«Ce n’était pas du travail pour nous, c’était plutôt un coup de main qu’on donnait à nos parents», dit Jean Benny, ici accompagné de ses frères Yves (gauche) et Vincent (centre). Le premier est aujourd'hui vice-président, développement des nouveaux marchés de Benny&Co. et président de la Fondation Benny&Co, alors que le second est associé propriétaire de Benny&Co. (Photo: Courtoisie)
LA PREMIÈRE JOB DU BOSS. Du plus loin qu’il se souvienne, Jean Benny a contribué à la hauteur de ses moyens au succès des rôtisseries Benny&Co., dont il s’apprête tranquillement à tendre les rênes à sa relève.
Dès l’âge de trois ans, il rangeait les bouteilles vides au sous-sol de l’établissement de ses parents, qu’il rachètera quelques années plus tard.
«On vivait dans un trois et demi au-dessus du restaurant, dit-il. Ma mère était tout le temps-là, puisqu’elle y travaillait. Elle voulait nous garder proche et nous responsabiliser, donc elle nous donnait de petites tâches. Mais ce n’était pas du travail pour nous, c’était plutôt un coup de main qu’on donnait à nos parents.»
Il aimait tout particulièrement accompagner son père lorsqu’il se glissait derrière le volant de sa Fiat 500 ou de son «station wagon», afin de livrer des poulets rôtis ou récupérer les ingrédients nécessaires au bon roulement de leur rôtisserie.
«En 1964 ou en 1965, je suis même parvenu à démarrer l’auto qui était embraillée pendant qu’il était sorti déposer la commande. Les autos étaient bien moins sécuritaires à l’époque», raconte-t-il en riant.
Dès l’âge de trois ans, Jean Benny rangeait les bouteilles vides au sous-sol de l’établissement de ses parents, qu’il rachètera quelques années plus tard. (Photo: Courtoisie)
Ses souvenirs d’enfance sont intimement liés à cet établissement de Montréal-Nord, jusqu’à ce que la petite famille plie bagage pour s’installer à Saint-Félix-de-Valois.
Cumulant déjà les petits boulots à droite et à gauche, Jean Benny a rapidement eu soif d’indépendance. «Vers 9 ou 10 ans, demander de l’argent à mes parents, on ne faisait pas ça.»
Avec l’obtention de son permis de conduire lui est revenue la responsabilité de s’occuper du restaurant les fins de semaine.
«J’avais déjà travaillé à différents niveaux, je m’étais même déjà occupé de réparer les autos de livraisons, car j’aimais la mécanique. Mais là, c’était de l’opération plus sérieuse : j’avais à fermer le restaurant le vendredi soir, et à l’ouvrir le samedi et le dimanche.»
Non seulement a-t-il parfait son art de la restauration, devant s’occuper de tout ce qui assurait le bon roulement des activités de la rôtisserie, mais aussi son leadership. «Quand tu as appris auprès des employés plus expérimentés que toi, puis que tu as la responsabilité de faire rouler l’entreprise, ça prend un peu de gymnastique au début, explique-t-il. À 17 ans, ta crédibilité n’est pas faite.»
Il se souvient encore de l’énergie grisante qui animait l’équipe réduite qu’il menait alors quand les commandes affluaient. «Ça prend trois heures pour faire cuire un poulet, donc il faut planifier [la demande des clients]. Quand on l’a bien fait, c’est le fun. Ça te procure toute une satisfaction de sortir d’un rush.»
Au-delà d’anticiper avec justesse la quantité de carcasses à rôtir, la clé pour que de telles périodes de pointe se déroulent bien, a-t-il alors constaté, c’est le sentiment d’appartenance qui unit chaque collègue de travail.
«Tout est possible»
À l’âge de 19 ans, Jean Benny a acheté de ses parents son tout premier restaurant. Il lui restait alors encore un an à passer sur les bancs d’école avant l’obtention de son diplôme d’étude collégiale. «Je pensais m’en aller en marketing, mais j’ai préféré demeurer dans la restauration», se remémore-t-il.
C’est d’ailleurs ce qu’il souhaite aux jeunes qui entrent sur le marché du travail de rapidement trouver, ce milieu qui les fait vibrer, même si celui-ci comporte son lot d’incertitudes.
«On est au début de notre carrière, on peut prendre des risques», martèle-t-il.
Ses premières années à la tête de son propre établissement n’ont d’ailleurs pas été de tout repos, car le Canada traversait alors une crise économique.
«Il y a toujours des opportunités, qu’importe l’économie, affirme celui qui a profité de cette période pour déménager la rôtisserie dans un plus grand local sur le boulevard Pie-IX. On a eu chaud, avec les taux d’intérêt à 14%, mais on s’en est bien sorti. Ça m’a démontré que tout est possible. […] Mais ça demande parfois un peu de patience.»