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Nicolas Duvernois

Chronique d'un entrepreneur

Nicolas Duvernois

Expert(e) invité(e)

11 octobre 2022 | 11:56 am

Est-ce la fin de la classe moyenne?

Nicolas Duvernois|11 octobre 2022

Est-ce la fin de la classe moyenne?

L’OCDE définit celle-ci comme tout ménage gagnant entre 75% et 200% du revenu national médian. (Photo: 123RF)

BLOGUE INVITÉ. Revenus stagnants, inflation inquiétante, forte hausse des prix de l’immobilier, endettement voire surendettement des ménages, le portrait économique de la classe moyenne a rarement été aussi peu reluisant depuis la montée en force de celle-ci vers la fin du 19e siècle et surtout lors des trente glorieuses suivant la Seconde Guerre mondiale.

Des deux côtés de l’Atlantique, l’économie se transforma drastiquement faisant éclore une nouvelle classe se nichant entre les classes plus pauvres et celles plus aisées. Ni pauvre ni riche, telle que décrite par le sociologue français Henri Mendras, environ 42% de la population québécoise en ferait partie.

Bien qu’extrêmement complexe à circonscrire, notamment en raison des différentes réalités d’un pays à un autre, la classe moyenne se définit souvent par les revenus totaux avant impôt, soit une fourchette entre 45 000 $ et 90 000 $ pour une personne célibataire et entre 60 000 $ et 115 000 $ pour une famille de quatre. Pour sa part, l’OCDE définit celle-ci comme tout ménage gagnant entre 75% et 200% du revenu national médian.

Émergeant de la mondialisation et longtemps en croissance, la classe moyenne traverse depuis plusieurs années de multiples défis, ironiquement, aussi en raison de la mondialisation. Autant l’ouverture des frontières a permis à plusieurs générations de sortir de la pauvreté, autant les nombreux excès des dernières décennies sont la raison d’un fossé qui ne cesse de grandir entre les différentes classes, avec, au milieu, la classe moyenne qui en subit le plus les conséquences.

Force est d’admettre que malgré tous les maux imposés par la pandémie, nous avons tous été témoin de graves déficiences de notre modèle économique actuel qui a prouvé le grand besoin de se réinventer… lui aussi.

Face à cette réalité, l’absence d’une classe moyenne forte représente un réel danger pour une saine démocratie. Il suffit de constater l’état de santé du processus démocratique dans les pays où celle-ci est inexistante ou presque… triste pensée, entre autres, pour la Corée du Nord, Haïti, l’Afghanistan ou le Yémen. D’ailleurs, ce n’est pas par hasard que tout régime autoritaire ou dictateur digne de ce nom fasse tout en leur pouvoir afin d’éliminer cette classe qui représente un risque pour le système.

De plus, avec «l’épuisement» de la classe moyenne vient automatiquement les dérives identitaires, idéologiques ou autres. Du «angry white man» américain en passant par les conspirationnistes de toutes espèces, les extrêmes foisonnent particulièrement bien en temps de crise où pointer le doigt sur le ou les responsables de notre malheur n’est que la résultante d’une partie de la population se sentant perdre leur «place», leur «pouvoir» et leur «influence».

Cela étant dit, en excluant les conséquences économiques dramatiques qui émergent lors de la mise sous pression de la classe moyenne, ne sous-estimons pas les répercussions encore plus graves et profondes qu’elles laissent également dans nos sociétés.

Je me permettrais de conclure cette réflexion en réitérant l’importance d’une classe moyenne forte, prospère et inspirante qui d’un côté offre l’opportunité et l’espoir d’une meilleure vie et de l’autre qui s’assure, grâce à son pouvoir, d’une vie démocratique saine.