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Le ­CELI d’Evans ­Lafleur-Turnier: différer la gratification

Jean Décary|Mis à jour le 13 juin 2024

Le ­CELI d’Evans ­Lafleur-Turnier: différer la gratification

Âgé de 34 ans, l’opérateur de machinerie espère, grâce aux FNB et aux titres individuels, prendre sa retraite d’ici une quinzaine d’années. (Photo: courtoisie)

PLEINS FEUX SUR MON CELI est une rubrique où des investisseurs individuels partagent avec nous leurs bons et mauvais coups en investissement tout en soumettant leur portefeuille à l’analyse d’un pro. Pour participer, écrivez-nous à denis.lalonde@groupecontex.ca.


(Illustration: Camille Charbonneau)

 

Après avoir vendu sa maison, ce Montréalais de 34 ans a déménagé ses pénates à Saint-Basile-le-Grand afin de se rapprocher de son travail. Il est depuis presque dix ans opérateur de machinerie pour un fabricant de bouteilles de vitre. « J’ai fait une attestation d’études collégiales en transformation des aliments sans trop de conviction. La vie m’a amené ailleurs et j’en suis très heureux. »

Il aime son travail et son salaire, lequel lui permet de maximiser annuellement ses cotisations au CELI. « Nous arrivons ma conjointe et moi à mettre de côté environ 1500 $ chaque mois. » Il ne sait pas si ses bonnes habitudes d’épargne lui viennent de ses parents, mais il reconnaît que ces derniers, arrivés au pays en provenance d’Haïti dans les années 1970, ont tout fait pour que leurs enfants ne manquent de rien. « Mon père m’a appris les vertus du “délai de gratification”. Il mettait graduellement de l’argent dans un pot. Arrivés au terme de l’expérience, nous avions pu nous acheter une Xbox. »

Les enseignements paternels disparaissent toutefois rapidement quand il se procure une première carte de crédit et cède à la tentation des achats impulsifs. « J’étais insouciant, j’ai utilisé tout le crédit sans payer le solde dû… jusqu’à que les agences de recouvrement se mettent à mes trousses. » C’est la rencontre de sa conjointe qui le remet sur le droit chemin. « On a loué un petit appartement pour une bouchée de pain et on s’est mis à économiser. »

Après avoir acheté une maison et trouvé un emploi stable, il cherche à faire fructifier ses dollars qui languissent dans un compte d’épargne. « J’avais vu que le titre de Boeing (BA, 169,62 $ US) avait été malmené en Bourse et j’ai cherché à savoir comment je pouvais en devenir actionnaire. » Il ouvre un compte de courtage et achète pour 47 000 $ d’actions du transporteur aérien. « C’était ma première grosse erreur. Je croyais que le titre ne pouvait que remonter. » Après quelques semaines de volatilité, il panique et vend, mais parvient à sauver sa mise.

L’expérience ne le refroidit pas et, avec la même somme, il tente sa chance cette fois avec Tesla (TSLA, 168,69 $ US). « J’ai encore une fois paniqué et vendu kif-kif. Je sais que si j’avais conservé ces actions depuis 2019, j’aurais très bien fait. »

Jamais deux sans trois, il fait le même coup spéculatif avec le transporteur aérien Delta Air Lines (DAL, 46,74 $ US), avant de finalement tout vendre (avec un petit profit) et de revoir sa stratégie. « Je me suis finalement éduqué par la lecture. J’ai compris l’importance de la diversification et l’utilité de produits comme les FNB pour y parvenir. »

Il dit aujourd’hui s’être arrêté sur un style de gestion passive. « J’en ai aussi appris sur ma tolérance au risque, même si cela ne m’a jamais empêché de dormir. » Il a cependant tenu à garder sa position dans Amazon (AMZN, 187,52 $ US). « J’aime leur position dominante dans le commerce en ligne et dans les services infonuagiques. » Il est un adepte du mouvement Fire (Financial Independence, Retire Early) et dit investir à très long terme. Il aimerait que son CELI l’aide, avec ses autres placements, à prendre sa retraite d’ici une quinzaine d’années.

Dans l’œil du pro

Gestionnaire de portefeuille au groupe Onyx, à IA gestion privée de patrimoine, Simon Houle félicite l’investisseur et aussi ses parents qui lui ont transmis de saines habitudes d’épargne. « Ce n’est pas évident d’acquérir une base en finance personnelle. Pour certains chanceux, ça commence à la maison. »

Il a appris ce qu’il qualifie de règle d’or, soit le bienfait énorme du délai de la gratification. « Ça renvoie au concept de se payer d’abord qui, à terme, offre plus de liberté et de plaisir dans la vie. Cela me rappelle le livre de Scott Peck, Le chemin le moins fréquenté, dans lequel il mentionne que “c’est la seule façon décente de vivre”. »

Après quelques essais et erreurs, le gestionnaire observe qu’il a appris une deuxième règle d’or, celle de la diversification. « Cela permet de réduire le risque spécifique non systématique. » Une stratégie passive est selon lui une excellente façon d’optimiser la diversification et de réduire les coûts liés à l’investissement. « Mais il ne faut pas oublier l’aspect rééquilibrage. »

Il remarque que la pondération allouée au marché américain (plus de 75 %) est très importante. Il suggère de prioriser le REER pour celle-ci, ce qui permet d’éviter la retenue à la source de 15 % sur les versements de dividendes de source américaine dans le CELI. Il note aussi des dédoublements. « Deux fonds négociés en Bourse (FNB) dupliquent l’indice du S&P 500 et deux autres celui du NASDAQ 100. » Il fait remarquer que six FNB ont presque le même top 10 de principaux titres. « Il faut prendre l’habitude d’étudier le contenu des FNB avant d’investir et déterminer en amont la répartition d’actifs recherchée. »

La sélection de ses FNB pour la gestion passive devrait respecter les critères suivants : liquidité élevée, frais minimes et représentation fidèle des indices choisis. « J’observe que le poids accordé au secteur de la technologie (environ 26 %) est important. C’est un secteur très volatil et sensible aux variations des taux d’intérêt. »