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La leçon de 2000: exportateurs épargnés, investisseurs écorchés

François Normand|Publié le 03 novembre 2020

La leçon de 2000: exportateurs épargnés, investisseurs écorchés

Le président républicain George W. Bush et l'ancien vice-président démocrate Al Gore se sont livrés à une longue bataille juridique en Floride en novembre et en décembre 2000. (source: Getty Images)

Le passé n’est pas garant de l’avenir, mais il permet de mettre les choses en perspective. Aussi, si jamais le duel entre Donald Trump et Joe Biden se retrouve devant les tribunaux en raison d’un résultat serré ce mardi 3 novembre, les exportateurs canadiens ne devraient pas sentir l’onde de choc de cette crise, alors que les investisseurs, eux, pourraient en pâtir.

C’est la leçon que l’on peut tirer de l’élection présidentielle américaine du mardi 7 novembre 2000, alors que s’affrontaient le vice-président démocrate sortant, Al Gore, et le gouverneur républicain du Texas, George W. Bush.

Or, cette élection n’a été tranchée —par la Cour suprême des États-Unis— que plus d’un mois après le scrutin, à la mi-décembre.

En fait, tout s’est joué en Floride, où la course était très serrée. Les deux candidats devaient absolument remporter cet État pour rafler les 25 grands électeurs afin d’espérer gagner la course à la Maison-Blanche.

Mais puisque la marge entre les deux hommes était inférieure à 0,5% (0,009%, en faveur de Bush), les autorités ont ordonné un recomptage des machines à voter, rappelle dans une note David Ghezal, stratège en investissement chez Deutsche Bank.

Par contre, au terme d’une longue saga juridique et d’accusations de partisanerie (le gouverneur de la Floride à l’époque, Jeb Bush, était le frère de George Bush), la Cour suprême des États-Unis a suspendu ce recomptage manuel le 9 décembre.

Prenant acte de cette décision de la plus haute instance judiciaire du pays, le vice-président Gore a finalement concédé sa défaite le 13 décembre, soit cinq semaines après le jour des élections.

 

Huard stable et hausse des exportations

Les exportateurs canadiens n’ont pas vraiment senti cette crise politique, car la valeur du dollar canadien par rapport au billet vert n’a pratiquement pas bougé.

Entre le 1er novembre 2000 et le 1er janvier 2001, il s’est apprécié de 3% à 0,66 $US, pour ensuite amorcer une pente descendante durant quelques mois. Rien pour affecter la compétitivité des produits canadiens au sud de la frontière.

D’ailleurs, en novembre et en décembre 2000, les exportations canadiennes de marchandises y ont respectivement augmenté de 10% et de 12% comparativement aux mois correspondants en 1999, selon le United States Census Bureau.

Par contre, c’est une tout autre histoire pour les investisseurs canadiens qui étaient exposés au marché américain en 2000, comme on peut le voir sur ce graphique.

 

Car, entre le jour de l’élection du 7 novembre et le 15 décembre, l’indice phare de la Bourse américaine, le S&P500, a dégringolé de 8,4%, rapportait récemment le site MarketWatch.

Les marchés financiers n’aiment pas l’incertitude.

Aussi, un résultat serré ce mardi 3 novembre —suivi d’une contestation judiciaire— pourrait aussi faire dégringoler la Bourse, d’autant plus que s’il y a une contestation, elle pourrait être plus corsée qu’en 2000.

Pourquoi? Parce que la société américaine est plus divisée qu’en 2000 et qu’il y a une possibilité réelle que les deux camps ne reconnaissent pas la victoire de l’autre en cas d’un résultat serré.