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Dominique Beauchamp

La Sentinelle de la Bourse

Dominique Beauchamp

Analyse de la rédaction

Les châteaux forts de la techno et de la consommation

Dominique Beauchamp|Publié le 12 mai 2023

Les châteaux forts de la techno et de la consommation

(Photo: 123RF)

ANALYSE. Pendant que la Bourse semble ceinturée entre l’inflation et la récession, les investisseurs se réfugient dans deux secteurs qui font office de châteaux forts:les titans de la technologie et les multinationales de produits de consommation.

Le bilan forteresse des premiers leur procure une aura d’invincibilité au moment où les banques prêtent moins.

Dans le deuxième groupe, les Procter & Gamble (PG, 156,35 $ US), PepsiCo (PEP, 192,18 $ US) et Colgate- Palmolive (CL, 81,43 $ US) de ce monde bénéficient de l’effet prononcé de l’inflation sur leurs revenus après plus d’une décennie de disette. Les prix des produits pour la maison et pour les soins personnels augmentent au rythme annuel de 8,4 %.

Dans les deux cas, leur riche évaluation fait sourciller et comporte des risques si les avantages que les investisseurs leur attribuent devaient s’effriter.

L’évaluation généreuse des géants de la techno est souvent donnée en exemple. Et à juste titre.

L’indice NYSE FANG+ (NYFANG, 5975,11 points), qui compte Nvidia (NVDA, 278,18 $US), Alphabet (GOOGL, 105,44 $US), Apple (AAPL,169,71 $US), Meta Platforms (META, 237,24 $US), Microsoft (MSFT, 305,93 $US), Advanced Micro Devices (AMD, 81,80 $US) et Tesla (TSLA, 160,65 $US), est 50 % plus chèrement évalué (27,7 fois) que le S&P 500 (18,5 fois) en fonction des profits prévus des 12 prochains mois.

 

 

Après la forte demande pandémique pour leurs services, voilà que l’engouement pour l’intelligence artificielle conversationnelle leur donne un nouvel élan. Il faut dire que les dirigeants exploitent cette nouvelle carte à fonds: Microsoft, Meta et Alphabet ont cité l’intelligence artificielle plus de 200 fois au cours de leur plus récente conférence téléphonique trimestrielle, rapporte l’agence Bloomberg.

Normalement, lorsqu’une poignée de chouchous dominent autant les rendements de la Bourse, un retour à la normale s’ensuit plus tard. La concentration des titans de la techno est déjà extrême, estime Martin Roberge, stratège quantitatif de Canaccord Genuity. L’indice NYFANG+ représente en effet 21% de la valeur boursière de l’indice élargi S&P 500, mais seulement 14 % des bénéfices attendus dans 12 mois.

De plus, la croissance de 5,6 % des revenus réalisés au cours des 12 derniers mois par les titres de l’indice NYFANG+ est nettement plus faible que celle de 11,5 % de l’ensemble du S&P 500. Un tel écart d’évaluation et de croissance entraîne historiquement une correction, mais la fièvre de l’IA pourrait prolonger l’enthousiasme et alimenter une « nouvelle bulle », craint Martin Roberge.

 

Les géants de la consommation peuvent encore s’apprécier

Propulsés par la hausse des prix de leurs dentifrices, shampooings et boissons gazeuses, plusieurs fabricants de produits de grande consommation atteignent des sommets en Bourse ces derniers temps, dont Mondelez International (MDLZ, 77,02 $), PepsiCo, General Mills (GIS, 88,84 $US) et Colgate-Palmolive. Le secteur représenté par l’indice de la consommation de base du S&P 500 (XLP, 77,68 $ US) se négocie à 25 fois les bénéfices. C’est historiquement cher, mais ce ratio avait grimpé jusqu’à 26- 28 fois lors de la crise asiatique de 1998‑1999. Par la suite, l’évaluation avait dégringolé lorsque les investisseurs s’étaient rués vers les titres de la nouvelle économie au moment de la bulle Internet de 2000, se souvient Martin Roberge.

Le stratège rappelle que cette industrie performe généralement bien pendant les six mois précédant une récession et lors des premiers mois de celle- ci. Cette fois, la dépréciation du dollar américain donne un coup de pouce aux exportations et aux ventes réalisées à l’étranger.

D’ailleurs, c’est grâce aux ventes hors de l’Amérique du Nord que Colgate-Palmolive a pu surpasser les attentes au premier trimestre et relever ses prévisions pour 2023.

En même temps, certains coûts de l’industrie diminuent, ce qui protège les marges au moment où les consommateurs deviennent plus sensibles aux prix. Les revenus et les profits des fabricants augmentent encore, mais les volumes commencent à diminuer pour certains fabricants.

Même si le secteur est chèrement évalué, il reste l’un des favoris du stratège parce qu’il croit qu’une récession pourrait se manifester dès le troisième trimestre, aux États-Unis. «L’évaluation du secteur devient très étirée lorsque sa performance relative culmine. En gros, entrevoit-il, les investisseurs peuvent raisonnablement s’attendre à une appréciation d’encore 10 %, mais pas beaucoup plus, dans ce scénario.» Après la forte demande pan-démique pour leurs services, voilà que l’engouement pour l’intelli-gence artificielle conversation-nelle donne un nouvel élan aux géants de la techno.