(Photo: Émilie Nadeau - Page Facebook officielle de François Legault)
ANALYSE. La crise de la COVID-19 bat son plein depuis déjà deux mois. Au moment d’écrire ces lignes (en politique et dans les pandémies, les choses peuvent changer rapidement), le trio de choc Legault-McCann- Arruda mérite à coup sûr toutes les louanges qui lui sont faites.
De fait, les observateurs soulignent sa performance impeccable sur tous les fronts : empathie, authenticité, leadership, esprit de décision, clarté et cohérence des messages et de la stratégie, efficacité des mesures… Il y a pourtant une qualité que je n’ai jamais vue mentionnée par ces observateurs. Il s’agit du courage.
Le courage de prendre quotidiennement des décisions difficiles, certes. Maintenant que la pandémie n’est plus contestable, maintenant que la stratégie fondamentale de la distanciation fait la quasi-unanimité, tout le monde prend des décisions «difficiles».
Mais dans cette crise, le véritable courage a d’abord consisté à agir avant que l’ampleur de la crise devienne évidente pour tout le monde.
Le vrai courage, ce n’était pas tant de prendre telle ou telle décision. C’était de prendre telle ou telle décision avant les autres. Le 12 mars, dès le lendemain de la déclaration officielle par l’Organisation mondiale de la santé que la COVID-19 était une pandémie, le Québec a interdit les rassemblements de plus de 250 personnes. Dès le 14 mars, le Québec a été la première province canadienne à déclarer l’état d’urgence sanitaire, alors qu’il n’y avait que 21 cas confirmés chez nous. Trois jours avant l’Ontario, l’Alberta et la Colombie-Britannique. Dans un cas de pandémie, trois jours, c’est une éternité.
Selon la présidente de la Fédération des médecins spécialistes du Québec, Dre Diane Francoeur, à ce moment-là, «le Canada riait de nous […] On trouvait qu’on exagérait.» Facile aujourd’hui de dire qu’il était évident de fermer les écoles, les commerces, etc. Mais ça ne l’était pas. Économiquement, psychologiquement, les mesures adoptées étaient coûteuses et allaient le devenir de plus en plus. Pour le premier ministre, le risque politique était énorme : celui de se faire accuser plus tard d’avoir paniqué et coûté inutilement une fortune aux Québécois. Le risque était décuplé par le fait que le Québec prenait des mesures plus hâtives et plus contraignantes que les autres territoires nord-américains.
Je ne suis pas dans le secret des dieux. Mais je soupçonne que derrière l’esprit de décision de François Legault, il y a eu des experts affichant le courage de convictions trempées dans la science. En cela, François Legault n’était pas unique : d’autres décideurs politiques ont eu les mêmes avertissements de leurs experts. Il faut donc souligner le courage de François Legault d’avoir écouté les experts et d’avoir agi avec détermination, sans attendre les autres.
La communication, l’empathie, l’esprit de décision, la clarté, oui, tout cela est essentiel en temps de crise. Mais avant toute chose, il faut le courage. Le courage de ses convictions, le courage de faire ce qui n’est pas évident et son corollaire : le courage de se tromper, de l’admettre et de changer de stratégie pendant la crise.
Le courage devrait faire partie des «habiletés de gestion» enseignées dans les grandes écoles.