La vente du Carrefour de l’Estrie s’invite dans le top 5
Claudine Hébert|Édition de la mi‑novembre 2019Groupe Mach souhaite transformer le Carrefour de l’Estrie en un nouveau quartier multiusage. (Photo: courtoisie)
LES GRANDS DE L’IMMOBILIER. À l’ère d’Amazon, les centres d’achat ne constituent pas la «saveur du mois» auprès des grands investisseurs immobiliers, concède d’emblée Vincent Chiara, président du Groupe Mach. Pourtant, son entreprise a versé 236 millions de dollars au printemps dernier afin de se porter acquéreur du Carrefour de l’Estrie, à Sherbrooke.
Le changement de propriétaire de cette place commerciale, qui était la propriété à parts égales d’Ivanhoé Cambridge et de l’Office d’investissement du fonds du régime de pensions du Canada (OIRPC), représente la quatrième plus importante transaction immobilière commerciale de notre classement 2019 Les Affaires-JLR Solutions foncières. C’est également la seule du top 10 qui a eu lieu à l’extérieur de l’île de Montréal.
Pourquoi le Groupe Mach a-t-il choisi d’aller contre la tendance ? «Le commerce de détail, plus précisément les centres commerciaux fermés, a un avenir en région», croit M. Chiara. Le bâtiment d’une superficie de 1,2 million de pieds carrés est unique dans le grand Sherbrooke et ses environs. Il abrite entre autres les bannières L’entrepôt Rona, Simons, Super C, Best Buy et Sports Experts. «Situé en bordure de l’autoroute 410, le Carrefour de l’Estrie a été fréquenté par plus sept millions de visiteurs en 2018. Il évolue dans un marché captif de plus de 400 000 consommateurs», indique l’investisseur. M. Chiara se dit d’ailleurs très satisfait du coût de la transaction. Juste avant l’achat, la valeur du Carrefour de l’Estrie était estimée à plus de 335 M $, selon l’évaluation municipale.
Ce n’est d’ailleurs pas le seul centre commercial dont le Groupe Mach s’est porté acquéreur au cours de la dernière année. L’entreprise
montréalaise est également devenue propriétaire du Faubourg de l’Île, à Pincourt – qui a récemment perdu la bannière Walmart – et du Cornwall Square Mall, à Cornwall, en Ontario. Les centres d’achat fermés correspondent désormais à plus de 25 % du portefeuille immobilier du Groupe Mach, qui cumule plus de 30 millions de pieds carrés.
Un investisseur qui aime le goût du risque
Pour plusieurs experts, notamment Sylvain Leclair, du Groupe Altus, l’investissement du Groupe Mach est audacieux. «Il s’inscrit néanmoins dans la nouvelle tendance de ces investisseurs qui prennent le pari de vouloir repositionner les centres commerciaux à l’ère du commerce en ligne», souligne M. Leclair. «Les gestionnaires de centres commerciaux nord-américains ont fortement été touchés avec les faillites de Sears, de K-Mart et de JC Penney. Plus particulièrement ceux qui avaient ces trois bannières sous leur toit, concède le président du Groupe Mach. Le Carrefour de l’Estrie avait d’ailleurs une bannière Sears, mais nous avons déjà des plans pour combler cette perte.»
Son entreprise souhaite en effet transformer le Carrefour de l’Estrie en un nouveau quartier multiusage à la fois résidentiel et commercial, le tout bonifié par des activités de divertissement. «Les centres commerciaux traditionnels doivent s’adapter aux nouvelles réalités ; ils doivent devenir des milieux de vie où ça bouge à toute heure du jour», soutient M. Chiara.
L’investisseur compte justement injecter plusieurs dizaines de millions de dollars dans le repositionnement du Carrefour de l’Estrie. Il maintient qu’il y a encore plus de 700 000 pieds carrés d’espace vacants pour de futurs développements.
«C’est une très bonne nouvelle pour l’urbanisme commercial de Sherbrooke», commente Charles-Olivier Mercier, directeur général de Commerce Sherbrooke. Cette transaction, ajoute-t-il, a un large potentiel de développement, de diversification et de densification sur l’un des plus grands terrains commerciaux de la ville.