«Pour ma part, la définition d’un produit québécois comprend trois facteurs clés essentiels.» (Photo: 123RF)
BLOGUE INVITÉ. Depuis quelques semaines souffle sur le Québec un véritable éveil collectif sur l’importance de l’achat local. Du répertoire web Le panier bleu au site transactionnel Ma Zone Québec et des centaines d’articles sur le sujet en passant par le début de la neuvième saison de la populaire émission « Dans l’œil du Dragon », les entrepreneurs d’ici et surtout leurs produits ont la cote plus que jamais !
Maintenant que nous sommes tous informés (enfin!) des avantages de prioriser notre propre économie et nos entrepreneurs avant ceux des pays nous faisant compétition, la question doit se poser : c’est quoi au juste un produit québécois?
La question semble simple, la réponse est d’une complexité rare. Au fil du temps, les différentes phases de la mondialisation ont drastiquement bouleversé notre manière de produire, de consommer, de transporter, bref de vivre.
Avant l’apparition de l’internet, de la démocratisation massive des moyens de transport, des moyens de communication et de l’ère de la consommation massive dans laquelle nous vivons depuis les années 50-60, un produit québécois était synonyme de terroir local et d’agriculture. Rares étaient les produits, autres que ceux de la terre, qui se retrouvaient sur les étalages des marchés.
Tout doucement, mais sûrement, le local est devenu régional, puis provincial, puis nord-américain, puis mondial. Ce faisant, la définition même du produit québécois a évolué afin de refléter cette nouvelle réalité.
Par défaut, l’immense majorité des produits québécois sont devenus, en quelque sorte, des produits mondiaux. Notre chocolatier préféré ayant pignon sur rue depuis plus de 50 ans travaille la fève de cacao d’Amérique du Sud ou d’Afrique pour ses créations succulentes. La robe de designer québécois imaginée, dessinée, découpée et cousue dans le quartier Chabanel en plein cœur de Montréal utilise du coton dont la fibre a été tissée en Chine. Cette fameuse bière de micro-brasserie que l’on trouve si bonne n’existerait pas sans houblon majoritairement cultivé aux États-Unis… Est-ce que ça veut dire qu’il n’y a finalement très peu de bières québécoises ou presque aucun vêtement québécois?
Se poser la question c’est y répondre : Bien sûr que non! D’ailleurs, cette réalité n’existe pas seulement au Québec. Savez-vous que la célèbre moutarde de Dijon Maille s’approvisionne en graines de moutarde en Saskatchewan et qu’une partie de la confection des sacs Louis Vuitton se fait au Texas ? De la Corée du Sud pour l’écran tactile à l’Allemagne pour le système de mise en veille en passant par les États-Unis pour l’appareil photo, savez-vous que l’iPhone que vous avez dans vos mains a été assemblé en Chine avec des composantes d’une dizaine de pays.
Pour ma part, la définition d’un produit québécois comprend trois facteurs clés essentiels. La propriété de l’entreprise, le statut de résidence fiscale et l’origine de 51% des composantes du produit fini.
La propriété de l’entreprise
Pour débuter, je crois important le fait qu’un entrepreneur ou actionnaire québécois soit à la tête et détienne la majorité des parts de l’entreprise. Ainsi, on s’assure d’avoir le contrôle sur les décisions les plus importantes de la gestion de celle-ci et on encourage par le fait même une économie de propriétaire.
Statut de résidence fiscale
Pour une raison que je ne m’explique pas, nous oublions souvent dans cette réflexion le statut de résidence fiscale de l’entreprise. En gros, dans quel pays ou dans quelle province l’entreprise paie-t-elle ses impôts? Il est pour moi essentiel qu’un produit soit défini comme québécois quand l’entreprise qui le confectionne est un résident fiscal du Québec.
L’origine de 51% des composantes du produit fini
Pour une grande majorité des produits d’ici, il est extrêmement difficile de pouvoir s’assurer que toutes les composantes de la fabrication proviennent du Québec. Par manque de demande ou tout simplement à cause de la compétitivité des prix, il n’est pas rare de s’apercevoir que le pot en verre contenant de la confiture aux bleuets du Lac-Saint-Jean a été produit en Chine ou que l’emballage contenant les épices boréales du Nord-du-Québec vient du Pakistan. C’est pour cette raison que je m’attends à ce que 51% des composantes finales du produit soient d’origine Québec. Après tout, il faut 51% de vote nécessaire lors d’un référendum pour faire du Québec un pays!
Comme vous le voyez, la réponse est beaucoup plus complexe que l’on peut s’imaginer lorsqu’on se pose la question. Et ce n’est que la pointe de l’iceberg! Comment définit-on les commerçants d’ici qui vendent des produits d’ailleurs? Comment définit-on un entrepreneur sur le web qui vend des produits québécois sur Amazon? Et comment définir des produits tel Pepsi qui produit et embouteille au Québec depuis 1935… Est-ce finalement aussi un produit québécois? Bien hâte d’avoir vos commentaires. Mon petit doigt me dit que cette discussion ne fait que commencer!