L’expression «vendredi fou» remonte à plusieurs générations, mais elle n’a pas toujours été associée à la frénésie commerciale des fêtes de fin d’année que nous connaissons aujourd’hui. (Photo: La Presse Canadienne)
EXPERT INVITÉ. Le «Black Friday», ou «Vendredi fou», a des origines incertaines. En fait, il existe trois récits différents. Faites votre idée…
Première possibilité : l’expression comptable « Passer du rouge au noir »
L’origine du terme Black Friday remonterait au monde de la comptabilité.
Mon sujet préféré! C’est une ironie… si vous saviez comme je déteste.
Dans les vieux livres de comptes, bleus dans mes souvenirs et avec des lignes vertes, les pertes étaient écrites en rouge, et les profits en noir.
Aujourd’hui encore, avec Excel, on peut illustrer des résultats de cette façon quand on choisit un format « comptabilité » pour les colonnes de chiffres, rouge et noir.
Le Black Friday représenterait ainsi le moment où les commerçants passent d’une situation déficitaire (rouge) à une situation bénéficiaire (noir), grâce aux ventes exceptionnelles de cette journée qui suit l’Action de grâce (Thanksgiving).
Pas mal le contraire de Stendhal dans Le Rouge et le Noir, où le premier est symbole de passion et d’ambition (plutôt positif), et le second évoquant notamment l’obscurité de l’âme humaine et la mort.
En français, et particulièrement au Québec, le noir fait également référence à des émotions ou des événements négatifs, comme Stendhal, qui attribuait aussi le noir à « l’hypocrisie de l’Église » dans son roman. Peut-être est-ce d’ailleurs notre passé judéo-chrétien qui vient nous hanter.
En anglais, le krach boursier de 1929 avait déjà son lot de journées « black » (lundi, mardi et jeudi), mais ça ne les a pas empêchés de désigner le vendredi, qui était libre, sans générer d’émotions aussi négatives.
Booooo… on se croirait à l’Halloween.
Pour ménager les âmes sensibles, le Québec a donc opté pour quelque chose de plus « joyeux », de plus « festif », de plus « fou ». En France, on a fait comme d’habitude pour faire plus français. On a francisé l’expression en gardant l’originale anglaise, même si des efforts sont faits pour intégrer « Vendredi fou », sans grand succès.
Je ne sais pas si cette explication est la bonne pour l’origine de l’expression, mais on fait la même chose avec les impôts. On aime bien ce genre de truc.
On donne une date au printemps pour signifier qu’un contribuable commence à travailler « pour lui », ayant laissé tout le fruit de son labeur de début d’année à nos bons gouvernements.
Bon.
Il semble quand même que ce soit le récit le plus plausible des trois.
Peut-être. Mais les deux autres ne sont pas dénués d’intérêt.
Deuxième possibilité : le chaos à Philadelphie dans les années 1950-1960
Dans les années 1950 et 1960, à Philadelphie, le lendemain de Thanksgiving était synonyme de chaos. Embouteillages, vols à l’étalage, foules incontrôlables — une vraie victoire des Canadiens en séries.
La police, débordée, utilisait l’expression Black Friday pour décrire ce jour de folie. Cette situation ne plaisait pas du tout aux commerçants, allez savoir pourquoi.
Cette journée était censée être profitable, donc joyeuse pour eux. Au fil du temps, les commerçants auraient donc cherché à renverser cette connotation. Plutôt que de parler de stress et de désordre, ils ont mis l’accent sur les promotions exceptionnelles, transformant le Black Friday en un événement incontournable pour les bonnes affaires.
Troisième possibilité : Black Friday de 1869
Un autre Black Friday marquant a eu lieu le 24 septembre 1869, 60 ans avant les lundi, mardi et jeudi noirs. Ce jour-là, les financiers Jay Gould et James Fisk auraient tenté de manipuler le marché de l’or en en achetant d’énormes quantités pour faire monter les prix. Mais leur plan a échoué et l’or a brusquement perdu de sa valeur, provoquant une panique boursière à Wall Street. Cet événement a été une crise, bien loin des soldes et de l’excitation que l’on associe aujourd’hui au Black Friday.
En fin de compte, je ne sais toujours pas quelle est la bonne version de l’histoire mais, ce que je sais, en revanche, c’est que l’histoire actuelle est marquée par ces vendredis complètement fous.
À vous d’en profiter. Après la semaine des quatre jeudis, il y a maintenant le mois des 29 vendredis.
Bon magasinage!