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Nicolas Duvernois

Chronique d'un entrepreneur

Nicolas Duvernois

Expert(e) invité(e)

Ce que je ferais de différent?

Nicolas Duvernois|Publié le 19 mars 2019

Ce que je ferais de différent?

(Photo: Riccardo Annandale pour Unsplash)

BLOGUE INVITÉ. J’ai arrêté de calculer le nombre de fois où l’on m’a demandé ce que je ferais de différent en me lançant en affaires avec mes connaissances d’aujourd’hui. Immédiatement, je me remémore toutes les mauvaises décisions que j’ai prises et j’essaie de faire le tri dans ma tête. Cependant, à bien y réfléchir, c’est aussi grâce, et même surtout à cause de mes échecs que je suis rendu, aujourd’hui, à la tête du plus important producteur de spiritueux indépendants au Canada. 

Après tout, on rêve tous d’un parcours sans faute qui nous mène de l’idée au succès tel un long voyage tranquille sur un voilier. Cependant, la réalité est bien différente! Mais puisque la question me revient aussi souvent, voici ma réponse:

Déménager aux États-Unis?

Le simple fait d’écrire ces mots me fait mal au cœur et à l’esprit, moi qui suis si fier d’avoir fondé une entreprise au Québec. Cependant, je dois vous avouer que cette option m’est, à mes débuts, quelques fois passée par la tête. D’un point de vue strictement entrepreneurial, surtout dans mon domaine, j’aurais eu beaucoup plus de facilité, j’en suis absolument convaincu. Que ce soit au niveau du financement, de la tolérance au risque, de la taille du marché ou de la ferveur populaire pour l’achat local, nos voisins du sud ont une longueur d’avance quand vient le temps de se lancer en affaires, malgré leurs multiples défauts. 

Choisir dès le départ des partenaires stratégiques ? 

Bien souvent, en affaires, ce n’est pas ce que tu connais, mais bien qui tu connais. Le réseau et les contacts privilégiés avec des joueurs clés sont primordiaux. À mes débuts, j’ai trouvé très difficile de devoir vivre avec cette fameuse solitude entrepreneuriale. Aurais-je dû dès le départ m’associer avec des partenaires clés qui auraient pu me faire avancer plus rapidement? La question se pose. Cependant, ces mêmes partenaires connaissant la plus-value qu’ils ajoutent au projet, aurais-je été obligé de me départir rapidement de précieux pourcentages de l’entreprise? Qu’est-ce qui est mieux, avoir 100% d’un petit gâteau ou 50% d’un grand?

Me lancer dans une toute autre aventure?

Bien que je me considère extrêmement privilégié de me lever chaque matin afin de travailler pour ma propre entreprise, je m’amuse toujours à regarder autour de moi les entreprises que j’admire et je me demande ce que j’aurais fait à la tête de celles-ci. Aurais-je mieux fait de me lancer dans une autre aventure entrepreneuriale que celle des spiritueux? Et si j’avais fondé les smoothies Evive ou Les fermes Lufa, qu’aurais-je fait de différent? Aurais-je réussi à faire ma place comme les dirigeants de ces entreprises l’ont fait? 

Avec des si, on mettrait Paris en bouteille. Combien de fois je discute avec de jeunes entrepreneurs qui mettent beaucoup trop d’énergie à se concentrer sur ce qu’ils auraient dû faire de différent plutôt que de foncer avec ce qu’ils ont dans les mains. Bien qu’il soit agréable de répondre à la question, je peux vous dire qu’à quelques détails près, je ne changerais absolument aucune journée de mon parcours. Même celles où je vomissais tellement j’étais stressé en me levant, même celles où toutes les banques me disaient non, même celles où je devais demander à Karo, à ma sœur ou à mes parents un peu d’argent pour prendre le bus afin d’aller travailler. 

Mon entreprise est aujourd’hui ce qu’elle est à cause des bonnes et des mauvaises décisions que j’ai prises au cours des 10 dernières années. Bâtir une entreprise parfaite est impossible. Faites tout en votre pouvoir pour faire le moins d’erreurs possible, et avec un peu de chance et surtout beaucoup de travail, vous serez fier de ce que vous avez bâti.