(Photo: Amy hirschi pour Unsplash.com)
EXPERT INVITÉ. Les personnes qui contrôlent ce sur quoi vous travaillez sont vos patrons, même si ce n’est pas ainsi que vous les appelez.
Je ne compte plus le nombre de fois lorsque des gens m’ont confié vouloir devenir entrepreneurs pour «être leur propre patron». En disant cela, ils ne réalisent pas qu’ils adhèrent à l’un des mythes les plus populaires de l’entrepreneuriat: le mythe de la liberté, soit celui de contrôler ses propres actions, son propre emploi du temps et peut-être même son propre destin.
J’ai moi-même longtemps pensé que l’entrepreneuriat rimait avec liberté. Je m’amusais à répéter qu’avec mon trouble d’opposition, je ne pourrais jamais travailler pour personnes de toute manière. J’ai souvent justifié souvent mes journées de 16 heures en arguant qu’au moins MOI je travaillais selon mon propre horaire.
Vous voyez sûrement le paradoxe. En tout ça n’était qu’une illusion. D’un côté, je pensais être le maitre de mon temps et de mon destin, mais finalement, tout mon temps était consacré à mon entreprise «parce qu’il fallait ce qu’il fallait».
En fait, en discutant avec un ami dernièrement qui occupe un poste de direction dans une entreprise, j’ai fini par réaliser que la plus grande différence entre moi et lui n’était pas le fait que contrairement à lui, personne ne pouvait décider pour moi. La plus grande différence est qu’une seule autre personne dirigeait son travail et que moi j’avais des milliers de patrons… Je ne les avais tout simplement jamais reconnus pour ce qu’ils étaient.
Vous travaillez pour vos employés
Diriger votre propre entreprise signifie généralement que vos employés sont vos patrons. Bien que vous puissiez faussement croire que ceux-ci travaillent pour vous, vous passez chacune de vos journées à travailler pour eux. Dans mon cas, j’ai rapidement constaté que la majorité du temps, mon équipe me disait ce dont ils avaient besoin pour accomplir leur mission et que moi, je passais la plupart de mon temps à essayer de fournir les ressources: plus de budget, des embauches, des mises en relations, etc.
C’est encore plus vrai si vous êtes à la tête d’une entreprise dans le milieu des technologies et que vous êtes financé en capital-risque. Si votre entreprise n’est toujours pas profitable, vous devez constamment vous assurer d’avoir suffisamment de liquidités pour poursuivre les opérations et payer les salaires. Si vous ne réussissez pas à récolter l’argent nécessaire, vous devez renvoyer des gens. Aussi simple que ça!
Alors, est-ce que ça m’amuse de passer plus de 50% de mon temps à lever des capitaux? Pas du tout! Cependant, c’est ce que je fais parce c’est à quoi mon entreprise et mes employés s’attendent de moi.
Vous travaillez pour vos investisseurs
Si vous avez des investisseurs, vous réaliserez bien rapidement qu’ils sont aussi vos patrons. Encore plus lorsqu’on parle de capital-risque avec des représentants disposant aussi de sièges à votre conseil d’administration et pouvant, en théorie, vous mettre à la porte (pensez simplement à Steve Jobs et Apple). Certes, les investisseurs veulent toujours éviter de licencier leur PDG, mais cela reste une possibilité. Par conséquent, difficile de dire qu’ils ne sont pas vos patrons.
Au-delà de la possibilité d’être renvoyé, vos investisseurs sont aussi vos patrons, car ils vous demanderont régulièrement de prendre du temps pour les mettre à jour sur l’entreprise, l’organisation des réunions du conseil d’administration, les rapports, etc. Et vous savez quoi? Lorsqu’un investisseur vous appelle et vous demande un rapport, vous allez généralement mettre sur pause tout ce que vous faites pour répondre à sa demande.
C’est aussi le cas de votre banquier qui, pour renouveler votre marge de crédit, vous demande des prévisions budgétaires pour les deux prochaines années.
Est-ce que lorsque je me suis lancé en entrepreneuriat, croyant à ce mythe de liberté, je rêvais de créer rapport après rapport et diaporama après diaporama pour expliquer ce qui se passait dans mon entreprise à des personnes qui n’avait aucune idée ce qui se déroulait au quotidien? Évidemment pas, mais je le fais, parce que c’est ce que mes investisseurs attendent de moi et c’est ce dont l’entreprise a besoin.
Vous travaillez pour vos clients
Même si les employés et les investisseurs sont importants, le principal acteur pour lequel vous travaillez au quotidien est vos clients. Vous dirigez une entreprise principalement pour eux. C’est votre travail de déterminer ce dont ils ont besoin et de le livrer. Si vous ne le faites pas: ils ne vont pas hésiter à vous virer!
Lorsque vos clients ont besoin de choses que votre équipe n’est pas en mesure de vous fournir, vous serez la personne qui va recevoir l’appel. Si les choses vont mal, très mal, vous recevrez aussi le coup de téléphone pour vous dire que si les choses ne changent pas, ils ne resteront pas avec vous.
En fonction de la valeur de ce client pour votre entreprise, cela pourrait impliquer de mettre en place une nouvelle fonctionnalité critique ou de traverser le pays à tout moment pour sauvegarder un renouvellement de contrat incertain.
Leurs besoins correspondaient-ils à ce sur quoi je voulais travailler? Rarement. Ai-je travaillé sur ce dont ils avaient besoin au lieu de ce que je voulais? Tout le temps!
Nous travaillons toujours pour les autres
Dans le parcours entrepreneurial, la liberté et le pouvoir semblent être des acquis logiques. Cependant, il est facile de réaliser que ce n’est pas tout à fait la réalité: être entrepreneur veut dire de travailler avec une multitude de personnes qui contribuent à votre succès, mais qui ont aussi une influence sur vos décisions et votre emploi du temps.
Vos employés deviennent vos partenaires dans cette aventure et stimulent votre croissance tout en vous aidant à façonner votre vision. Leurs idées et leurs besoins deviennent des guides précieux dans votre parcours. Même s’il est vrai qu’il est parfois difficile comme patron d’avoir l’impression de travailler pour les autres, mettre notre énergie à bâtir une culture d’entreprise hors du commun et d’avoir un équipe soudée reste très motivant.
Vos investisseurs, bien plus que des bailleurs de fonds, sont surtout des catalyseurs de vos ambitions. Leur soutien financier et stratégique vous permettra d’atteindre de nouveaux sommets: c’est donc normal de devoir leur rendre certains comptes!
Finalement, vos clients sont la raison d’être de votre entreprise. Leur satisfaction sera votre plus grande récompense, et leur confiance le carburant qui alimente notre désir de grandir.
Ainsi, même si nous ne sommes jamais tout à fait notre propre patron, cette collaboration dynamique et harmonieuse nous permet de continuer de nous sentir, d’une certaine manière libre. C’est dans cette symphonie d’efforts concertés que réside la vraie magie de l’entrepreneuriat.
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