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Il était une fois… des actions à la Bourse de Montréal

Dominique Talbot|Édition de février 2024

Il était une fois… des actions à la Bourse de Montréal

La tour de la Bourse a été achevée en 1963. C’est la Società Generale Immobiliare, dont le plus important actionnaire était le Vatican, qui l’a fait construire.

SPÉCIAL 95 ANS D’INNOVATION. Quand Les Affaires a demandé à plusieurs acteurs du milieu québécois de la finance de s’exprimer sur la fin du marché des actions à la Bourse de Montréal au début des années 2000, une aventure qui avait commencé en 1874, la réponse était presque toujours la même:«C’était inévitable.»

Le gestionnaire de portefeuille et fondateur de Fiera Capital, Jean-Guy Desjardins, n’avait que 16 ans lorsqu’il a foulé pour la première fois le parquet de la Bourse de Montréal, qui était à l’époque située dans la rue Saint-François-Xavier. Fasciné par l’énergie qui s’y dégageait, il y retournait presque tous les midis.

Joan Paiement rêvait aussi, dans sa jeunesse, de se trouver sur les parquets d’une Bourse. Elle est devenue directrice générale de la Bourse de Montréal. «Quand je me suis retrouvée là, j’étais la fille la plus heureuse du monde. J’ai adoré mon passage. Il y avait toujours de l’action. Les négociateurs sur le parquet… Toutes sortes de choses qui n’existent plus aujourd’hui», se remémore-t-elle.

Mais toute bonne chose a une fin. «Le marché des actions à Montréal était plus là pour des raisons politiques qu’autre chose. La répartition était de 90 % des actions à Toronto et 10% envoyées à Montréal. C’était juste pour la soutenir», analyse-t-elle.

D’ailleurs, la rivalité entre les deux places boursières était vive, confie Joan Paiement. Mais contrairement au hockey, c’est la Ville Reine qui, cette fois, avait la haute main.

«Les pires journées, c’est lorsque la Bourse de Toronto avait des problèmes informatiques et qu’elle envoyait ses transactions chez nous. Nous n’étions pas équipés pour ça. Mes autres pires journées, c’est lorsque ça ne fonctionnait pas chez nous et que je devais appeler Toronto. Il y avait toujours un certain mépris entre Toronto et Montréal. C’était difficile pour moi de les appeler pour dire que nos systèmes ne fonctionnaient pas», se rappelle-t-elle.

«C’était sous respirateur artificiel. On est quand même sortis de là avec l’exclusivité d’un marché qui est une belle affaire pour le Québec. Ils [à Toronto], ne peuvent pas venir jouer dans ce jardin-là. Ça ne donne rien de se battre contre ça», dit Jean-Guy Desjardins, en référence aux options et aux produits dérivés financiers canadiens qui sont maintenant l’apanage de la Bourse de Montréal.

 

L’avant-projet de la Place de la Bourse, en une de Les Affaires en septembre 1961, prévoyait trois tours identiques de 51 étages groupées en triangle. Les trois tours devaient abriter la Bourse de Montréal, la Bourse canadienne et la Banque mercantile du

 

Des 25,7 millions d’actions qui se négociaient annuellement à Montréal avant la crise de 1929, il n’y en avait plus que 1,7 million en 1999.

«Nous avons été trop passifs comme Québécois. Nous avions une position de chef de file, dit de son côté David Després, vice-président aux services d’investissement chez LetkoBrosseau. Aujourd’hui, à travers les années, nous avons accepté de céder cette position de leadership à Toronto. Pourquoi c’est arrivé ? Je trouve ça très désolant, mais le passé, c’est le passé.»

Faisant référence à la forte corrélation entre l’ancien Régime épargne-actions et l’émergence d’entreprises comme Couche-Tard (ATD, 79,19 $) et CGI (GIB.A, 150,34 $), il insiste qu’il «faudrait créer des conditions gagnantes pour concevoir un système où le climat d’investissement est propice. Mais aussi où on peut favoriser l’émergence de champions québécois qui vont devenir des champions mondiaux».