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Ce que révèlent les trottinettes Lime sur le Montréal de demain

Alain McKenna|Publié le 15 août 2019

Ce que révèlent les trottinettes Lime sur le Montréal de demain

(Photo: Alain McKenna/Les Affaires)

Quelle a été votre réaction à l’annonce de l’arrivée des trottinettes électriques Lime dans certains quartiers de Montréal? Si ce n’est pas vous, pariez qu’un collègue au bureau ou un proche a prédit des accidents et une quasi-hécatombe… C’est normal. Au Québec, on semble incapables de tourner à droite au feu rouge de façon sécuritaire en voiture, ou même de respecter son environnement immédiat quand on est à vélo. La venue d’un nouveau mode de transport ne peut faire autrement que générer de nouvelles inquiétudes.

C’est même un peu drôle de voir les hérauts du cyclisme urbain se positionner contre cette nouvelle façon de se déplacer rapidement et simplement en ville… Et défendre dans le même souffle un comportement erratique de cyclistes qui décrochent un nombre proportionnellement plus élevé qu’ailleurs de contraventions.

Se préparer à la ville de demain

Mondialement, la mobilité urbaine se transforme, et tout pointe vers un futur proche où les rues seront partagées par davantage de vélos électriques, de trottinettes électriques, et d’autres véhicules électriques à deux, trois ou quatre roues, et par un nombre décroissant de voitures et de plus gros véhicules.

Le multimodal est à nos portes, et on s’inquiète de la venue de technologies émergentes qui, on s’entend, sont bien moins risquées que les deux tonnes d’acier et de caoutchouc que représente le VUS moyen qui circule trop rapidement sur des routes trop étroites pour tout ce beau monde. On se félicite du génie qui a permis de réaliser un pont en béton gigantesque, mais on s’inquiète de trottinettes qui font 20 kilomètres-heure dans le meilleur des cas…

Les plus grands constructeurs d’automobiles dans le monde ont déjà préparé leurs propres gammes de vélos et trottinettes électriques, compensant pour un déclin durable des ventes de voitures.

Quand on connait leur entêtement devant toute transformation de leurs façons de faire, ce virage est éloquent. Montréal et les autres villes du Québec pourraient prendre les devants de cette transformation. Peut-être que l’arrivée de Lime et de Jump cet été va aider en ce sens.

La méthode montréalaise

N’allons pas absoudre les trottinettes électriques de tout défaut pour autant. Des statistiques indiquent que des accidents routiers en ville ont connu une hausse dans certaines agglomérations au même moment où celles-ci sont apparues massivement sur leurs routes.

Après des mois de négociations en arrière-boutique, la Ville de Montréal et la société californienne Lime ont donc officialisé la mise en circulation de près de 500 trottinettes électriques en libre-service de façon contrôlée, dans certains arrondissements de la métropole. Ça inclut le centre-ville (Ville-Marie), Côte-des-Neiges et NDG, Villeray-St-Michel-Parc-Extension et Westmount.

Les rosepatriennes et rosepatriens pourront bientôt en profiter également. Si vous résidez ailleurs sur l’île et que vous vous demandez pourquoi Lime n’est pas présent plus près de chez vous, parlez-en à votre conseiller d’arrondissement, puisqu’ils ont simplement refusé d’accueillir ces trottinettes sur leur territoire.

Notez que contrairement aux vélos de BIXI (ou même de Jump), la trottinette est un moyen de transport plus convivial pour les gens qui veulent se rendre à destination sans effort. Pas besoin de pédaler, le moteur électrique animant les roues à la pression d’un bouton. Ce n’est pas nécessairement une question de paresse : ça évite d’avoir chaud dans le dos (ou ailleurs) dès les premiers tours de roue, un faux pas vestimentaire si on se rend à une réunion d’affaires importante.

Le modèle est aussi plus ouvert aux touristes et visiteurs étrangers. Par expérience, explorer une nouvelle ville à l’occasion d’une conférence de quelques jours prend une nouvelle dimension grâce à un tel moyen de transport, qui couvre ce que les experts appellent, dans le jargon, le «dernier mille». Ça élargit la portée de nos escapades sans recourir à un taxi, ou au transport en commun, pas toujours invitants.

Les fameuses «règles sévères»

En annonçant la venue de Lime à Montréal, la ville a expliqué que certaines règles allaient être imposées afin que le service et sa quincaillerie ne deviennent pas une nuisance sur la route ou les trottoirs. Des règles qui pourraient s’assouplir selon l’évolution des habitudes des utilisateurs. Évidemment, déjà, des gens contreviennent à ces règles.

Une de celles-là est le port du casque. La même obligation est en vigueur dans d’autres villes où Lime (et son rival Bird) opèrent. Mais à ce jour, on n’a toujours vu qu’une minorité de gens porter le casque sur une telle trottinette. Mercredi matin, entre le centre-ville et le Vieux-Montréal, on a croisé trois trottinettes Lime pilotées par des gens qui, au mieux, portaient la casquette…

Les nombreux visiteurs étrangers qui vont utiliser le service de Lime ne traînent pour la plupart pas un casque de vélo dans leurs valises. On voit mal comment cette règle pourra être respectée en tout temps.

Une autre règle est celle du stationnement. La ville dit avoir créé 239 espaces réservés où récupérer ou déposer les véhicules Lime. Ça ressemble à un espace de stationnement en bordure de rue pour une voiture, mais avec un dessin de trottinette au sol.

Là encore, les espaces qu’on a pu voir cette semaine étaient désertés. Les trottinettes libres étaient garées de façon raisonnable dans cette partie du trottoir où les lampadaires, supports à vélo et autre mobilier urbain se trouve. C’était loin d’encombrer le chemin des piétons et des voitures.

Pour fonctionner, les trottinettes sont géolocalisées en permanence, mais hier, il était possible de les activer peu importe où elles se trouvaient, et de terminer sa course n’importe où également, pas seulement dans les espaces réservés.

D’autres règles présentées comme «très sévères» figurent au programme, mais on n’a pas encore vu la différence avec ce qui se passe ailleurs sur le continent. Les cinq écrans expliquant le fonctionnement du service et de la trottinette quand on s’inscrit à Lime à Montréal sont identiques à celle présentée par Bird à San Jose, mais Montréal indique qu’il y a «formation en ligne» pour tout nouvel utilisateur.

Et à la fin du trajet, il faut prendre sa trottinette en photo pour garantir qu’elle est bien garée, chose qui se fait déjà également dans d’autres villes.

La seule vraie nouveauté est que Montréal a un hiver plus rude qu’ailleurs, et qu’on retirera donc le service de ses rues à la mi-novembre, pour le ramener à la mi-avril.

À moins d’abus graves, souhaitons que ça demeure ainsi. Parce que là encore, c’est un mode de transport qui est populaire auprès des visiteurs étrangers, ceux qui ne connaissent pas les spécificités du service à Montréal, et qui feront comme dans d’autres villes en laissant les trottinettes près de leur point de destination.

Si, au contraire, on serre la vis, au moins, qu’on le fasse également pour les autres chauffards situés derrière un volant ou un guidon…

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