Les neuf constructeurs plus traditionnels ont maintenant une capitalisation boursière combinée de 590 G$ US, soit une baisse 25% depuis l’an dernier. (Photo: 123RF)
Il y a un an, dans cette même chronique, j’ai mis en garde les investisseurs intéressés par les constructeurs de véhicules électriques. Douze mois plus tard, le constat est brutal. La valorisation de Tesla (TSLA, 182,86 $ US), Rivian (RIVN, 29,53 $ US) et Lucid (LCID, 10,02 $ US), qui totalisait plus de 1300 milliards de dollars américains (G$ US ), est maintenant de 570 G$, une baisse de plus de 55%. Évidemment, les marchés boursiers ont aussi baissé sur cette même période, le S&P500 corrigeant d’environ 15%.
Par comparaison, les neuf constructeurs plus traditionnels que sont Toyota (TM, 148,27 $ US), Volskwagen (VOW, 183,05 €), GM (GM, 40,46 $ US), Ford (F, 14,08 $ US), BMW (BMW, 83,96 €), Stellantis (STLA, 15,21 $ US), Honda (HMC, 24,43 $ US), Hyundai (HYMTF, 30,51 $ US) et Nissan (NSANY, 7,28 $ US) ont maintenant une capitalisation boursière combinée de 590 G$ US, soit une baisse 25% depuis l’an dernier.
À l’évidence, le secteur des véhicules électriques a été touché plus durement, mais les constructeurs traditionnels ont aussi souffert d’une pénurie de composants qui a radicalement réduit leur capacité de production.
Dur retour à la réalité
Pourquoi plusieurs investisseurs sont-ils encore surpris? Le processus menant à l’euphorie est souvent prévisible. Le phénomène commence par quelques entreprises innovantes, suivi par une panoplie d’articles dans les médias et une première augmentation rapide des valorisations, dont profitent souvent les initiés et les investisseurs institutionnels. S’ensuit une multiplication de produits financiers pour faciliter l’accès à ces nouveaux secteurs du marché boursier au grand public. Que ce soit des fonds communs de placement, des fonds négociés en Bourse ou des produits structurés qui ciblent ces secteurs en vogue.
Les équipes de marketing des institutions financières font la promotion agressive de ces produits tant auprès des investisseurs institutionnels que des particuliers en mettant de l’avant les rendements exceptionnels récents et le potentiel de croissance du secteur. Les présentations sont attrayantes et la peur de manquer un coup de circuit hypnotise plusieurs investisseurs. L’apport massif de nouveaux capitaux dans un nombre limité d’entreprises fait augmenter les valorisations boursières dans l’espoir d’une croissance exponentielle. Après, c’est souvent le dur retour à la réalité. Les prévisions optimistes ne se réalisent pas, la compétition s’intensifie et les valorisations retombent.
D’autres secteurs « à la mode »
Outre les véhicules électriques, les investisseurs canadiens ont été obnubilés par au moins deux autres secteurs d’investissement au cours des dernières années. Le marché du cannabis et des cryptomonnaies. Dans les deux cas, la majorité des investisseurs a perdu beaucoup d’argent.
Le lancement de nouveaux FNB correspond généralement à une période de grande popularité d’un secteur. La performance depuis leur création est donc un bon indicateur du rendement de bon nombre d’investisseurs dans ces secteurs. Dans le cas du cannabis, le FNB Horizons Marijuana Life Sciences (HMMJ) a perdu 12,58 % par année depuis son lancement, en avril 2017. Dans le secteur des cryptomonnaies, le premier FNB a été le Purpose Bitcoin ETF (BTCC.B, 3,21$). Le rendement de ce FNB depuis son lancement, en mars 2021, a été de -42% sur une base annualisée. Des chiffres qui parlent d’eux-mêmes.
Depuis quelque temps, on entend de plus en plus parler d’intelligence artificielle (IA). Est-ce que ce sera la provenance de la prochaine bulle boursière sectorielle? De toute évidence, le premier FNB dans ce secteur n’a pas été un succès. Le FNB Horizons actif I.A. actions mondiales a été lancé en octobre 2017 et dissous en mars 2022. Il sera intéressant de voir ce que nous réserve ce secteur à l’avenir. Toutefois, l’impact de l’IA affectera plusieurs secteurs et sera plus difficile à évaluer de façon isolée. D’ailleurs, les retards de Tesla dans le développement des voitures pleinement autonomes, qui requièrent des développements majeurs en IA, expliquent en partie la correction boursière de Tesla de la dernière année.
À long terme, il est préférable d’éviter les secteurs à la mode et de maintenir une exposition aux grands indices de marchés qui sont déjà diversifiés dans plusieurs secteurs. C’est encore plus avantageux lorsqu’on combine des indices boursiers de plusieurs pays, puisque ce ne sont souvent pas les mêmes secteurs qui dominent dans les différents indices. Par exemple, le Canada, dominé par les secteurs de la finance et de l’énergie, est un bon complément à une exposition au marché américain, qui est dominé par les technologies et les soins de santé.
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La malédiction du marché canadien est bien en vie
En mai 2020, Shopify (SHOP, 49,31 $) est devenue l’entreprise avec la plus grande capitalisation boursière au Canada, dépassant la Banque Royale (RY, 100,90 $). Au cours des 30 dernières années, toutes les entreprises qui ont dépassé la capitalisation boursière de la RBC ont connu des embûches spectaculaires. Que ce soit Nortel (faillite), Valeant Pharmaceuticals International (maintenant Bausch Health Companies (BHC, 9,20$)) ou Research in Motion (maintenant BlackBerry(BB, 6,47 $)), tous ont subi une baisse de leur valorisation de plus 97% par rapport à leur sommet historique. Shopify allait-elle échapper à cette malédiction?
Roulement de tambour! La capitalisation boursière de Shopify a culminé à plus de 200 G$ en novembre 2021. Depuis, son cours est passé d’un sommet de 222,87 $ à un creux de 33$ et maintenant à 49$. Une baisse de 85% du sommet au creux. Le titre est encore un peu loin du niveau de correction des autres ex-vedettes du TSX et n’atteindra peut-être jamais le même creux, mais la situation ne peut laisser indifférente. Encore une fois, les investisseurs se sont emballés et ont accordé une valorisation démesurée à une entreprise canadienne. Malédiction 4, rationalité 0.