur de nos équipes, ce qui augure bien pour l’avenir. Cependant, on peut dire que la pandémie a également conduit à des attentes irréalistes selon lesquelles il y a toujours quelque chose de mieux — un rôle plus épanouissant, un salaire beaucoup plus élevé, une plus grande flexibilité — ce qui fait qu’aujourd’hui, les gens en veulent «toujours plus».
Pour un meilleur équilibre
Il est tout à fait normal que les gens aspirent à mieux. En soi, c’est la nature humaine. Tous souhaitent un emploi qui est bien rémunéré et qui est flexible. Cependant, soyons transparents: plusieurs demandes d’employés d’aujourd’hui sont en contradiction avec les réels besoins des entreprises.
Avec la pénurie importante de main-d’œuvre que nous avons vécue (et que nous vivons toujours), plusieurs candidats semblent croire que dans le marché actuel, le moindre souhait doit être exaucé par l’employeur s’il veut pouvoir les embaucher.
Par exemple, de plus en plus de candidats limitent leur recherche à des emplois 100% à distance. Même les candidats à des postes dits «plus traditionnels», qui requièrent logiquement une présence physique, demandent à travailler à domicile à temps plein, ce qui réduit les occasions qui s’offrent à eux. D’autres personnes ont quitté la ville pendant la pandémie et ils revendiquent maintenant ouvertement un salaire plus élevé pour «compenser le prix de l’essence ou le temps de déplacement». Et évidemment, même dans ce cas, elles ne sont souvent pas prêtes à revenir plus que quelques fois par semaine.
Beaucoup de gens pensent que le travail devrait s’adapter aux nouvelles vies et aux nouvelles routines qu’ils se sont taillées pendant la pandémie, mais ce n’est malheureusement pas toujours possible. Avec des attentes aussi élevées, il n’est pas étonnant que plusieurs soient déçus et cela risque de s’amplifier avec la récession à venir.
Oui, dans le marché actuel, les employés ont une position de force et les employeurs doivent travailler plus dur pour attirer et retenir les meilleurs talents — mais je pense qu’il faut aussi trouver un certain équilibre pour le bien de l’entreprise et pas seulement pour l’employé.
Attentes claires
Les responsables du recrutement doivent être très explicites dès le départ. En quoi consiste le travail et quelles sont les règles du travail flexible au quotidien? Plusieurs entreprises communiquent une politique de 100% à distance, mais voient d’un très mauvais un œil un employé qui déciderait de faire ce choix (et ne se gêneront pas pour lui faire sentir).
Les employeurs s’attendent souvent à ce que les nouvelles recrues passent plus de temps au bureau que d’habitude au cours de leur premier mois à des fins de formation. Encore une fois, si tel est le cas, les employeurs doivent le préciser à l’avance afin que les attentes des nouveaux arrivants correspondent à leur expérience de travail et que cela ne se transforme pas en grand regret.
C’est le cas aussi pour une foule d’autres sujets!
L’herbe n’est pas toujours plus verte chez le voisin!
Selon une étude de Pew Research, ce sont les bas salaires, le manque d’occasions d’avancement et le sentiment de manque de respect au travail qui sont les principales raisons pour lesquelles les Américains ont quitté leur emploi dans la dernière année. L’étude a également révélé que «ceux qui ont démissionné et qui sont maintenant employés ailleurs sont plus susceptibles de dire que leur emploi actuel offre un meilleur salaire, plus de possibilités d’avancement et plus d’équilibre et de flexibilité entre vie professionnelle et vie privée». C’est un peu ce qu’on appelle «la lune de miel».
Mais le sont-ils? Est-ce que tous ces travailleurs quittant leur emploi pour un nouveau en trouvent vraiment un bien meilleur que leur ancien? Est-ce que leur nouvel employeur est bien meilleur que celui d’avant? Ou est-il possible que Roland accepte un nouvel emploi qui remplace Stéphanie, qui a quitté cet emploi pour la même raison que Roland quitte son emploi?
Cette théorie semble confirmée par une autre étude publiée cette semaine par le site de recherche d’emploi Muse. Cette étude sur plus de 2 500 travailleurs a révélé que près des trois quarts d’entre eux (72%) ont été «surpris ou regrettés» que le nouveau poste ou la nouvelle entreprise se soit avéré «très différent» de ce qu’ils pensaient. Près de la moitié (48%) de ces travailleurs ont déclaré qu’ils essaieraient de récupérer leur ancien emploi.
En bref, l’herbe n’est certainement pas toujours plus verte chez le voisin (et le café souvent pas meilleur!)
Plus de transparence pour moins de déception!
Peut-être que nous, en tant qu’employeurs, ne sommes pas assez transparents à ce sujet. Ou peut-être que les employés ne savent pas trop à quoi s’attendre d’un nouvel employeur.
Peu importe, il s’agit pour les employeurs d’être clairs sur leurs besoins et les employés d’être ouverts sur les leurs. Si cette réalité n’est pas discutée dès le départ, cela pourrait conduire au malheur et au regret quelques mois plus tard. Et cela coûtera cher à la fois à l’employé et à l’entreprise!