(Photo: Christina Wocintechchat pour Unsplash)
PHILANTHROPIE. La riposte philanthropique, un tableau de bord en ligne lancé au début de la pandémie, visait à recenser les projets mis en oeuvre pour déceler les lacunes et les occasions de collaboration dans l’écosystème philanthropique canadien. Si l’outil a été un franc succès, il est aujourd’hui délaissé par le milieu. Ses créateurs prévoient déjà leur contre-attaque: une stratégie concernant les données probantes.
En mars 2020, la riposte philanthropique a été mise sur pied conjointement par Fondations philanthropiques Canada, Fondations communautaires du Canada, Financeurs en environnement au Canada et The Circle on Philanthropy and Aboriginal Peoples in Canada.
L’idée était plutôt simple. Sur une base volontaire, les fondations canadiennes étaient invitées à remplir un questionnaire concernant les types de mesures prises par les organismes philanthropiques et autres organismes subventionnaires du pays en réponse à la pandémie. Ces données étaient ensuite compilées et publiées sous forme de tableau de bord sur le site de l’initiative.
En juin dernier, par exemple, 50 bailleurs de fonds avaient répondu à ces questions. Cela a permis de savoir que 99,5 millions de dollars de dons avaient été accordés et que 82 % des répondants avaient accordé une aide financière sans restrictions.
Quelque 34 % avaient également modifié leurs procédures et délais en matière de rapports, une approche inspirée de la philanthropie basée sur la confiance.
La riposte philanthropique a aussi permis de savoir que 68 % des bailleurs de fonds finançaient les services sociaux, que 62 % d’entre eux finançaient le domaine de la santé et que 36 % finançaient le logement et l’hébergement. Peut-être plus important encore, elle a permis de connaître qui, précisément, voulait collaborer sur quel type de projet, dans quelles provinces, et à hauteur de quel montant.
Des leçons à tirer
Au début de la crise, les gens ont beaucoup utilisé l’outil pour réseauter les uns avec les autres, explique Jean-Marc Mangin, PDG de Fondations philanthropiques Canada. «Ça répondait à un besoin criant», confirme-t-il.
Ses créateurs espéraient donc naturellement que la riposte arrive à soutenir l’intérêt du milieu de sorte à devenir un outil plus permanent. Depuis la fin de 2020, cependant, le site enregistre beaucoup moins de trafic. Ils veulent maintenant comprendre pourquoi le milieu s’en est détourné. «On est entré en phase de réflexion, dit Jean-Marc Mangin. On fera notre examen de conscience cette année.»
Au bout du compte — la démarche de réflexion est à peine entamée —, cet examen devrait aboutir au lancement d’une stratégie sur les données probantes plus tard cette année. La riposte philanthropique servira d’étude de cas pour ce nouveau projet.
Manque de ressources
Le défi des données, en philanthropie, n’est pas tellement leur rareté. Jean-Marc Mangin assure que Statistique Canada, l’Agence du revenu du Canada, les fondations de même que plusieurs organismes en compilent beaucoup. Le défi est plutôt de les rendre accessibles dans un endroit central, de leur fournir de la visibilité et de s’assurer qu’elles sont faciles à utiliser.
«Ça va prendre un effort de coordination central, dit Jean-Marc Mangin. Avec la riposte philanthropique, on était dépendant des fondations, qui devaient elles-mêmes entrer leurs données. Sauf que beaucoup d’entre elles n’ont pas les ressources et ni les capacités en interne pour le faire.»
Serait-il possible, par exemple, d’extraire les données de l’Agence du revenu du Canada et de Statistique Canada pour ensuite les assembler, les organiser et les mettre en ligne sur un site plus dynamique que celui de la riposte philanthropique? C’est le genre d’avenue qu’explorent les créateurs de cette dernière.
À partir de là, il faudra déterminer les coûts liés à la mise en oeuvre de ce nouveau projet, mais aussi à son maintien et à sa mise à jour régulière, explique Jean-Marc Mangin. Il a bon espoir que le projet donnera un coup de pouce au secteur.
«L’accès aux données sur les activités des autres acteurs du milieu, c’est une lacune importante de l’écosystème actuel, note-t-il. Pourtant, elles sont essentielles:pour collaborer, il faut savoir qui fait quoi, et où. S’il reste du travail à faire, une initiative élargie semblable à celle de la riposte nous permettra d’accomplir davantage, ensemble.»