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INGÉNIEURS. Le déconfinement sera-t-il l’occasion pour les ingénieurs de redorer leur blason, passablement terni depuis la commission Charbonneau? Leurs compétences en optimisation des coûts, en gestion de projets et en supervision des travaux seront en effet essentiels en contexte de relance économique.
Les ingénieurs piaffent d’impatience à l’idée de contribuer à la relance économique du Québec, qui passera entre autres par une explosion des travaux d’infrastructure soutenus par des fonds publics.
«C’est sûr que nous sommes prêts à participer, mais on veut que le tout se fasse dans les règles de l’art, même si le gouvernement souhaite accélérer les processus. Nous pensons qu’il est possible de le réaliser sans faire de compromis sur la qualité ou sur le respect des règles d’éthique et de développement durable», affirme la présidente de l’Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ), Kathy Baig.
Sans être directement consulté par les autorités provinciales dans l’élaboration du projet de loi 66, l’OIQ a tout de même été en mesure de faire connaître ses préoccupations. «Pour nous, certaines choses sont incontournables pour avoir des infrastructures durables. Tout dépend du donneur d’ouvrage et de la formulation de son appel d’offres», précise Kathy Baig.
Un boom attendu
Les ingénieurs jouent un rôle important à plusieurs étapes d’un projet d’infrastructure, de la conception à la surveillance des chantiers – qui n’est pas obligatoire, mais fortement recommandé par l’Ordre. «Nous sommes disponibles pour répondre aux besoins du gouvernement afin de construire des infrastructures de grande qualité, mais cela dépend toujours du mandat qui leur est confié», souligne la présidente. Elle rappelle que certains promoteurs peuvent être tentés de diminuer quelque peu la qualité de leur construction pour diminuer les coûts. «Notre travail sera alors de respecter notre mandat tout en visant la plus grande longévité possible pour nos infrastructures.» La manière de l’obtenir est d’utiliser des équipements de qualité à toutes les étapes de la réalisation.
De son côté, le PDG de l’Association des firmes de génie-conseil du Québec (AFG), André Rainvile, s’attend à une effervescence rarement vue dans le domaine. «On sent une belle fébrilité chez nos membres, constate-t-il. C’est un défi très stimulant qui se présente et nous sommes extrêmement positifs à l’idée de pouvoir participer à cette relance en mettant notre savoir-faire au service de la collectivité.» En étant impliqués dans toutes les phases des projets, les ingénieurs-conseils pourront s’«assurer d’avoir des infrastructures de qualité qui respectent toutes les normes de durabilité et d’éthique, même si le gouvernement souhaite accélérer le processus menant à la livraison des projets», commente-t-il.
Pour un développement durable
André Rainville assure qu’il est possible d’aller plus rapidement sans négliger les bonnes pratiques actuelles. «Nous sommes des acteurs clés pour nous assurer que le tout se fasse selon les principes du développement durable, fait-il remarquer. On veut des édifices qui seront fonctionnels à long terme. Même chose pour les routes ou les ponts.»
Ainsi, il souhaite que les recommandations des ingénieurs aux promoteurs contribuent à améliorer leurs projets. «Nous sommes à une époque charnière en matière de lutte aux changements climatiques et il y a urgence de diminuer les gaz à effet de serre. Il n’est pas question de faire des compromis sur ces questions», soutient-il.
Le développement durable est devenu une composante de l’ensemble des projets d’ingénierie. Lors de la récente édition des Grands Prix du génie-conseil québécois, l’AFG a par exemple cité quelques projets lauréats dans lesquels la collaboration entre les clients et les firmes a permis d’apporter des solutions efficaces en matière de développement durable. Parmi eux, l’École innovatrice, à Longueuil, la plage urbaine de Verdun, à Montréal, et la réfection de la centrale hydroélectrique de Sturgeon Falls, en Ontario.
Suffisamment de ressources disponibles
Autant l’OIQ que l’AFG assurent qu’il y a suffisamment de ressources pour répondre à la demande, malgré le grand nombre de projets attendus au cours des prochains mois. «Nous sommes en mesure de satisfaire les ambitions du gouvernement», estime André Rainville.
«Il peut être possible, pour certains projets majeurs en région, que des ingénieurs des grands centres doivent être délocalisés, mais nous avons suffisamment d’effectifs pour répondre à un important boom de travaux d’infrastructure publique, puisque les projets privés devraient être un peu au ralenti», renchérit Kathy Baig.
Par ailleurs, l’Union des municipalités du Québec (UMQ) presse les parlementaires de réformer la Loi sur l’expropriation afin de permettre à l’ensemble des municipalités de la province de faire avancer plus rapidement des projets. «L’effet miroir est prioritaire pour faire travailler tout le monde, dans toutes les régions, et pour mettre en chantier autant les petits que les grands projets», croit la présidente de l’UMQ et mairesse de Sainte-Julie, Suzanne Roy.