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Armés pour investir: la recette de Daniel Dupont

Dominique Beauchamp|Édition de la mi‑février 2019

Armés pour investir: la recette de Daniel Dupont

N.D.L.R. Dans un marché turbulent et plein d’incertitudes, les fonds ayant une encaisse élevée sont particulièrement bien placés pour acheter des aubaines. Morningstar Canada a recensé pour nous huit fonds d’actions canadiennes dont le trésor de guerre dépasse 14 % du portefeuille. Quatre de leurs gestionnaires ont accepté de partager leurs motivations et leur stratégie.

Gestionnaire du ­Fonds ­Fidelity ­Grande capitalisation ­Canada depuis 2009, ­Daniel ­Dupont place la préservation du capital en tête de sa démarche.

La prudence du natif de l’Estrie est souvent à contresens de son industrie.

L’encaisse, qui a grimpé jusqu’à 45 % du fonds il y a six mois, étonne pour un fonds d’actions, mais le financier dispose d’une énorme latitude pour gérer ses fonds comme bon lui semble.

« ­Depuis deux ou trois ans, de moins en moins d’entreprises remplissaient mes critères de qualité et de valeur. J’avais déjà repoussé les limites des multiples que j’étais disposé à payer, mais à un moment donné, il faut revenir à l’essentiel », raconte celui qui a grandi sur une ferme laitière à ­Saint-Herménégilde.

L’an dernier, le S&P 500 comptait le plus grand nombre de titres affichant un multiple de 10 fois et plus les revenus. Pas seulement chez les titans de la technologie, ­précise-t-il.

Par ailleurs, les risques liés au bilan, à l’exploitation et à l’évaluation d’une société, trois tests au cœur de sa démarche, se détérioraient.

Dans de telles circonstances, les liquidités redeviennent une « option peu coûteuse sur les occasions futures », ­affirme-t-il, paraphrasant une formule chère aux investisseurs ­Warren ­Buffett et ­Seth ­Klerman.

L’amateur d’entreprises de qualité à bon prix a redéployé 1,2 milliard de dollars de son actif au cours des derniers mois, en ­Europe et en ­Grande-Bretagne surtout. « Nous avons bougé rapidement parce que le dédain des investisseurs pour l’Europe a créé des occasions. Nous sommes en hiatus en ce moment, mais si les ­Bourses devaient vivre d’autres reculs importants, je serais très content de profiter des soldes », a évoqué le gestionnaire de ­Montréal.

L’encaisse d’encore 3 G$ pourrait être investie en quelques mois si les marchés piquaient à nouveau du nez, car les cours intègrent déjà le ralentissement économique et la possibilité d’une récession.

Parmis ses achats, le financier cite le fabricant britannique de cigarettes ­Imperial ­Brands (IMBBY, 33,56 $ ­US), qui se négocie à huit fois ses profits et dont le dividende procure un rendement de 8 %. Sa capacité à générer des flux de trésorerie élevés a pourtant bien peu à voir avec le ­Brexit.

M. Dupont a aussi acheté l’exploitant italien d’infrastructures ­Atlantia (ATL.MI, 20,64 €), détenu à 30 % par la famille ­Benetton, au pire d’une crise réputationnelle.

Déjà impopulaire auprès de la classe politique italienne pour s’être moquée de sa gestion du flot de migrants en 2017, la société a été mise au pilori après l’effondrement du pont ­Morandi, à ­Gênes, en août 2018.

Le propriétaire de ponts, de routes et de stationnements sera éventuellement puni pour ses torts, mais son évaluation a déjà fondu de 25 à 10 fois ses profits, indique le diplômé de ­McGill.

En ­Allemagne, le géant ­médico-chimique ­Bayer AG (BAYRY, 19,06 $ ­US) est aussi tombé à 9 fois les bénéfices, dans la foulée des poursuites liées à l’herbicide ­Roundup de sa filiale ­Monsanto.

En ­Amérique, le gestionnaire de ­Fidelity a acheté des actions du fournisseur d’informations spécialisées ­Thomson ­Reuters (TRI, 68,78 $) pendant la confusion entraînée lors la vente de 55 % de sa principale division de services à l’industrie financière au fonds privé ­Blackstone (BX, 33,71 $ US). « ­La transaction complexe a été mal comprise initialement. Il était difficile de donner une valeur à la part que conserve ­Thomson dans ­Refinitiv », explique le diplômé de McGill.

Le titre est devenu une aubaine classique pour qui sait évaluer l’entreprise en pièces détachées.

Derrière tout ce ­branle-bas, M. ­DuPont reste toujours aussi loyal à l’épicier ­Metro (MRU, 47,78 $), dont il a 18,49 des actions.

« C’est certainement l’une des entreprises les mieux gérées du pays, tant sur le plan opérationnel que de la répartition du capital », ­soutient-il.

Le gestionnaire s’attend à ce que l’intégration de ­Jean ­Coutu, dont ­Fidelity était le principal actionnaire, rapporte.

« S’il y a une équipe capable d’aller chercher des synergies, c’est bien celle de ­Metro, et je suis patient », ­conclut-il.

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