Comme tous les produits financiers, le «REER-hypothèque» comporte des avantages et des inconvénients. (PHOTO : 123RF)
EXPERT INVITÉ. Vous connaissez bien le Régime Enregistré d’Épargne-Retraite (REER). Mais savez-vous qu’il offre des possibilités que bien des gens ignorent? L’une d’elles s’adresse aux propriétaires immobiliers: le concept appelé «REER-hypothèque», ou plus officiellement «prêt hypothécaire avec lien de dépendance». Il permet à un individu d’emprunter de l’argent dans son REER (pour lui ou un proche) pour financer un prêt hypothécaire sur sa maison.
La mise en place d’un REER-hypothèque nécessite quelques étapes. Premièrement, la personne doit faire affaire avec une institution financière qui offre des REER autogérés et qui accepte de détenir des hypothèques. Tous les fournisseurs de REER ne proposent pas cette option…
La personne peut ensuite placer une hypothèque sur sa résidence jusqu’à concurrence de la valeur de son REER ou de la valeur estimée de la résidence. Pour être admissible, l’hypothèque doit répondre à certaines conditions: il doit s’agir d’une hypothèque véritable, c’est-à-dire une garantie légale rédigée par un notaire et elle doit respecter les taux du marché en vigueur. De plus, le prêt hypothécaire doit être assuré par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL). Une fois ces obstacles franchis, la personne effectue les remboursements périodiques convenus de capital et intérêts à son REER, comme si elle remboursait son institution financière.
Le principe est donc relativement simple. Mais, comme à peu près tous les concepts financiers, cette technique comporte à la fois des avantages et inconvénients.
Parmi les avantages, on compte celui d’avoir accès à des sommes importantes «avant impôts». L’argent sort donc effectivement du REER et sert à payer un prêt antérieur (ou le vendeur) sans que les sommes soient imposées à l’individu.
Mais d’où vient la rentabilité d’une telle stratégie?
De la différence entre le taux qu’on choisit et le rendement que réaliserait la portion prêtée du REER si elle était investie. Chaque dollar utilisé de cette façon est un dollar en moins investi dans les marchés pour la retraite.
Ici, ça peut faire mal…
Si le REER réalise le même rendement que le taux convenu du prêt, on change «quatre trente sous pour une piastre» …
… sans tenir compte de tous les frais!
Ce n’est donc pas rentable, à rendement égal. Et le rendement théorique du REER ne peut être connu qu’a posteriori. On comprend que si ce dernier est supérieur, la stratégie est néfaste.
Si ce n’est qu’une portion à «revenu fixe» du REER qui est utilisée, la situation peut être inversée et devenir «rentable» dans une certaine mesure.
Par exemple, si le taux du REER-hypothèque est égal à ceux des marchés, on comprend que le déboursé est le même pour le propriétaire, qu’il rembourse son REER ou une institution prêteuse. Pendant ce temps, le rendement de la portion du REER utilisée, égal à ce même taux, peut être supérieur à ce qui serait obtenu sur le marché. L’écart doit ainsi être suffisant pour non seulement compenser tous les frais, mais générer une plus-value. On a donc besoin de beaucoup d’argent…
Pas évident, à mon avis. Surtout pas une panacée.
Les frais associés à cette stratégie sont importants. Qu’on parle de ceux liés à sa mise en place (frais juridiques, évaluation de la résidence, assurance de la SCHL) ou encore à la gestion annuelle.
Le REER-hypothèque peut donc constituer un outil supplémentaire dans un contexte de diversification de portefeuille, mais il faut agir avec prudence (et modération) et en effectuant, encore une fois, des calculs personnalisés pour voir si le jeu en vaut la chandelle.
Si, grâce aux taux d’intérêt actuels plus élevés, l’envie vous prend de mettre en place un REER-hypothèque, pensez-y deux fois plutôt qu’une.