Les aînés font de plus en plus leur place en ligne
Anne-Marie Tremblay|Édition de la mi‑septembre 2019Les nouveaux « aînés-lescents », ces aînés à l’affût qui s’adaptent aux modes plus rapidement qu’avant, constituent une cible de choix pour les spécialistes du marketing. (Photo: 123RF)
MARCHÉS DES AÎNÉS. Les stratégies pour attirer les clients se déploient de plus en plus en mode numérique, et les aînés ne sont pas en reste. Comme ils sont de plus en plus branchés, les entreprises doivent s’adapter afin de les atteindre.
Quand ils ont racheté Incursion Voyages, en 2014, Liroy Haddad et Dan Chetrit ont pris le virage du marketing numérique, et ce, même si la moyenne d’âge des clients de cette agence de circuits organisés est de… 67 ans. «Pour nous, la tendance était ultraclaire, alors que les retraités passent beaucoup de temps sur le Web. Nous voulions donc nous adapter aux comportements de notre clientèle», explique M. Haddad.
Les têtes grises sont en vedette sur le site web et sur la page Facebook de l’entreprise. Il faut dire que l’offre de longs séjours et de croisières plaît à cette clientèle qui a non seulement du temps, mais aussi les moyens. «Nous offrons également un service d’accompagnement en français et du jumelage pour les personnes seules qui aimeraient trouver un compagnon de voyage afin d’éviter le supplément pour occupation simple», souligne le copropriétaire.
Achat de mots-clés sur Google, publicités sur les médias sociaux et dans La Presse+ : aujourd’hui, plus de 80 % du budget marketing d’Incursion Voyages est investi en ligne. Ce qui permet entre autres à l’entreprise d’être à l’affût des tendances. Simon Durivage a aussi été embauché à titre d’ambassadeur. «Il représente bien la nostalgie des années 1990, et ses récits de voyage sont très populaires», dit M. Haddad.
L’évolution du marché
Si les campagnes numériques visant les personnes plus âgées demeurent rares, certaines entreprises innovent. Le Groupe Maurice n’hésite pas, par exemple, à utiliser les réseaux sociaux pour mettre en valeur ses résidences ainsi que ses résidents. «Bien entendu, les méthodes traditionnelles comme la télévision ou les médias imprimés sont encore très importantes. Toutefois, parce que les personnes âgées sont de plus en plus présentes sur le numérique et sont connectées, nous avons adapté nos stratégies pour refléter cette évolution», indique Judith Neveu, directrice marketing du groupe.
Dès 2013, l’entreprise a commencé à publier sur Facebook. «C’était innovateur pour l’époque, mais ça a vite porté fruit, alors que les résidents se sont rapidement emparés du réseau», rappelle-t-elle. L’objectif était de montrer la vie réelle en résidence, au-delà des images publicitaires, souvent léchées.
Près de 12 000 mentions «J’aime» plus tard, Le Groupe Maurice est maintenant présent sur différentes plateformes telles que YouTube, et permet de visiter virtuellement les résidences actuellement en construction. L’entreprise vient également de lancer une infolettre personnalisée. «Notre taux d’ouverture est de 75 %, ce qui est très élevé», note Mme Neveu.
Adapter son message
Ce genre d’exemples risque de se multiplier au cours des prochaines années, alors que les Québécois plus âgés adoptent en grand nombre les différentes technologies. En effet, 80 % des Québécois de 65 ans et plus disposaient d’une connexion Internet à la maison, selon l’enquête NETendances 2018 du Centre facilitant la recherche et l’innovation dans les organisations (CEFRIO). Il s’agit d’un bond de 20 % depuis 2014. Cette étude montre aussi que l’adoption des technologies est plus forte chez les personnes âgées de 65 à 74 ans, chez celles qui sont les plus éduquées et chez celles dont le revenu dépasse les 80 000 $ par année.
«Les personnes plus âgées sont non seulement branchées, mais vivent plus longtemps et ont un budget discrétionnaire intéressant, en plus d’être à l’affût des tendances. Ce qui en fait une cible de choix pour les campagnes de marketing», indique Stéphane Mailhiot, vice-président principal, Stratégie de marque à Havas Montréal. Les campagnes d’aujourd’hui sont toutefois moins liées à l’âge qu’aux différents profils de consommateurs, nuance le publicitaire. «Par contre, certaines offres vont plaire plus particulièrement à cette cible, comme les produits de santé naturels, certains services bancaires et produits d’assurances.» Les retraités sont également partie prenante de l’économie de l’expérience, à titre de grands consommateurs de spectacles et de voyages, entre autres. Autant de secteurs qui ont tout avantage à tenter de les séduire.