Le S&P 500 a terminé la semaine 1,3% sous son record. Le gain en 2021 s'établit à 15,2%. (Source: Advisor Perspectives)
Les prévisions sont périlleuses en tout temps, mais la période estivale est la saison de l’année où elles sont les plus ingrates.
L’absence de négociateurs et de pros rend les signaux encore plus difficiles à décrypter puisque l’on assiste surtout à une grève d’acheteurs dont il ne faut pas tirer de grandes conclusions.
Malgré la bonne tenue des grands indices boursiers, qui frôlent encore des records, les investisseurs se déplacent encore d’une industrie à l’autre ces jours-ci en fonction des données contradictoires du jour.
L’inflation est la plus spectaculaire en 30 ans en juin, tout comme la pénurie de main-d’œuvre, mais le pire est peut-être passé, disent les économistes.
Puisque juin marque le dernier mois de l’effet de comparaison de la pandémie, les prochains donneront un aperçu plus juste de la trajectoire des prix, indique Martin Roberge, de Canaccord Genuity. Pour sa part, le stratège s’attend à ce que l’inflation décélère, mais qu’elle dépasse les cibles de la Fed jusqu’en 2022.
En même temps, la vigueur de la reprise se modère ce qui fait douter les investisseurs de leurs paris cycliques. Le recul des cours des matières premières depuis mai renforce cette perception. La propagation du variant delta en rajoute.
Le S&P/TSX est d’ailleurs repassé sous la barre symbolique de 20,000, le 16 juillet, mais a glissé à peine 2% sous le record du 7 juillet.
Dans son plus récent bulletin, le 12 juillet, Michael Wilson de Morgan Stanley appréhendait une dépréciation d’encore 15% de l’évaluation des cours boursiers dans la phase actuelle de transition du cycle économique de la reprise à la croissance.
Le stratège disait aussi craindre que la demande refoulée pendant la pandémie ne s’avère moins vigoureuse qu’on le croit et qu’elle ralentisse davantage après la fin de plusieurs programmes de soutien.
Dans les marchés, les observateurs ne savent plus trop quoi penser non plus du déclin des taux à long terme qui défie la forte inflation. Certains y voient l’impact du rachat mensuel des obligations par la Fed et le repositionnement des pros qui avaient misé sur une hausse des taux.
D’autres croient que le marché obligataire flaire déjà la décélération prochaine de l’économie et de l’inflation ou se positionne en vue de l’éventuel retrait de l’assouplissement monétaire par la Fed qui modérera l’économie et l’inflation.
Pour couronner le tout, les banques centrales du Canada et de la Nouvelle-Zélande ont mis fin cette semaine aux rachats d’obligations qui injectaient des liquidités dans les marchés tandis que Bank of America a déjà compilé 25 hausses de taux par les banques centrales depuis le début de l’année, surtout dans les pays émergents.
Les titans de la techno: un refuge?
Le portrait contrasté invite à l’inaction avant la grande rentrée de septembre pour les pros qui «stationnent» pour l’instant leur capital dans les blue chips de la technologie. Les titans de la techno servent de refuge parce que la demande pour leurs services et leurs produits croît, que leur mode de fonctionnement est moins touché par les perturbations des chaînes d’approvisionnement et que leurs coffres débordent de liquidités.
Ces dernières semaines, on a aussi vu certains titres de la consommation de base, incluant les épiciers, et les fournisseurs d’électricité, trouver preneur en Bourse. C’est un autre moyen pour les investisseurs actifs d’ajouter une dose de prudence au portefeuille sans pour autant quitter le marché, en attendant que les perspectives s’éclaircissent.
Les logiciels plutôt que les puces
Dans l’intervalle, certains stratèges proposent des placements à leurs clients qu’ils jugent attrayants.
Le stratège quantitatif Martin Roberge recommande par exemple de préférer les fournisseurs de logiciels (IGV, 389,55 $US) aux fabricants de puces (SMH, 247,03$ US) à court terme. La déconfiture de plusieurs cryptomonnaies, qui a été amplifiée par des mesures de répression imposées par la Chine notamment, diminuera la demande pour les processeurs graphiques qui servent aux mineurs de crypto que fabriquent Nvidia (NVDA, 726,39 $US) et Advanced Micro Devices (AMD, 86,05$U$).
À court terme, Martin Roberge préfère les logiciels aux puces parce que la demande pour les processeurs des mineurs de cryptos pourrait diminuer avec les cryptomonnaies. (Canaccord Genuity)
De plus, le bond de 50% des dépenses en capital de la part des fabricants risque de transformer la pénurie actuelle de puces en un surplus plus tôt qu’on le croit. Le point d’inflexion pourrait survenir dès l’an prochain, entrevoit Martin Roberge.
Le retour au bureau risque aussi de réduire la demande pour les ordinateurs très en demande pendant le confinement. Déjà, les nouvelles commandes pour les composantes électroniques perdent de leur vigueur, explique-t-il.
Par contre, les perspectives pour la demande de logiciels sont plus favorables. Au premier trimestre, l’investissement des entreprises dans les logiciels a augmenté à un rythme annuel de 16%.
L’indicateur de niveau d’activité du secteur des services a récemment dépassé celui du secteur manufacturier. «Cela confirme le retour des services qui représentent les deux-tiers du PIB américain. En conséquence, les bénéfices des fournisseurs de logiciels devraient croître plus rapidement que l’ensemble du secteur de la technologie», conclut-il.
Trois thèmes industriels plus durables
Chez Morgan Stanley, l’équipe croit à un nouveau cycle de dépenses d’investissements par les entreprises, mais prévient que ce thème se transpose parfois difficilement en Bourse.
Plutôt que de recommander les sociétés d’ingénierie et de construction et les conglomérats industriels qui pourraient profiter d’un an ou deux de dépenses accrues, le stratège Adam Virgadamo choisit trois créneaux d’investissements qu’il juge plus durables: le rapatriement aux États-Unis de la fabrication pour sécuriser l’approvisionnement, l’automatisation et la numérisation des entreprises pour contrer la pénurie de main-d’œuvre et enfin la transition énergétique.
L’analyste industriel Josh Pokrzywinski estime que l’entreprise de génie électrique et d’automatisation Rockwell Automation (ROK, 293,92$ US) et le spécialiste des systèmes électriques et hydrauliques Eaton Corp. (152,74$ US) sont particulièrement bien positionnés pour bénéficier de ces tendances lourdes.
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Il n’y pas que la Bourse qui est en mode vacances. Ce blogue fera relâche quelques semaines. Bon été à tous!