En quelques minutes, je peux vous dire si une start-up y arrivera
Dominic Gagnon|Publié le 21 juillet 2022L’entrepreneur 1 se concentrera sur sa vision, sur le «pourquoi» de son projet, tandis que l’entrepreneur 2 se concentrera uniquement sur le «comment». (Photo: 123RF)
BLOGUE INVITÉ. Après avoir lancé plusieurs start-ups (dont plus d’échecs que de succès) et en avoir mentoré plusieurs dizaines autres dans différents incubateurs et accélérateurs — j’ai fini par développer un don pour rapidement déceler un projet qui va réussir ou échouer!
Comment? Simplement en ayant une discussion simple avec le fondateur durant laquelle je lui pose une question toute simple, mais lourde de sens: pourquoi?
Pour dire vrai, très souvent, la première réponse est loin de me satisfaire. Alors, je continue de demander «Pourquoi?» encore et encore, et ce, jusqu’à ce que je le sente.
Pour ma part, j’ai besoin de me connecter avec la personne que j’ai en face de moi. J’ai besoin de sentir s’il a le bon profil pour mener à bien son projet jusqu’à la fin. Car, ne l’oublions pas, c’est très souvent 1% pour l’idée et 99% pour l’exécution. Cette dernière sera principalement influencée par son [ou ses] fondateur dès le départ. Vous pouvez avoir l’idée la plus géniale du monde, mais vous allez échouer si vous n’avez pas les compétences et l’attitude requises.
On connaît les qualités habituelles d’un bon entrepreneur. C’est un leader, déterminé, capable de se relever et qui fait preuve d’une grande résilience.
Pour moi, il y a deux catégories d’entrepreneurs. Le premier veut faire quelque chose de sa vie et vise à lui donner un sens. Le second n’a pas d’autre aspiration que de gagner le plus d’argent possible. Ce dernier est généralement un bon parleur. Il n’a en tête que le désir d’impressionner. Il passe énormément de temps à se mettre en avant sur Instagram, Tik Tok, même probablement plus qu’à vraiment travailler sur son projet. Il est motivé par cette image sensationnaliste de tous ces «influenceurs» qui font semblant d’être des entrepreneurs avec leur grosse voiture et leur voyage de luxe.
Ce qui anime le premier entrepreneur transparaît immédiatement dans sa façon de parler, dans l’expression de son visage et dans le ton de sa voix. Il ne parlera pas de son produit. Pour lui, c’est (presque) secondaire. Son argumentaire n’est pas un argumentaire de vente. Il ne vend pas pour vendre quelque chose. Ce qu’il veut, c’est atteindre son objectif. Le produit n’est que le carburant qui l’amènera à destination.
Il vous dira pourquoi il a décidé de se lancer. Il vous dira ce qui le motive. Bref, il vous partagera sa passion. Et il en parlera sincèrement, en utilisant des mots qui résonnent et qui vont même parfois vous hérisser le poil sur les bras.
Pour ma part, j’ai toujours été fan de la série «Lie to me» sur la détection du mensonge et qui a été inspiré du psychologue Paul Ekman, qui a démontré que nos expressions faciales sont universelles et ne sont pas le produit d’une culture en particulier.
Un peu comme dans la télésérie à succès, vous pouvez le ressentir quand un entrepreneur est passionné. Ça se voit! La passion est quelque chose qui est difficile à simuler.
En revanche, quelqu’un qui essaie de vous plaire pour obtenir vos faveurs, et surtout votre argent, trahira ses véritables intentions dans ses expressions et son langage.
Le bon menteur pourra vous tromper un moment, mais pas longtemps si vous faites attention à son langage corporel et à sa façon de s’exprimer.
Et aussi, si vous regardez plus attentivement son plan d’affaires.
Le plan d’affaires révélera ses véritables intentions. Tout ce que vous avez à faire est de lire entre les lignes.
L’entrepreneur 1 se concentrera sur sa vision, sur le «pourquoi» de son projet, tandis que l’entrepreneur 2 se concentrera uniquement sur le «comment». La première étape d’un bon pitch est justement de parler de la problématique et son importance — c’est souvent là qu’échoue l’entrepreneur 2 — car il se fout un peu du problème et il cherche uniquement le résultat.
Le premier a une culture qui reflétera et transcendera sa vision. Le second, quant à lui, se concentrera sur les chiffres et tentera de montrer comment son projet «imprimera de l’argent».
Pourquoi la culture est-elle si critique? Car elle permettra à l’entrepreneur 1 de constituer une équipe solide, qui saura faire face aux défis et aux épreuves qui jalonneront inévitablement son parcours. C’est le «pourquoi» qui liera son équipe et la fera tenir debout pendant les périodes difficiles, comme une pandémie ou une récession, par exemple.
«Je préfère de loin une excellente équipe de démarrage avec une idée médiocre contre une équipe faible avec une excellente idée. Parce qu’une grande équipe saura quand pivoter et ils se feront confiance pour exécuter. Une équipe faible échouera tout simplement.» — Bernhard Schroeder, auteur de «Fail Fast or Win Big»
Bref, si vous voulez savoir si un projet risque de fonctionner ou pas, ou encore si vous êtes sollicités pour investir dans une entreprise: vous devez prêter attention à une chose principale: le pourquoi! Pourquoi l’entrepreneur fait-il ce qu’il fait? De ce «pourquoi» viendra la culture qui, à son tour, rassemblera l’équipe. C’est cette culture qui permettra à l’équipe de réagir et de s’adapter aux moindres contretemps — et Dieu seul sait que des contretemps, nous risquons d’en vivre dans les prochaines années!