Des instititutions financières offrent déjà des applications d’aide à l’investissement. (Photo: 123RF)
GESTION DE PATRIMOINE. Les frontières continuent de s’estomper entre l’humain et la technologie en matière de gestion de patrimoine. Et tandis que le profil démographique, les besoins et les préférences des investisseurs évoluent, la pandémie de COVID-19 a « accéléré la transformation déjà amorcée de la façon dont les Canadiens consomment des produits et des conseils financiers », constate Paul D. Allison, président du conseil d’administration de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM).
Ainsi, au moment de faire le bilan de son exercice 2019-2020, l’OCRCVM a remarqué « la numérisation des services-conseils et une démarcation moins nette entre les modèles de services ».
Traditionnellement, sur le marché canadien, la planification du patrimoine est principalement basée sur des rapports « épisodiques », fait remarquer Caroline Dabu, cheffe de la planification et des services-conseils en gestion privée à BMO Groupe financier. Mais la vie des clients a changé, estime-t-elle.
Compte tenu de la complexité croissante de leurs besoins et de la rapidité avec laquelle les choses évoluent, le rôle des conseillers en gestion de patrimoine s’élargit, fait-elle remarquer. Ceux-ci doivent être en mesure de présenter une vue d’ensemble à leurs clients lorsqu’ils leur recommandent des solutions financières.
« Nous nous attendons à ce que les clients exigent davantage de nous en matière de livraison de services numérique et, plus particulièrement, qu’ils demandent de pouvoir interagir avec leur conseiller et leurs finances de différentes manières », ajoute-t-elle.
D’où le lancement d’applications d’aide à l’investissement par différentes institutions financières, dont la Banque TD avec AppuiObjectifs TD. Celle-ci permet aux investisseurs d’élaborer des plans de placement pouvant contenir des actions et des fonds négociés en Bourse (FNB).
BMO, pour sa part, a bonifié Plani-avenir BMO, son outil de planification du patrimoine, afin de permettre aux conseillers d’offrir à leurs clients des conseils beaucoup plus holistiques, qui prennent en compte l’ensemble de leur situation. Un portail en ligne a aussi été lancé « où les clients peuvent examiner leur plan et tester des options de rechange telles que l’ajout ou la suppression de placements, ainsi que la modification du montant ou de l’échéancier de leurs objectifs d’épargne », explique Caroline Dabu.
Celle-ci affirme aussi constater un intérêt croissant pour la gestion discrétionnaire en tant qu’approche de gestion du patrimoine, une méthode qui amène le client à déléguer à son conseiller la plupart des décisions quotidiennes liées aux placements et aux transactions sans devoir demander une confirmation chaque fois. « Au-delà de l’accent mis sur la gestion des placements ou la planification des flux de trésorerie, l’approche de BMO intègre la planification fiscale, les considérations d’ordre successoral, la planification financière et la philanthropie », énumère-t-elle.
La conversion vers la gestion discrétionnaire a été une étape clé de la dernière décennie, particulièrement pour les produits d’épargne collective, renchérit Gaétan Veillette, planificateur financier à IG Gestion de patrimoine. « Le conseil et la gestion de patrimoine se limitent trop souvent à la gestion des placements financiers selon les permis du conseiller et de son cabinet. Sauf que les affaires du client dépassent largement ses placements financiers », constate-t-il.
Le planificateur est d’avis que l’offre de gestion personnalisée du patrimoine doit considérer les modèles de gestion de portefeuille qui visent à investir plus stratégiquement, les phases d’administration du patrimoine liées au cycle de vie du client, ainsi que le profil socioéconomique de ce dernier.
Être mieux informé
Est-ce que cette « personnalisation » de l’offre de service signifie que la gestion privée ou la gestion discrétionnaire sont appelées à prendre une plus grande place dans l’avenir ? Cela dépendra beaucoup des besoins que les clients vont exprimer, estime Me Maxime Gauthier, chef de la conformité et représentant en épargne collective à Mérici Services financiers.
« Est-ce que le rôle de conseiller est appelé à migrer vers celui de coach financier ? En fait, je pense que ça aurait toujours dû être le cas », ajoute-t-il. Selon lui, le travail du conseiller consiste avant tout à accueillir le client, l’écouter, tenter de comprendre sa situation, ses projets et ses contraintes, puis de valider l’ensemble de ce qu’il dit avec les chiffres pertinents afin d’avoir une compréhension la plus complète possible de son contexte.
« À la base, le rôle du conseiller consciencieux, ce n’est pas de vendre et d’avoir le plus de gros portefeuille possible, c’est d’aider son client à grandir dans leur relation professionnelle et de l’amener à développer des aptitudes personnelles pour atteindre ses objectifs et ses rêves », fait valoir Me Gauthier.
C’est pourquoi il recommande aux gens de bien déterminer leurs besoins en matière de gestion de patrimoine avant « de magasiner leur professionnel en services financiers selon le niveau de services et le coût qu’ils jugent raisonnable de payer ».