BLOGUE INVITÉ. Un grand mouvement, nommé Grande Démission, s’est enclenché dans le monde du travail au Québec et ailleurs et représentera un défi de taille pour les entrepreneurs dans les mois et années à venir.
Le phénomène est appelé Grande Démission parce qu’un nombre important de travailleurs ont commencé à changer de cap ou considèrent le faire dans la prochaine année. Au Canada, la proportion de gens qui pensent à changer de job est de 42%, selon un sondage printanier du Centre canadien pour la mission de l’entreprise.
Les moins de 40 ans sont ceux qui ont le plus envie de bouger. La pandémie est à l’origine de ce mouvement parce qu’elle a amené plusieurs personnes à reconsidérer leurs priorités, alors que d’autres sont déçues de la manière dont elles ont été traitées pendant les mois difficiles.
Pour certains entrepreneurs, ces travailleurs désireux d’améliorer leur bien-être pourraient représenter une manne, alors que pour d’autres, les départs vont accentuer des difficultés. Il y a des régions au Québec où la rareté de la main-d’œuvre est déjà criante, alors si la Grande Démission s’en mêle, ce peut être au péril du fonctionnement même d’une entreprise. Dans Chaudière-Appalaches, le taux de chômage en juillet était à 3,4%, avec plus de 7500 emplois affichés. La région est suivie de près par la Capitale-Nationale et Lanaudière, où les taux de chômage sont respectivement de 4,1% et 4,2%. Les restaurateurs, notamment, ont beaucoup de mal à opérer et les fermetures temporaires ou les heures d’ouverture réduites sont fréquentes.
Le respect, le sens et la reconnaissance
La Grande Séduction va nécessairement devenir une stratégie à adopter pour qui veut continuer de faire des affaires et générer de la croissance. L’autre jour, un entrepreneur me disait: «oui, mais ça sert à quoi de déshabiller Jacques pour habiller Jean ?». Effectivement, les stratégies d’attraction se font souvent au détriment d’un autre employeur dans un contexte de rareté. Mais pas forcément. Car il y a des régions où les chômeurs sont encore nombreux: Montréal affiche un taux de chômage de 9,3%.
La difficulté, c’est de convaincre des travailleurs potentiels de s’installer dans une nouvelle région. Mais si on réussit à offrir un environnement de travail stable et axé sur le bien-être, tout autant qu’on est prêt à offrir de la formation pour requalifier des travailleurs, c’est une mission possible. D’autant que la vie en région gagne en attractivité à l’ère du télétravail et qu’il deviendra plus facile ainsi de permettre aux deux membres d’un couple d’y trouver leur compte.
Parallèlement, et peut-être surtout, il faut penser la Grande Séduction comme une stratégie de rétention. Les salaires, les horaires flexibles et le télétravail sont de bons avantages. Les tables de billard et les cocktails aident peut-être, mais ce qui importe davantage, c’est le respect, le sens donné à votre mission et votre reconnaissance.
Commençons par le sens. C’est justement l’impression de l’avoir perdu qui amène la démission. Alors comment pouvez-vous, comme leaders, communiquer du sens à travers la mission de votre entreprise ? À quoi contribuez-vous ? Et à quoi, votre employé contribue-t-il dans ses fonctions ? Il y a quelque chose qui se situe au-delà des tâches et qui peut être beaucoup plus mobilisant ; à vous de le mettre de l’avant.
Le respect, c’est élémentaire et pourtant il y a tant à faire pour le vivre au quotidien. Ça veut dire être poli, évidemment, mais c’est aussi écouter et tenir compte des limites. Quand votre équipe est à bout de souffle, est-ce le temps de multiplier les projets ?
Enfin, la reconnaissance, c’est plus que de souligner un bon coup d’équipe ou de célébrer des années de service. C’est offrir des possibilités à quelqu’un de se développer, c’est confier des responsabilités plus importantes à quelqu’un qui en souhaite. Être reconnu comme étant capable, c’est motivant. Encore faut-il confier des responsabilités qui soient en adéquation avec les facteurs de motivation de l’employé. Les connaissez-vous ?
Un dernier élément dans la Grande Séduction interne, et non le moindre : le travail d’équipe. Est-ce qu’il y a des frictions chez vous ? Sûrement ! Et celles-ci peuvent être assez irritantes pour donner l’envie d’aller voir ailleurs si l’herbe est plus verte. Quelles actions prenez-vous pour aider votre équipe à en être une ? Les cocktails et les tables de billard, c’est sympathique, mais si on veut être moins en compétition et plus en collaboration, elles ne vont pas faire de la magie. Outiller les employés pour mieux se connaître, mieux communiquer et mieux comprendre la réalité de chacun, c’est plus porteur.