Les déficits fragilisent le Canada, dit un candidat conservateur
La Presse Canadienne|Publié le 09 septembre 2021La rencontre avec le candidat conservateur s'inscrit dans une série d’entrevues visant à discuter des programmes économiques des principaux partis. (Photo: La Presse Canadienne)
Le Canada sera plus vulnérable lors du prochain choc économique si le gouvernement fédéral perd le contrôle de ses finances publiques, prévient Vincent Duhamel, candidat conservateur, qui accuse le gouvernement Trudeau d’avoir géré les deniers de l’État avec «insouciance».
«On se trouve à une croisée des chemins, dit-il dans le cadre d’une série d’entrevues visant à discuter des programmes économiques des principaux partis. La prochaine crise, on ne pourra pas la prendre de la même façon, juste parce qu’on n’aura pas les reins assez solides pour le faire.»
Préoccupé par l’état des finances publiques, l’homme d’affaires de 57 ans a décidé de quitter sa retraite pour porter les couleurs conservatrices dans Brome-Missisquoi, en Estrie. Il dit avoir été marqué par la crise financière asiatique de 1997 tandis qu’il travaillait en Asie. Il se souvient du sursaut des taux d’intérêt et de la poussée du chômage, qui s’en est suivi.
M. Duhamel juge que les libéraux «n’ont juste pas la crédibilité» nécessaire pour superviser la relance économique tout en se dirigeant vers l’équilibre budgétaire.
Vincent Duhamel, candidat pour le Parti conservateur du Canada. (Photo: La Presse Canadienne)
Un équilibre sur 10 ans
Un gouvernement conservateur viserait l’atteinte de l’équilibre budgétaire sur une période de 10 ans. Il s’agit d’un objectif «réaliste», croit le candidat. Patienter une décennie pour revenir à l’encre noire permettrait d’atteindre cet objectif sans mettre à mal le filet social, selon lui. «Ce qu’on veut faire, c’est mieux cibler et mieux dépenser.»
Sur cinq ans, les conservateurs prévoient arriver à un déficit de 24,7 milliards $ en 2025-2026. Les libéraux, pour leur part, tablent sur un déficit de 32,1 milliards $, au cours du même exercice.
Dans les deux cas, ce scénario laisse entrevoir une forte diminution du déficit en raison de la reprise économique et de la baisse de dépenses liées à la pandémie. M. Duhamel met toutefois en doute la crédibilité du cadre financier libéral. «Ils peuvent bien faire toutes les promesses possibles. Je ne crois pas qu’ils vont en respecter une. Ils ne l’ont jamais fait.»
Lors de la campagne de 2015, le plan libéral misait sur des déficits inférieurs à 10 milliards $ et un retour à l’équilibre budgétaire en 2019. Le gouvernement Trudeau a par la suite renoncé à cette promesse, affirmant que des investissements plus importants étaient nécessaires pour améliorer le potentiel de croissance économique à long terme. Le recours au déficit était inévitable en 2020 en raison de la pandémie, mais le gouvernement Trudeau signait déjà des budgets à l’encre rouge en période de croissance économique, déplore M. Duhamel.
En entrevue avant le dévoilement du cadre financier du parti, le candidat n’a pas précisé quelles seraient les missions de l’État qui pourraient voir leur budget réduit pour financer d’autres projets. Par la suite, le parti a dévoilé que l’abolition du programme de garderies annoncé par le gouvernement précédent lui permettrait d’économiser 8,3 milliards $ en 2025-2026.
Près de 6 milliards $ devait être remis au gouvernement du Québec d’ici cinq ans en vertu d’une entente entre le fédéral et le provincial.
En entrevue, M. Duhamel insiste aussi pour rappeler la promesse conservatrice de maintenir l’augmentation des transferts aux provinces en santé à un rythme d’au moins 6% par année.
Pénurie de main-d’œuvre
La pénurie de main-d’œuvre est probablement l’enjeu qui préoccupe le plus le milieu des affaires. M. Duhamel croit qu’il faut aider les chômeurs de longue date à réintégrer le marché du travail.
Pour remplacer la Subvention salariale d’urgence, le parti d’Erin O’Toole prévoit un programme qui paierait jusqu’à 50% du salaire des nouveaux employés pendant six mois. La subvention débuterait à 25%, mais elle augmenterait progressivement à 50%, plus la durée de chômage du nouvel employé a été longue. «C’est parfois difficile pour les travailleurs qui sont au chômage depuis longtemps, car ils peuvent avoir perdu certaines qualifications et les employeurs peuvent se montrer hésitants à leur donner une chance.»
Les lacunes de l’assurance-emploi ont aussi été mises à jour durant la pandémie tandis que le programme à lui seul n’était pas suffisant pour absorber le choc subi par le marché de l’emploi. Le parti promet la création d’une «super» assurance-emploi qui offrirait des prestations plus généreuses (75% au lieu de 55%) lorsqu’une province est en récession.
M. Duhamel souligne que les conservateurs veulent continuer de soutenir les secteurs ébranlés par la pandémie. Parmi les mesures proposées, on compte un programme de prêts pour la relance des PME dans le secteur de l’hôtellerie, du commerce de détail et du tourisme. Un crédit d’impôt de 15% pour les dépenses de vacances faites au Canada en 2022 est également prévu pour encourager les Canadiens à soutenir l’industrie touristique nationale.
Sous Andrew Scheer, la proposition d’un corridor énergétique avait soulevé des questions sur l’acceptabilité sociale d’un oléoduc au Québec lors de la campagne de 2019. M. O’Toole a été «très clair» qu’un oléoduc ne serait pas imposé au Québec, ajoute M. Duhamel. «C’est une des grandes raisons pour laquelle je me suis lancé avec M. O’Toole. C’est un nouveau chef, une nouvelle approche, beaucoup plus concertée avec les provinces.»