Au Québec, l’autre grand projet de deuxième transformation de graphite sur la table est celui de la minière ontarienne Northern Graphite Corporation, à Baie-Comeau. (Photo: courtoisie)
INDUSTRIE MINIÈRE. Les trois prochaines années seront cruciales pour Nouveau Monde Graphite (NMG). La minière vient d’entamer sa deuxième phase de développement (l’exécution, 2023-2025) au cours de laquelle elle mettra en service sa mine en Matawinie et sa nouvelle usine de matériaux de batterie à Bécancour.
En entrevue à « Les Affaires », le président et chef de la direction, Éric Desaulniers, explique qu’il s’agit de deux jalons clés de la stratégie commerciale qui vise à faire de la PME la plus grande source intégrée de matériel de graphite naturel en Amérique du Nord. « Nous nous positionnons comme un joueur fiable et local, et on le fait par phases. Par exemple, dans la phase 1 de réduction des risques (de 2017 à 2022), nous avons fait de petites productions de graphite, testé des procédés et fait des qualifications de produits », dit-il.
NMG a un projet de mine à ciel ouvert à Saint-Michel-des-Saints, dans Lanaudière, qui sera mise en service à la fin de 2025, voire au début de 2026. Cela dit, depuis 2018, elle y exploite une petite usine de démonstration qui sert à valider le procédé d’extraction du minerai.
Cet établissement génère donc déjà certaines quantités de graphite en paillettes, qui alimentent une petite usine de purification de NMG (de la phase 1), située dans le parc industriel et portuaire de Bécancour. Depuis 2021, les employés y fabriquent des produits selon les spécifications des futurs clients de la PME.
En fait, il s’agit d’un bâtiment qu’elle loue au fabricant américain de produits chimiques Olin. Entrer sur ce site industriel exige d’ailleurs de se plier à des mesures de sécurité très strictes, comme nous avons pu le constater lors de notre visite.
En revanche, c’est NMG qui a acheté les équipements modernes, incluant des fourneaux pour chauffer le graphite à plus de 1000 degrés Celsius qui sont installés sur la ligne de production.
À un jet de pierre du site d’Olin, NMG possède aussi un grand terrain à Bécancour sur lequel elle construira une grande usine de matériel d’anode actif pour des batteries de lithium-ion, qui sera opérationnelle en 2026. Il s’agit de l’usine de phase 2 qui sera en symbiose avec la mine de Saint-Michel-des-Saints. À terme, cette usine produira annuellement 45 000 tonnes de matériel d’anode. Le fabricant japonais de batteries Panasonic Energy achètera une grande partie de la production.
Projet minier sur la Côte-Nord
Nouveau Monde Graphite met aussi la table pour la phase 3 de son développement (la croissance), qui se déploiera au-delà de 2025.
Par exemple, en 2022, l’entreprise et Mason Graphite ont créé une coentreprise pour développer et exploiter le gisement de graphite du lac Guéret, situé à 285 kilomètres au nord de Baie-Comeau. « Nous avons multiplié par dix le potentiel de ce gisement », souligne Éric Desaulniers.
À l’origine, le projet de Mason Graphite prévoyait produire 50 000 tonnes de concentré de graphite par année. Nouveau Monde Graphite portera la production à 500 000 tonnes par année, une taille plus intéressante pour attirer les investisseurs. Si tout se passe comme prévu, les travaux de construction de la mine pourraient débuter en 2026, et ce, pour une mise en service en 2029 ou 2030.
Il faudra aussi construire une deuxième usine pour transformer le graphite extrait sur la Côte-Nord, car la future usine de Bécancour ne pourra pas traiter toute la production. NMG se donne d’ailleurs un an pour décider où elle pourrait construire cette deuxième usine, explique Éric Desaulniers. « On voudrait que ce soit au Québec, mais il faut en même tenir compte des intérêts des actionnaires », dit-il, en laissant entendre que cette usine pourrait aussi se retrouver ailleurs en Amérique du Nord ou en Europe.
Usine de matériaux d’anode à Baie-Comeau
Au Québec, l’autre grand projet de deuxième transformation de graphite sur la table est celui de la minière ontarienne Northern Graphite Corporation, à Baie-Comeau. De concert avec son partenaire Graphex Technology, un producteur américain de graphite sphérique, l’entreprise veut y établir une usine de matériel d’anode pour des batteries lithium-ion.
« Cette usine produira 200 000 tonnes matériaux d’anodes par année », dit Serge Théberge, vice-président aux projets à Northern Graphite, en précisant qu’un deuxième partenaire — dont le nom demeure confidentiel — devrait bientôt se joindre au projet.
Même si l’étude de faisabilité n’est pas terminée, il souligne qu’il s’agit d’un projet supérieur à 1 milliard de dollars, qui emploiera dans un premier temps au moins 750 personnes à Baie-Comeau. Si tout se passe comme prévu, l’usine pourrait être mise en service en 2026. Elle vendra sa production à des fabricants de batteries situés en Amérique du Nord et en Europe.
En 2021, Northern Graphite a acquis deux mines de la minière française Imerys. La première est en Namibie, en Afrique, tandis que la seconde est au Québec, à Lac-des-Îles, au sud de Mont-Laurier, dans les Laurentides. Par conséquent, Northern Graphite se trouve à être actuellement la seule minière à exploiter une mine de graphite au Québec.
En principe, il ne reste que de deux ans à deux ans et demi de durée de vie à cette mine, explique Serge Théberge. En revanche, une campagne d’exploration a démontré qu’il y aurait peut-être un potentiel pour prolonger sa durée de vie d’au moins cinq ans. « C’est ce qui pourrait être confirmé cet été », dit-il.
Selon le ministère québécois des Ressources naturelles et de la Faune, le Québec compte trois autres projets de mine de graphite. Il s’agit de ceux de la minière ontarienne Focus Graphite (Lac Knife) et de l’australienne Metals Australia (Lac Rainy Graphite), tous deux près de Fermont, sur la Côte-Nord. Le troisième projet est celui de la britanno-colombienne Lomiko Metals (La Loutre Graphite), qui est situé dans les Laurentides.