La meilleure réponse qu’un fondateur puisse obtenir est NON!
Dominic Gagnon|Publié le 16 février 2023Photo: Kai Pilger pour Unsplash.com
BLOGUE INVITÉ. La réalité est qu’un grand nombre de start-ups échouent lentement, car la plupart des fondateurs continuent de chercher désespérément des « OUI »!
En tant qu’entrepreneur, j’ai toujours eu une relation amour/haine avec le mot « non ». Ayant été diagnostiqué avec un trouble de l’opposition élevé – disons que ce mot à toujours semblé vouloir dire « contrôle » ou « perte de liberté » pour moi. J’avais donc énormément de difficultés à accepter un non et un peu inconsciemment, j’évitais les risques de recevoir un non. Par conséquent, je focalisais mon énergie sur les opportunités où le oui était la réponse logique!
Pourtant, au fur et à mesure que j’ai acquis plus d’expérience, j’ai appris à aimer me faire dire « non » de plus en plus. En fait, j’ai même paradoxalement commencé à le chercher et cela s’est avéré très bénéfique!
En tant que fondateur, on se plaint souvent des « non » qu’on reçoit, de la banque pour un financement par exemple. Cependant, soyons sincères, on se fait tout de même très fréquemment dire oui. Oui, je vais écouter ton « pitch ». Oui, je vais essayer ton produit.
En toute transparence, si vous n’entendez pas « oui » au moins un peu, c’est que vous n’essayez pas assez fort. Ou vous essayez trop fort aux mauvais endroits. Ou votre idée est juste nulle.
En revanche, il est crucial que quelqu’un puisse vous dire ses vérités qui font mal. Et lorsque cela arrive, vous devez les écouter. Le succès commence par l’apprentissage. Et l’apprentissage commence par NON et pas par OUI!
Lorsque la peur du non nous empêche de voir clair
La semaine dernière, le fondateur d’une start-up que j’ai accompagnée dans un programme d’incubation est venu me voir avec un problème dont il n’arrivait pas à comprendre la source, même s’il le vivait depuis des mois. En fait, il avait lancé son produit un an auparavant et la réaction du marché était super positive. Il avait même le privilège que les prospects cognent à sa porte et qu’une fois que ceux-ci furent convertis en clients, ils semblaient être fidèle et il obtenait un excellent « NPS » (« Net Promoter Score » ou « pourcentage de recommandation par un client ») démontrant que son produit avait une grande valeur pour eux.
Aucun problème en vue vous me direz?
Vous avez raison, cet entrepreneur semble être sur une superbe lancée! En revanche, lorsqu’il m’a présenté les différents objectifs mesurables qu’il surveillait en tant qu’entrepreneur, cela donnait une montée puis une descente sur la majorité des mesures. Conversions, engagement, revenus et bénéfices – toutes ces mesures avaient connu des hauts et bas intenses au cours des six premiers mois, puis s’étaient stabilisées.
Les six mois suivants furent un casse-tête frustrant pour lui, car malgré le lancement de nouvelles fonctionnalités à profusion, de campagnes de marketing, d’un programme de remises et d’une foule d’autres initiatives dans le but de poursuivre sa croissance, rien ne bougeait réellement et sa croissance a rapidement stagné.
Presque immédiatement, j’ai compris l’une des raisons principales de cette stagnation. Son marché cible était très petit et ses clients actuels étaient majoritairement des petites entreprises qui gravitaient dans son réseau naturel. Quand je lui ai demandé pourquoi il n’attaquait pas des entreprises d’une plus grande ampleur ou moins directement reliées à son réseau, sa réponse fut simplement : « les grandes entreprises ne vont pas acheter mon produit. En fait, je ne pense même pas qu’ils vont vouloir nous rencontrer. »
Voilà son problème. Il cherchait à obtenir des OUI plutôt que d’accepter de tenter les NON!
Postuler à Harvard
Cela m’a fait penser à une discussion avec un ami entrepreneur, basé aux États-Unis, qui me mentionnait être dans la période des inscriptions universitaires pour ses jumelles.
Il me mentionnait à quel point, au travers de toute la paperasse, les délais et les rédactions de lettres de motivation, la chose sur laquelle il continuait de se disputer continuellement avec ses filles était de savoir s’ils devaient ajouter certaines universités d’élite aux différentes candidatures qu’il allait soumettre.
Lorsqu’on parle d’universités d’élite, on parle de celles dont l’entrée est extrêmement contingentée, et pas nécessairement qu’à Harvard, mais aussi à Princeton, Yale, Stanford et plusieurs autres.
Malgré la réticence de ses filles à vouloir ajouter ces universités à la liste, il me mentionnait qu’il souhaitait surtout qu’elles puissent choisir deux ou trois écoles d’élite dans leur domaine d’études respectifs et de tenter leur chance, simplement. Cependant, ses filles continuaient de dire qu’elles ne souhaitaient pas ajouter ces universités pour les raisons qu’on pourrait tous prévoir :
« Je ne vais jamais entrer. »
« Nous n’avons pas les moyens de nous permettre de fréquenter ces écoles. »
« Je ne suis pas au niveau pour entrer dans ses écoles. »
Et à chaque fois que ses filles lui sortaient une nouvelle raison, qui, au fond, avait bien du sens, celui-ci répondait simplement : « Laissez-les vous dire cela ».
En soi, pour lui, il n’y avait aucune logique de ne pas au moins tenter l’expérience. Quel était le risque? Celui de se faire dire que nous ne sommes pas à la hauteur pour leur université? Si c’est le cas, le résultat sera le même que de ne pas avoir essayé, à part peut-être avoir un peu mal à l’égo.
Remontez la barre!
En fait, accepter de se faire dire non, c’est aussi de viser plus haut, être plus ambitieux. Si on vise toujours plus bas ou si on ne prend généralement pas de risque, nos chances d’obtenir des oui sont nettement augmentées. Mais cela ne profite à personne. Au contraire, cela draine tout le monde vers le bas, bien que ce soit plus agréable d’obtenir un oui qu’un non! Comme je l’indiquais dans mon précédent billet de blogue qui parlait de l’importance de savoir reconnaître sa valeur, si aucun client ne vous négocie jamais, vous vous dites peut-être que c’est merveilleux. Mais la réponse est probablement que vos prix sont trop bas!
Lorsque j’ai mentionné au fondateur de la start-up qui ne comprenait pas pourquoi son entreprise stagnait qu’il devait viser plus haut, j’ai été surpris de constater à quel point sa peur du refus l’empêchait d’avancer!
Sa réponse était que non seulement il avait raison de supposer qu’il ne vendrait jamais à ces grandes entreprises, mais que « les laisser lui dire non » n’était même pas une option possible. Pour moi, c’était peine perdue. Je lui ai donc dit que selon moi, OUI, il allait directement dans le mur.
Toujours planifier en fonction d’un non
Lorsque vous tenter de percer sur un marché où vous n’avez aucune connexion et pas de connaissances approfondies, vous devez arrêter d’attendre un « oui » et vous préparez à recevoir plusieurs « non », car le « non » est généralement votre meilleur résultat possible.
Avant de commencer, définissez à quoi ressemble le « non », si et comment vous le percevrez, et ce que cela signifie quand vous l’entendez ou ne l’entendez pas.
Créez des niveaux de difficulté – difficile à atteindre, plus difficile à atteindre, impossible à atteindre. Trouvez où se trouve votre limite et supposez pourquoi votre portée s’arrête là.
Regardez votre produit avec un nouvel œil. Au lieu d’être convaincu que votre argumentaire échouera à un certain niveau, créez une version qui, selon vous, réussira et aspirez à cela.
Si le résultat un rejet réel, et s’il est accompagné d’un raisonnement quelconque, accrochez-vous à cette piste comme de l’or et creusez aussi profondément que possible pour comprendre pourquoi vous obtenez ce « non ».
Si mon exemple de candidature à l’université a un défaut, c’est que vous n’avez généralement qu’une seule chance de postuler à l’université. En affaires, vous avez toujours une autre chance de réussir sur un marché plus vaste et plus lucratif.
La seule chose qui vous arrêtera, c’est lorsque vous aurez trop peur de vous lancer ou d’obtenir un non!