De plus en plus d’entreprises s'intéressent au modèle circulaire qui repense notre mode linéaire de production-consommation, comme IKEA. (Photo: 123RF)
Nous commençons aujourd’hui la publication des analyses (sur une base mensuelle, vers le milieu mois) d’un nouveau blogueur invité, Louis J. Duhamel, que certains de nos lecteurs connaissent déjà. Il est un stratège d’affaires passionné de l’économie du Québec. Il a été associé dans deux grands cabinets-conseils avant de fonder son propre cabinet. Sa chronique « À géométrie variable » souligne l’importance de savoir s’adapter selon les circonstances et les changements fréquents afin de contrer les menaces et saisir les opportunités à l’horizon. Il abordera des thèmes allant de la planification stratégique à la bonne gestion des opérations en passant par le développement durable. Bonne lecture!
BLOGUE INVITÉ — Pour plusieurs, le modèle circulaire qui repense notre mode linéaire de production-consommation soulève l’espoir d’être la réponse économique tant attendue à la lutte aux changements climatiques. De plus en plus d’entreprises s’y intéressent, et ce, de géants comme IKEA, BMW ou Michelin à des PME québécoises telles que Soleno, Loop ou Kamik.
IKEA innove avec le projet « Circular IKEA 2030 », l’une des plus grandes initiatives de l’histoire de l’entreprise. On vous vendra des meubles fabriqués uniquement avec des matières recyclées ou des restes d’anciennes productions.
BMW a annoncé que son modèle d’affaires serait également circulaire d’ici 2030. Le constructeur autonomible utilise déjà du plastique arraché au continent de déchets au milieu de l’océan Pacifique afin de fabriquer certains tableaux de bord.
De son côté, Michelin recycle maintenant des pneus usagés pour en fabriquer de nouveaux avec l’aide d’un consortium européen afin de collecter et valoriser les pneus usagés.
Soleno utilise des rebuts plastiques pour fabriquer des tuyaux surdimensionnés servant à la captation des eaux pluviales dans des projets d’infrastructures. Cette entreprise le fait même en partie avec des travailleurs qui ont des limitations fonctionnelles ou intellectuelles.
Loop utilise des fruits et légumes ayant dépassé la date de péremption comme matières premières pour ses breuvages aux recettes innovantes.
Kamik produit de son côté des chaussures de qualité en partie en donnant une nouvelle vie à vos vieilles bottes. L’entreprise a depuis 5 ans réutilisé, recyclé et transformé 15 millions de bouteilles de plastique.
Seule notre imagination peut nous imposer des limites à la circularité de notre modèle d’affaires.
Les entreprises s’y intéressent de plus en plus parce qu’elles voient enfin à l’horizon la fameuse prime au marché qu’elles attendent avec patience et résilience. La crise sanitaire provoquée par la COVID-19 ayant permis une réflexion individuelle et collective sur l’urgence climatique, on peut enfin voir la lumière au bout du tunnel.
Pourquoi le circulaire est payant
L’intérêt d’une entreprise pour l’économie circulaire se justifie par trois facteurs:
- un positionnement différencié et recherché par sa clientèle
- une marque commerciale et employeur forte
- des marges plus élevées
On pourrait rajouter une bonne conscience dans un monde où les ressources s’amenuisent.
De plus, la présence d’un écosystème de proximité régionale propre au modèle circulaire permet de «dérisquer» la chaîne d’approvisionnement de l’entreprise.
Comment? Tout simplement en diminuant les risques associés à des ruptures de stock et cela même si les coûts d’approvisionnement sont plus élevés.
La fameuse prime verte au marché pourra toujours compenser.
Il va sans dire que les gouvernements devront faire preuve d’exemplarité en donnant accès aux marchés publics aux entreprises circulaires. En leur offrant un avantage, les pouvoirs publics feront en sorte que d’autres voudront emboîter le pas.
Au cours de la dernière décennie, malgré une volonté politique affirmée des organisations publiques, les habitudes d’achat des principaux donneurs d’ordres (ministères, sociétés d’État, etc.) ne semblent pas avoir suivi.
Des progrès sur le plan des contrats gouvernementaux et des stratégies d’approvisionnement (ex. coût total de possession, etc.), seraient une véritable bougie d’allumage pour la transition.
La nouvelle initiative visant à circulariser l’économie du Québec — regroupant le gouvernement du Québec, des partenaires universitaires et le CIRANO — démontre que le concept lève et qu’il ne suscite plus seulement l’intérêt de groupuscules.
Un stratégie publique doit inclure le privé
Une stratégie gouvernementale en sortira, ce qui est louable, mais n’oublions surtout pas d’impliquer les entreprises qui seules peuvent donner une véritable impulsion au mouvement.
Le circulaire nous sort du vieux paradigme ou l’environnement est avant tout une question de coûts et de réglementation pour les entreprises.
Imaginez un instant de pouvoir capter toute la force et la capacité d’accomplir du secteur privé.
Le Saint-Graal est d’aligner l’impératif du développement durable à une plus grande compétitivité des entreprises.
Voilà la quête qui doit nous animer pour les années à venir.
Greta sera fière de nous.