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Malik Yacoubi

L'immobilier simplifié

Malik Yacoubi

Expert(e) invité(e)

Crise du logement et accès à la propriété: il y a des solutions!

Malik Yacoubi|Publié le 28 septembre 2021

Crise du logement et accès à la propriété: il y a des solutions!

Il est évident qu’il n’y aura pas de solution miracle pour régler un problème aussi important, mais en regardant les programmes des différents partis politiques, je pense que certaines propositions pourront réellement avoir un impact considérable, et ce à court terme. (Photo: HiveBoxx pour Unsplash)

BLOGUE INVITÉ. Le 20 septembre dernier, les Canadiens ont voté pour un gouvernement minoritaire libéral. Un des principaux enjeux est sans aucun doute la crise du logement qui sévit actuellement à travers le Canada tout entier.

Chacun des grands partis politiques proposait des initiatives afin de contrer cette crise. Dans le contexte d’un gouvernement minoritaire et sachant que les libéraux n’auront d’autre choix que de collaborer avec l’opposition, je me permets ici de faire ressortir selon moi les meilleures initiatives qui auraient un réel impact sur l’accès à la propriété pour les premiers acheteurs.

En tant que président de Nesto, je suis témoin d’un grand nombre de premiers acheteurs qui tentent d’obtenir un prêt pour loger leurs familles, et nous sommes ainsi aux premières loges pour constater les principaux enjeux d’accès à la propriété.

À noter ici qu’il ne s’agit d’aucune manière d’une prise de position politique, mais bien au contraire, je crois que tous les partis ont amené de bonnes solutions pour minimiser cette crise et je tenterai de les faire ressortir ici-bas. 

Dans un premier temps, déterminons les principaux facteurs qui limitent les premiers acheteurs à accéder au statut de propriétaires. 

 

L’offre et la demande

Une règle bien connue de l’économie est celle de l’offre et de la demande; moins l’offre est grande comparativement à la demande, plus les prix auront une tendance vers la hausse. Or, depuis deux ans, l’offre diminue alors que la demande demeure stable et/ou même augmente. 

Par exemple, selon L’Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec (APCIQ), une tendance forte s’est amorcée entre septembre 2019 et septembre 2020 avec une baisse de 33 % des inscriptions en vigueur à travers la province de Québec, ainsi qu’une hausse des ventes de 51%. Suivant la même tendance, nous avons pu observer une baisse de 31% des inscriptions en vigueur entre le mois d’août 2020 et août 2021, mais cette fois, il y a également eu une baisse des ventes puisque l’inventaire ne permettait plus de subvenir à la demande, ce qui a fortement influencé le prix médian. 

Cette pression de la demande sur l’offre a eu un impact direct sur le prix des ventes effectuées. En effet, les prix ont été en moyenne plus élevés de 22% pour les habitations unifamiliales entre l’année 2019 et 2020 et de 18% entre l’année 2020 et 2021. 

La hausse des prix moyens influencée par l’offre et la demande laisse plusieurs familles à l’écart du marché par faute de moyens financiers. Ceci m’amène vers le deuxième facteur limitant l’accès à la propriété, soit la capacité de financement.

 

La capacité de financement

Avec une hausse aussi flagrante du prix médian des propriétés résidentielles, il va sans dire que pour accéder au statut de propriétaire, les familles doivent pouvoir financer cette hausse du prix des propriétés. Ici, tout est une question de ratios et de gestion du risque pour les prêteurs ainsi que pour les assureurs hypothécaires. 

Rappelons que la mise de fonds minimum pour l’achat d’une propriété est de 5% et qu’une prime d’assurance prêt est ajoutée au financement. Pour un financement à 95% de ratio prêt-valeur, une prime d’assurance (taxable dans certaines provinces) de 4 % est ajoutée au financement. L’augmentation des prix de vente affecte non seulement la mise de fonds nécessaire, mais aussi la prime d’assurance ainsi que la taxe qui l’accompagne. De ce fait, depuis les deux dernières années, nous avons pu constater une augmentation des dons monétaires provenant de la famille afin de compenser ces augmentations.

Il est aussi important de se rappeler que depuis 2017, le gouvernement du Canada a implanté un taux de qualification hypothécaire qui est utilisé afin de qualifier les emprunteurs et ainsi établir leurs ratios d’endettement. Malgré la baisse importante des taux hypothécaires, le taux de qualification est passé de 4,79% à 5,25% (ou le taux contractuel + 2% s’il est plus élevé) le 1er juin 2021.

Dû à cette hausse, la capacité d’emprunt d’un emprunteur pré-approuvé pour une transaction de 300 000$ avec une mise de fonds de 5% est maintenant réduite à 285 000$,  soit une réduction d’environ 5%. Dans une économie où les valeurs grimpent, la difficulté d’accès au financement hypothécaire ne fait que s’amplifier.   

 

Les solutions

Il est évident qu’il n’y aura pas de solution miracle pour régler un problème aussi important, mais en regardant les programmes des différents partis politiques, je pense que certaines propositions pourront réellement avoir un impact considérable, et ce à court terme. 

Voici donc un palmarès des cinq initiatives que le gouvernement devrait mettre de l’avant, sans considérer de quel parti elles proviennent : 

 

  1. Réinstaurer l’« amortisation » de prêts assurés à 30 ans pour les premiers acheteurs comparativement à 25 ans comme c’est le cas actuellement. Cela permettra aux premiers acheteurs de bénéficier du programme de mise de fonds de moins de 20% des prêts assurés et ainsi réduire leurs paiements mensuels afin de satisfaire les critères de ratios préalablement expliqués. Cette proposition vient du NPD. 
  2. Augmenter la limite de 1M$ à 1,25M$ pour les prêts assurés, dans un but encore une fois de limiter les mises de fonds initiales des premiers acheteurs. Il est évident que cette initiative aura beaucoup plus d’impact sur les marchés de Vancouver et Toronto, où le prix médian des propriétés dépasse le million de dollars. Cette proposition vient des libéraux.
  3. Établir des standards moins contraignants pour les travailleurs autonomes et les entrepreneurs. Peu de gens le savent, mais les programmes actuels sont très limités pour les citoyens qui n’ont pas de revenus garantis par un employeur.  Bien souvent, les propriétaires de petites entreprises sont forcés d’aller vers des produits de financement hypothécaires plus dispendieux que les salariés, ce qui limite l’accès à la propriété. Cette proposition vient des conservateurs.
  4. Augmentations de l’offre; Les libéraux proposent un fonds de 4G$ afin de construire 100 000 nouvelles maisons à prix abordable d’ici 2025. Cette proposition est intéressante, car elle se penche sur un problème important, mais le chiffre me semble trop bas pour avoir un impact réel sur la situation. 
  5. Une idée que je qualifie de courageuse de la part du Bloc québécois consiste à rendre disponibles les terrains et édifices du gouvernement fédéral pour la construction de logements abordables. Je ne connais pas la teneur exacte que cela représenterait, mais je trouve l’idée intéressante. 

 

En conclusion, je ne crois pas que les problèmes de la crise du logement et de l’accès à la propriété changeront dans le court terme, mais je crois que de bonnes idées sont sorties de tous les partis politiques, et nous devrions éviter les partis pris afin de nous concentrer sur la résolution du problème.