L’industrie minière a du pain sur la planche pour les 25 prochaines années et les enjeux ESG se profilent déjà. (Photo: 123RF)
L’acronyme ESG fait référence à la gestion des enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance d’une entreprise. Comme on s’en doute, ce sont des réalités qu’on associe aux parties prenantes d’une organisation : actionnaires, employés, clients, fournisseurs, gouvernements, etc. Sont aussi concernés les milieux de vie des entreprises, et, ultimement, toute la planète, quand on parle d’environnement.
Plusieurs organisations perçoivent encore les efforts ESG comme des vœux pieux. Une récente étude de PwC (2022) révèle que 57 % des entreprises canadiennes ne divulguent pas leurs mesures ESG, un principe de base quand on considère sérieusement ces enjeux.
Heureusement, d’autres organisations intègrent déjà à leur culture des pratiques de gouvernance et de gestion ESG : instauration de mécanismes de dialogue avec les parties prenantes, politiques de diversité et d’inclusion, conciliation travail-famille, pratiques commerciales responsables, plan de réduction des gaz à effet de serre, etc.
Les principes ESG ont souvent été évoqués pour permettre aux entreprises de devenir de meilleurs citoyens corporatifs. Sans négliger cette incidence, les minières découvrent aujourd’hui que les mêmes pratiques ESG deviendront indispensables à leur survie, rien de moins!
Le raisonnement pour en arriver à cette conclusion est inattendu, mais très prévisible. Il tient en trois temps:
1. La planète s’aligne pour atteindre la carboneutralité d’ici 2050. Il s’agit d’un consensus mondial partagé par les 191 états signataires de l’Accord de Paris en 2015. Des milliers d’entreprises partagent déjà cet objectif.
2. La transition énergétique a un besoin urgent de minéraux critiques.
3. Ces minéraux devront provenir de sources éthiques et durables, donc de fournisseurs responsables. Je n’exagère pas en pensant que le guide de survie des minières tient en bonne partie dans trois lettres: ESG.
Le besoin urgent de minéraux critiques
Silicium, terres rares, uranium pour l’énergie à faible émission de carbone. Cuivre, aluminium et acier pour les réseaux de distribution. Lithium, nickel et cobalt pour les batteries d’autos et le stockage d’énergie. Les matériaux critiques sont indispensables à la transition énergétique.
Plusieurs gouvernements les considèrent maintenant comme essentiels.
Les 40 plus grandes sociétés minières du monde (TOP 40) accusent d’importants retards de production. Certaines commencent à peine à s’y intéresser, ce qui aggrave le déséquilibre entre l’offre et la demande.
Déjà, les marchés connaissent des problèmes d’approvisionnement. L’an dernier, les prix du cuivre ont augmenté de 26 %, ceux du cobalt de 119 % et ceux du lithium de 280 %. L’Agence internationale de l’énergie (AIÉ) estime que la demande annuelle pour ces minéraux dépassera les 400 milliards de dollars américains d’ici 2050.
Des minéraux issus de sources éthiques et durables
L’industrie minière a du pain sur la planche pour les 25 prochaines années et les enjeux ESG se profilent déjà. Les minières devront opérer de façon plus responsable et durable. L’Union européenne examine minutieusement les chaînes d’approvisionnement du point de vue éthique et durable.
La Securities and Exchange Commission (É.-U.) s’intéresse au « greenwashing » (image trompeuse de responsabilité écologique). La Chine songe à exiger des rapports améliorés sur la durabilité. Le Japon, la Malaisie, l’Inde, Singapour et le Royaume-Uni demandent plus de transparence en matière d’ESG.
Certaines sociétés répondent à l’appel.
Rio Tinto produit de l’aluminium sans carbone pour les produits Apple. Le groupe BHP approvisionne Toyota en nickel pour ses batteries à faible émission dans le cadre de sa stratégie verte. China Shenhua Energy, la plus importante société de charbon cotée en bourse, consacrera la moitié de ses dépenses en capital dans les énergies propres d’ici 2030.
Autre volet des pratiques ESG : la transparence fiscale et la saine gouvernance.
Pour atténuer les impacts de la pandémie de COVID-19, plusieurs gouvernements révisent leurs politiques fiscales dans le but de récolter les impôts des grandes sociétés à leur juste valeur.
L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a publié sa solution à deux piliers (juridictions de marché et impôt minimal de 15 %), et 137 pays membres l’ont approuvé. La plupart des membres du Top 40 mondial des minières seront affectées par ces mesures.
Ces changements au régime fiscal mondial se répercuteront également sur plusieurs législations régionales. Par exemple, le Nevada, aux États-Unis, impose maintenant une taxe d’accise aux minières d’or et d’argent pour financer l’éducation.
Des critères ESG payants
Ce qui devrait encourager les minières à prendre résolument le virage ESG, c’est la rentabilité d’une telle décision. S&P Global publie un indice de l’aluminium vert où les clients sont prêts à payer de 10 à 15 dollars/tonne supplémentaires pour l’aluminium durable.
Du côté du capital, des banques et des investisseurs coupent les liens avec des entreprises pilotant des projets jugés non durables ou contraires à l’éthique. Inversement, on peut accéder à des capitaux moins chers tels que les obligations vertes ou les prêts liés à du développement durable.
Quinze équipementiers sont devenus membres de l’Initiative for Responsible Mining Assurance (IRMA), dont cinq manufacturiers de véhicules électriques.
L’un d’eux, Volkswagen, écrit : « La voie vers les chaînes d’approvisionnement transparentes et durables mène directement à la mine. C’est pourquoi nous saluons l’établissement de règles claires ».
Que dire de plus pour démontrer l’avantage des pratiques ESG dans l’industrie minière?
Sur ce, bon été!