« Arrêtez de compter ! » a tweeté en lettres capitales le président des États-Unis. (Photo: Getty Images)
Les États-Unis attendaient jeudi de connaître le nom du président qui prêtera serment le 20 janvier, mais les résultats se font attendre dans les États-clés dont a besoin le démocrate Joe Biden pour battre le président Donald Trump, qui conteste les opérations de dépouillement en justice.
Toute la journée, les responsables locaux de Géorgie, Pennsylvanie, Arizona et Nevada ont communiqué des statistiques sur les bulletins restant à compter, faisant fluctuer l’heure ou le jour où ils auront achevé les dépouillements des bulletins envoyés par la poste. De fastidieuses opérations limitées par la capacité des machines à ouvrir les enveloppes et à scanner les bulletins, et le nombre de travailleurs électoraux.
« Je pense que la journée sera très positive » pour l’ancien vice-président, a dit la directrice de campagne du démocrate, Jennifer O’Malley Dillon. « Nous sommes absolument certains que Joe Biden sera le prochain président des États-Unis », a-t-elle affirmé en disant compter sur les résultats devant arriver jeudi et vendredi.
« Arrêtez de compter ! » a tweeté en lettres capitales le président des États-Unis, qui voit les chances d’un second mandat s’amenuiser au fur et à mesure que des caisses de bulletins de vote envoyés par courrier, majoritairement favorables à Joe Biden, sont décomptées.
Dans un communiqué, également en lettres capitales, il a affirmé qu’il gagnerait l’élection si les bulletins « légaux » étaient comptés, mais que l’élection lui serait volée « les bulletins illégaux et tardifs » étaient pris en compte.
La réalité électorale est que Joe Biden, le vice-président de Barack Obama pendant huit ans, ne doit plus gagner qu’un ou deux des derniers États-clés restant en jeu pour devenir le 46e président américain.
Il avait jeudi 253 ou 264 grands électeurs, selon que l’on inclut ou non l’Arizona (11 grands électeurs), considéré comme gagné par deux médias (l’agence AP et Fox News), mais pas par les autres qui estiment l’issue encore incertaine, en raison du nombre de bulletins restant à compter.
Selon les deux cas de figure, il n’a plus besoin que de six ou 17 grands électeurs pour atteindre le seuil « magique » de 270, qu’il pourrait obtenir dans le Nevada (6), la Géorgie (16) ou la Pennsylvanie (20).
Dans la nuit de mercredi à jeudi, l’écart s’est resserré en Géorgie.
Le résultat final dans cet État traditionnellement conservateur avait été promis pour la mi-journée, un engagement non tenu. En Pennsylvanie, la secrétaire d’État a également affirmé jeudi qu’un gagnant pourrait être annoncé dans la journée, bien qu’il y reste encore un demi-million de suffrages à comptabiliser.
Recours judiciaires
À l’inverse de la Pennsylvanie et de la Géorgie, Donald Trump bénéficie directement, dans l’Arizona, du prolongement du dépouillement.
Il était en train de rattraper Joe Biden, risquant de faire perdre au démocrate les 11 grands électeurs qu’AP et Fox News avaient attribués à Joe Biden dès la nuit électorale de mardi, sur la base de résultats partiels et de modèles statistiques, une méthode habituellement très sûre.
C’est là, à Phoenix, qu’une foule pro-Trump s’est massée, à l’extérieur d’un site de dépouillement, aux cris de « Comptez les voix ! » et de « Honte à Fox ».
Mais dans les États où Donald Trump était derrière Joe Biden, comme dans le Michigan, ses partisans lançaient « Stoppez le vote ! », demandant d’invalider les bulletins non comptés le jour même de l’élection, ce qui est pourtant légal — illustration de la stratégie opportuniste du camp Trump, qui n’est pas sans rappeler la guérilla judiciaire de l’élection de 2000.
Le président républicain avait déclaré, dans la première nuit post-élection, qu’il avait gagné l’élection et qu’il ferait intervenir la Cour suprême, restant évasif sur les raisons.
En réalité, ses avocats ont saisi la justice des États, selon l’objectif recherché localement, avec par exemple la menace de demander un recomptage dans le Wisconsin.
Les démocrates estiment les plaintes sans fondement, mais selon les décisions de multiples juges, ces recours pourraient retarder de plusieurs jours ou semaines l’homologation des résultats.
Dans le Michigan et la Géorgie, deux juges ont déjà rejeté des recours républicains.
L’équipe Trump insistait que rien n’était perdu. « D’ici sans doute demain soir, vendredi, il sera évident pour les Américains que le président Trump et le vice-président Pence vont rester quatre ans de plus à la Maison Blanche », a dit le conseiller Jason Miller.
Désinformation
L’une des batailles concerne la grande Pennsylvanie, où les autorités ont été débordées par le volume de bulletins reçus par la poste. L’avance initiale de Donald Trump au soir de l’élection a fondu au fur et à mesure que les bulletins envoyés par courrier — à 80 % en faveur de Joe Biden — étaient comptés.
À la demande du camp Trump, un juge a ordonné aux autorités locales de laisser entrer des observateurs républicains dans le centre de convention de Philadelphie où le dépouillement a lieu.
Dehors, des partisans de M. Trump manifestaient pour dénoncer des fraudes, face à des contre-manifestants.
« Trump est en train de faire un coup d’État pour voler les élections », dit à l’AFP Emma Kaplan, 30 ans.
Les lieutenants et la famille du président ont lancé une campagne de désinformation pour persuader leurs troupes que des tricheries massives étaient en cours, notamment dans les États comme la Pennsylvanie qui sont gouvernés par des démocrates.
Mais un certain fatalisme semblait gagner le camp républicain. Karl Rove, ancienne éminence grise de George W. Bush, a noté sur son blogue que « voler des centaines de milliers de voix signifierait un complot d’une ampleur digne d’un film de James Bond. C’est impossible ».