La quête de Kim Pariseau, l’architecte des chalets Beside
Diane Bérard|Mis à jour le 11 juillet 2024Kim Pariseau, architecte et entrepreneure. Membre de la cohorte 2019 du Parcours développement durable
«Je ne veux pas agir comme police. Je n’ai aucune envie d’envoyer un appel d’offres tout fait aux entrepreneurs en construction et dire: «Voici ce que vous devez exécuter». Je désire les inclure dans la réflexion. Qu’on trouve ensemble comment réaliser le projet le plus pertinent pour le client, mais aussi pour l’environnement et pour la communauté. Les architectes sont doués pour créer le beau. Mais on n’est pas doué pour éduquer. Or, comme donneur d’ordre, on a une influence sur une foule d’organisations. Il faut qu’on s’en serve.» Kim Pariseau, architecte et fondatrice d’Appareil architecture
En janvier 2019, Appareil architecture, s’est distinguée deux fois aux Grands Prix du Design. La chaise Floe a remporté les honneurs dans la catégorie «Mobilier résidentiel, commercial et intégré». L’aménagement du café boutique Pastel Rita, dans le Mile-End, dans la catégorie «Aménagement petit budget.»
Au printemps 2019, Appareil architecture a décroché le mandat des chalets Beside. Un projet ambitieux pour «pionniers modernes». Dans la région de de Lanaudière, sur un terrain deux fois la taille de Central Park, seront bâties 75 habitations. Lanaudière n’est que le début. Beside vise une dizaine de sites dans le monde. C’est un projet piloté, entre autres, par Jean-Daniel Petit, le fondateur du fabricant de canots et kayaks abitibi & co. Des embarcations qui ont la particularité d’être fabriquées à la main. abtibi&co a aussi lancé le magazine et le site Beside.
Depuis sa fondation, en 2010, Appareil architecture a remporté de nombreux prix, dont le titre «Emerging talent », du magazine Canadian Architect. Mais, ce ne sont pas ses réalisations qui me poussent à écrire sur Kim. C’est sa quête des deux dernières années. Et la détermination avec elle la poursuit. Je vous la partage, car je crois que cette quête interpellera plusieurs entrepreneurs qui, comme Kim, rêvent d’une vie plus grande.
Novembre 2016
Kim accouche de jumeaux. «Après six ans en affaires, j’en ai profité pour réfléchir à l’avenir de l’entreprise. Je réalise que ce n’est pas que le futur de ma firme qui m’intéresse. C’est celui de l’architecture en général. À quoi servons-nous? Quelle est notre contribution? On réalise des projets qui font rayonner le Québec, c’est important. Que peut-on faire de plus?» À l’époque, sa réflexion porte surtout sur une architecture plus durable.
Février 2019
Kim s’inscrit au cours «Leadership et impact social», donne à l’école de créativité la Factry, par Credo. Elle lit le best-seller « Reinventing organizations, vers de communauté de travail inspirées », de Frédéric Laloux, et découvre les organisations opales. Celles-ci reposent sur trois piliers. L’évolution, on recherche moins à prévoir l’avenir qu’à accueillir ce qu’on est amené à devenir pour bien fonctionner. La plénitude, on réconcilie son identité professionnelle à son identité extraprofessionnelle pour accueillir chacun dans son intégralité, à l’intérieur d’un espace de travail protecteur et bienveillant. L’auto-gouvernance, chaque collaborateur jouit d’un maximum d’autonomie pour se réaliser et contribuer.
Au séminaire «Leadership et impact social», Kim découvre des entrepreneurs sociaux comme Marie-Josée Richer, cofondatrice de Prana et juge à l’émission «Dans l’œil du dragon». Marie-Josée partage à la cohorte sa conviction qu’une entreprise doit conjuguer retombées financières, environnementales et sociétales.
«Je n’avais jamais réfléchi ainsi, confie Kim. J’ignorais qu’un entrepreneur pouvait penser et agir comme Marie-Josée. Et je n’avais aucune idée qu’il existait des organisations opales, comme celles que Frédéric Laloux décrit dans son livre.» Elle poursuit, «Je me dirigeais vers une entreprise verte. Ma contribution, c’était ça. Ça me paraissait logique, compte tenu de ma profession. Je n’ai jamais pensé à l’aspect humain. Pourtant, l’organisation la plus verte du Québec peut très bien faire travailler ses employés 50 heures par semaine dans des conditions nulles… J’ai commencé à me demander: qu’est-ce qui serait le plus intéressant pour les employés? Et les fournisseurs? Ça ne peut pas juste être à propos de moi. Il faut que tout le monde rayonne.»
L’entrepreneur qui revient gonflé à bloc d’une formation est une boîte à surprises. On ignore ce qu’il fera de LA vérité qu’il vient de découvrir. Kim en est consciente. «J’essaie de ne rien imposer. Avec les employés et les partenaires, on se rencontre, on discute. On essaie de nouvelles approches. On réfléchit à un nouveau modèle d’affaires.»
Et ça se poursuit.
Printemps 2019
Kim soumet sa candidature au Parcours développement durable de la ville de Montréal. Ce programme offre à vingt entreprises une démarche d’accompagnement d’un an, afin de leur permettre de trouver des solutions innovantes et d’implanter des modèles d’affaires durables et inspirants, apportant de la valeur à l’ensemble de la société.
Kim a été sélectionnée. Elle est membre de la cohorte 2019, avec d’autres entrepreneurs comme Judith Fetzner, de Cook It, Laurence Vincent, de Prével, Dominique Tremblay, de Tux, et Manon Boisvert, de Delagatus.
Le coach attribué à Kim par le Parcours de développement durable organisera, entre autres, quatre sessions avec les 12 employés d’Appareil Architecture, pour réfléchir à la plus-value que l’entreprise peut offrir à ses clients et ses fournisseurs.
«Une entreprise spécialisée dans le logement collectif vient de m’approcher. Je n’ai jamais imaginé travailler avec ce secteur. Un nouvel univers s’ouvre à moi. Je réalise qu’en raffinant ma réflexion et en clarifiant mes intentions, ça attire les entreprises avec qui je souhaite travailler. C’est vrai pour les clients et pour les partenaires. Les firmes de construction embarquent dans notre philosophie de collaboration. Elles se sentent valorisées. D’ailleurs, j’avais nommé ma firme Appareil pour appareillage, un ensemble d’appareils destinés à un but précis.»
Le mot de la fin
Elle prend une pause. Notre conversation se termine sur la réflexion suivante, «Pendant mon congé de maternité, j’ai réalisé qu’il en faudrait peu pour que je fasse un burn-out. Je pouvais toujours accepter un mandat de plus. Mais était-ce nécessaire? Et si je ciblais au lieu de tout accepter? Et si je travaillais avec des entreprises qui réfléchissent autrement? Avec des gens meilleurs que moi. Avec des clients exemplaires. J’ai envie de prendre le temps. De me poser les bonnes questions au bon moment au lieu de corriger le tir après.»