Sur la Côte-Nord, le chemin de fer de la Société du port ferroviaire de Baie-Comeau est vue comme une « extension logistique » des industries de la région. (Photo: SOPOR)
TRANSPORT ET LOGISTIQUE. Les chemins de fer d’intérêt local (CFIL), des tronçons secondaires connectés aux réseaux des grandes entreprises ferroviaires, peuvent être une solution logistique intéressante dans plusieurs contextes d’affaires. En dépit de leur nom, ils n’ont pas qu’un intérêt régional pour les entreprises qu’ils desservent.
«Notre plus grand compétiteur, c’est le camionnage. Ce qui va faire pencher le client pour un mode de transport ou pour l’autre, c’est le coût. S’il veut développer son marché à l’autre bout du Canada, à des milliers de kilomètres, c’est clair que le train devient vraiment intéressant», affirme Christian Richard, vice-président du développement des affaires chez Genesee & Wyoming Canada. Cette entreprise est propriétaire de neuf chemins de fer au Canada, majoritairement dans l’est du pays. Deux passent au Québec : le Québec-Gatineau, dont le nom décrit le tracé, et le Saint-Laurent et Atlantique (SL&A), qui s’étend de Sainte-Rosalie, près de Saint-Hyacinthe, à Auburn, dans le Maine.
Souvent, les CFIL sont des tronçons ayant été vendus par les grandes entreprises ferroviaires, qui ne les jugeaient pas assez rentables. Comme ce sont de plus petites sociétés, les CFIL sont fréquemment prêtes à faire preuve de plus de flexibilité pour accommoder les demandes de leurs clients.
«Nous voulons survivre et continuer de desservir nos régions, alors nous travaillons étroitement avec les entreprises – peut-être plus que les grands joueurs – pour trouver des solutions à leurs défis et enjeux de transport», explique M. Richard. Ce qui peut signifier de concevoir des façons de charger les produits de leurs clients en déterminant le bon site intermodal, ou encore d’étudier la possibilité de connecter leurs installations au réseau ferroviaire en y construisant une voie ferrée.
Plusieurs usines ou sites opérés par des entreprises du domaine des pâtes et papiers, par exemple, sont connectés directement au chemin de fer SL&A. Les wagons se rendent donc directement dans la cour du client. «Certaines entreprises se sont d’ailleurs connectées récemment à notre réseau, dit M. Richard. D’autres nous font des demandes. Parfois, c’est nous qui investissons, et parfois ce sont les clients.»
Porte d’entrée sur l’Amérique
Près de 20 % des marchandises transportées par rail au Canada, soit plus de 113 millions de tonnes par année, débutent ou terminent leur parcours sur des CFIL, calculait l’Association des chemins de fer du Canada en 2016. Et les chargements qui y défilent sont très diversifiés. Il peut s’agir de produits agricoles ou issus de la foresterie, de pièces de voiture, de minerais ou encore de conteneurs, bien que, règle générale, le transport de ces derniers est plus souvent concentré dans les corridors comportant une forte activité portuaire.
Les chemins de fer d’intérêt local n’ont toutefois pas qu’un intérêt régional pour les entreprises qu’ils desservent. Sur la Côte-Nord, par exemple, le chemin de fer de la Société du port ferroviaire de Baie-Comeau (SOPOR) est une «extension logistique» des industries de la région, car il leur permet de livrer leurs marchandises jusqu’au Mexique, ou d’en recevoir de partout en Amérique du Nord, détaille Cédric Bérubé, directeur général de la SOPOR.
Ce chemin de fer, qui ne parcoure que Baie-Comeau, est un cas très particulier, puisqu’il se connecte au reste du réseau ferroviaire nord-américain au moyen d’un traversier-rail, le Georges-Alexandre-Lebel. Le navire d’une capacité de 26 wagons fait l’aller-retour entre Matane et Baie-Comeau de sept à huit fois par semaine.
«Le traversier-rail a permis aux entreprises de notre région d’avoir accès au réseau ferroviaire, avec tous les avantages que cela comporte», dit M. Bérubé. Entre autres la capacité de transporter un plus grand volume ou des équipements hors normes, et ce, sans se soucier des périodes de gel ou de dégel qui affectent le camionnage.
La SOPOR a terminé la construction de son centre de transbordement en 2008. Ce dernier constitue un atout en matière de flexibilité, car il permet aux entreprises des villes à proximité de venir y charger et décharger leurs marchandises. «Nous desservons par exemple l’Aluminerie Alouette, de Sept-Îles, et Arbec, de Port-Cartier», illustre M. Bérubé en soulignant que cette installation pourrait aussi être utile pour les entreprises actives bien plus au nord.
«La future route 389, qui monte vers Fermont, passera juste à côté de notre centre de transbordement, dit-il. Ce sera donc une belle occasion pour recevoir des marchandises en train, à partir des États-Unis, par exemple, pour faire ensuite le reste du chemin en camion.»
Une belle occasion de réduire également les émissions de gaz à effet de serre (GES) : pour transporter 1 000 tonnes de fret sur 1 000 kilomètres, le fret routier émet 48,9 tonnes de CO2, tandis que le transport sur rail n’en émet que 16,2 tonnes, selon le Conference Board du Canada.
Souvent, les CFIL sont des tronçons ayant été vendus par les grandes entreprises ferroviaires, qui ne les jugeaient pas assez rentables. Comme ce sont de plus petites sociétés, les CFIL sont fréquemment prêtes à faire preuve de plus de flexibilité pour accommoder les demandes de leurs clients.