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Marine Thomas

Billet

Marine Thomas

Analyse de la rédaction

Entre quatre murs

Marine Thomas|Édition de la mi‑septembre 2019

Entre quatre murs

(Photo: 123RF)

Fini les chantiers uniques. Flairant une envie d’écosystèmes autosuffisants, les promoteurs multiplient les projets immobiliers mixtes. Ces minivilles, où on peut aussi bien se loger que travailler et consommer, vendent l’idée du bien-vivre ensemble et d’une cohabitation harmonieuse.

Pendant que l’industrie immobilière tente de répondre à cet idéal, le monde de l’entreprise, lui, continue à bâtir des cloisons. Car ne nous y trompons pas, il y a des murs invisibles dans les espaces ouverts. On peut réaménager autant qu’on veut les espaces de travail, supprimer les bureaux fermés, abolir les places fixes, ajouter des zones de collaboration, rien n’y fait, des sous-groupes se forment toujours, en fonction de leurs propres affinités. Les organigrammes enfoncent le clou. Chacun appartient à une équipe, avec ses propres codes, ses rituels et ses façons de faire. Le sentiment d’appartenance est fort. Entre nous, on se comprend, on est du même clan.

C’est pourquoi il est si difficile de briser les silos. Malgré les aberrations que crée le manque de communication entre les services, ainsi que les incompréhensions et les frustrations qu’elles génèrent, il n’y a pas de réelle envie de se mélanger. Envers les autres, on ressent au mieux un sentiment d’indifférence, au pire, un sentiment de rivalité. Après tout, on se bat régulièrement pour des projets, des budgets ou de la reconnaissance. Ce ressenti est parfois exacerbé, consciemment ou non, par la direction elle-même.

Or, cette muraille invisible a un impact sur l’entreprise. Comment avoir une vision globale lorsqu’on ne voit que sa partie ? Comment ne pas dédoubler les efforts quand il n’y a aucun partage des ressources et des talents ? L’innovation émerge de la confrontation des différences, et la collaboration se développe grâce à ce qui nous unit. Il ne sert à rien d’en faire des axes stratégiques de nos organisations si on ne favorise pas au préalable ces conditions.

Mettre en place une véritable synergie entre les divisions d’une entreprise n’est pas une utopie. Il suffit d’en faire une priorité. Cela commence par les gestionnaires, qui doivent montrer l’exemple. À quand remonte votre dernier échange spontané avec un collègue d’une autre équipe, sans y avoir été contraint par le fait de vous retrouver malencontreusement au même moment, à la machine à café ?

Si cette mentalité de clans existe dans votre entreprise, observez comment vous y contribuez, directement ou indirectement. Et je vous mets au défi, d’ici la réception de votre prochain journal, de faire un geste pour enlever une brique du mur qui vous sépare.

Oserez-vous être la personne qui ouvre la brèche ?

Marine Thomas
Rédactrice en chef, Les Affaires
marine.thomas@tc.tc
@marinethomas