(Photo: Ben White pour Unsplash)
CHRONIQUE. La confiance excessive est l’un des aspects de la finance comportementale qui peut faire le plus mal à votre portefeuille. Elle se manifeste lorsqu’une personne a la fausse conviction que son investissement sera beaucoup plus performant que les autres.
Si vous investissez dans les fonds communs, cette confiance peut même vous faire oublier les frais élevés des fonds que vous aimez bien puisque vous êtes convaincu que, de toute façon, la performance sera au rendez-vous. Ça peut aussi vous inciter à trop concentrer le portefeuille. Le résultat est un portefeuille mal diversifié, coûteux en frais et moins performant à long terme.
Soulignons d’emblée que les conseillers jouent un rôle très important auprès de leurs clients, que ce soit pour déterminer l’épargne nécessaire pour atteindre leurs objectifs financiers, les moyens d’épargner ou le type de compte (REER ou CELI etc.) dans lequel investir. Et c’est surtout dans ce rôle qu’on retrouve tout l’avantage d’avoir un conseiller financier.
Par contre, quand vient le temps de choisir dans quel fonds d’actions investir, l’aide d’un conseiller vous aiderait-elle à vous mettre à l’abri de vos propres angles morts cognitifs ? La réponse est «NON» si vous avez un conseiller typique. En effet, les rendements du conseiller moyen sont décevants, selon l’étude «The Misguided Beliefs of Financial Advisors» rédigée par Juhani Linnainmaa, du Darmouth College, Brian Melzer, de la Réserve fédérale de Chicago et Alessandro Previtero, de l’Université d’Indiana.
L’étude porte sur plus de 4 000 conseillers financiers canadiens et près de 500 000 clients. Les auteurs concluent que le rendement annuel des clients des conseillers financiers est en moyenne de 3 % inférieurs aux indices. L’étude va encore plus loin en examinant le rendement des portefeuilles personnels des conseillers. En fait, les conseillers financiers ont un rendement tout aussi décevant que celui de leurs clients, soit de 3 % inférieur aux indices pour leur portefeuille personnel.
Conflits d’intérêts
Une critique qu’on entend souvent à l’intention de l’industrie des conseillers est qu’ils se placent en situation de conflit d’intérêts lorsqu’ils proposent des fonds communs à frais élevés qui peuvent augmenter leur rémunération. Cette pratique se ferait au détriment des rendements des clients.
Eh bien , l’étude conclut que les rendements décevants des clients ne sont pas liés à un tel conflit d’intérêts. Ils résulteraient plutôt des biais des conseillers puisque ceux-ci investissent leurs épargnes dans les mêmes fonds que leurs clients. Les conseillers poursuivent même leur stratégie de fonds communs après avoir changé d’emploi et, parfois même, après leur retraite. Voici les quatre principales caractéristiques des portefeuilles des conseillers:
1. Les fonds sont choisis selon les rendements passés. Plus précisément, les conseillers investissent surtout dans des fonds dont le rendement des 12 derniers mois a été au-dessus de la moyenne.
2. Il s’agit presque tous de fonds en gestion active.
3. Ils ont souvent des frais plus élevés que la moyenne.
4. Plusieurs portefeuilles sont concentrés dans un secteur et sont mal diversifiés. Malheureusement, pour la plupart des conseillers, ces quatre caractéristiques les conduisent vers un rendement inférieur aux indices.
À quoi peut-on attribuer cette contre- performance ? Pas à la recherche du rendement passé ni à la gestion active, lesquels influent peu, en moyenne, sur le rendement futur. Ce sont les frais ! En moyenne, les frais des fonds communs choisis sont de 2,4 %, ce qui explique en grande partie le 3 % de rendement inférieur à l’indice.
Ainsi, on constate que plus les frais d’un fonds commun sont élevés, plus le rendement après frais des clients (et du conseiller) est décevant. Bref, un fonds à frais plus élevés n’est absolument pas synonyme d’un rendement plus élevé. En moyenne, c’est plutôt le contraire qui est vrai. Quant au risque, plus un conseiller concentre son portefeuille dans un secteur, plus les portefeuilles des clients deviennent, eux aussi, inutilement risqués et volatils.
On serait porté à croire que les biais de la finance comportementale et des portefeuilles décevants sont plutôt l’adage des investisseurs individuels. Il n’en est rien. Un conseiller typique a aussi ces biais. Sachez que ces biais pourraient nuire à votre rendement à long terme. Le mieux sera alors de choisir un fonds commun bien diversifié et à frais plus bas.