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Thomas Gaudet

L'allégorie des finances personnelles

Thomas Gaudet

Expert(e) invité(e)

Les liquidités au bois dormant des entrepreneurs

Thomas Gaudet|Publié le 25 mai 2022

Les liquidités au bois dormant des entrepreneurs

L’entrepreneur peut conserver un montant pour gérer le fonds de roulement de l'entreprise, mais il devrait se départir des sommes excédentaires en les investissant dans un projet ou dans un produit de placement. (Photo: 123RF)

BLOGUE INVITÉ. Il était une fois un entrepreneur qui était perdu dans le bois, ou plutôt dans ses finances personnelles. Faute de temps, il ne savait plus quoi faire de son patrimoine et par conséquent, il négligeait la gestion de son avoir. Il décida donc d’adopter le statu quo, c’est-à-dire de ne rien faire avec son argent.

Le coût de l’inaction est particulièrement élevé, surtout lorsqu’il est question d’argent. Voyons ensemble les possibilités qu’ont les entrepreneurs pour gérer leurs liquidités.

 

L’argent dormant dans le compte de banque

L’entrepreneur peut conserver un montant pour gérer le fonds de roulement de l’entreprise, mais il devrait se départir des sommes excédentaires en les investissant dans un projet ou dans un produit de placement.

Il peut décider de déplacer ces sommes dans une entreprise via une avance ou un dividende interco libre d’impôts. Cela peut aider à purifier l’entreprise opérante afin de qualifier les actions pour l’exonération du gain en capital sur les AAPE (Actions admissibles de petites entreprises). Comme certains critères doivent être respectés pour se qualifier, faites-vous conseiller par un fiscaliste ou un comptable.

L’actionnaire pourrait également investir les liquidités excédentaires dans des actions d’entreprises privées ou publiques, dans des obligations, dans des fonds négociés en bourse ou dans des fonds communs de placement.

Le fait d’investir les montants de l’entreprise comporte plusieurs avantages. Premièrement, l’actionnaire est obligé de bien gérer son fonds de roulement, car il n’a pas de surplus dans son compte de banque. L’entrepreneur qui se serre la ceinture prendra toujours des décisions plus matures!

Deuxièmement, la gestion pourra générer des rendements sous forme d’intérêt, de dividendes ou de gain en capital imposés dans l’entreprise, mais aussi personnellement au moment où vous choisirez de vous verser une rémunération (dividende ou salaire). Servez-vous du report d’impôts autant que vous le pouvez, c’est un avantage corporatif non négligeable.

Lorsque vos placements génèrent du gain en capital, la moitié de celui-ci pourra être remis au propriétaire sans impact fiscal. La même stratégie peut être utilisée lorsque l’entrepreneur vend un bien immobilier ou mobilier plus cher que le prix payé. Dans le jargon fiscal, cette stratégie se nomme le compte de dividende en capital.

En revanche, il faut faire attention de bien gérer les revenus passifs (intérêts, dividendes, gain en capital, loyer), afin d’éviter de se faire couper la déduction pour petites entreprises sur les premiers 500 000 $ de profit de votre entreprise. Idéalement, il faut générer moins de 50 000 $ de revenus passifs pour avoir droit à la déduction, sans quoi la déduction sera coupée progressivement de 50 000 $ à 150 000 $ et éliminée à plus de 150 000 $ de revenus passifs.

 

Avances à l’actionnaire

Les avances à l’actionnaire sont souvent sous-utilisées ou mal comprises par les entrepreneurs. D’un côté, l’avance débitrice, apparaissant dans les actifs de l’entreprise au bilan, peut être utilisée pour financer à court terme certains biens personnels de l’entrepreneur. En effet, l’entrepreneur peut sortir des montants de la compagnie, mais doit rembourser l’avance de sorte qu’elle n’apparaît pas sur deux bilans.

Par exemple, si vous vous faites une avance au cours de votre année financière se terminant le 31 décembre 2021, vous devez obligatoirement la rembourser avant le 31 décembre 2022. La stratégie n’est pas avantageuse pour tous les entrepreneurs, veuillez consulter un fiscaliste. Le prêt de la compagnie sera assujetti au taux prescrit (présentement 1%), donc concrètement l’entrepreneur devra s’imposer sur un montant équivalent au prêt multiplié par le taux prescrit.

De l’autre côté, les avances créditrices, apparaissant dans les passifs de l’entreprise, peuvent être remboursées à l’entrepreneur. Dès que l’entreprise est autosuffisante, le montant que l’actionnaire a injecté au départ sous forme de prêt à l’entreprise peut lui être retourné.

Il pourra ainsi profiter d’un abri ou d’un report fiscal en cotisant à son REER, REEE, CELI, CELIAPP ou tout simplement utiliser les sommes pour financer un autre projet.

 

Autres stratégies pour gérer ses liquidités

Une autre alternative existe pour sortir des fonds de son entreprise sans impact fiscal. Il s’agit du retrait du capital versé. Le capital versé se trouve à être le montant injecté pour faire l’achat d’une catégorie d’actions de la société. L’actionnaire détenteur des actions peut retirer le capital versé de la catégorie d’actions à tout moment.

Dans un autre ordre d’idées, si vous empruntez des sommes à votre banque pour investir dans une entreprise, les intérêts sur le prêt contracté seront déductibles. L’entrepreneur doit toujours s’assurer de rendre ses intérêts déductibles que ce soit via la mise à part de l’argent ou via le prêt à des fins d’investissement. Le fait de convertir ses intérêts non déductibles en intérêts déductibles peut représenter des dizaines de milliers de dollars sauvés en impôts. Il est important d’indiquer à votre comptable que vous avez fait un prêt pour investissement, car il doit s’assurer du bon traitement fiscal concernant cette transaction.

Pour être entrepreneur au Québec, il faut être prêt à prendre certains risques. Si un entrepreneur a soif de risque, il peut se permettre d’en prendre un calculé en investissant ses liquidités excédentaires dans un produit de placement.

À (re)lire: Les liquidités au bois dormant des contribuables

L’actionnaire peut maximiser ses avances pour s’enrichir personnellement. Même si l’actionnaire détient techniquement l’entreprise, il n’est jamais à l’abri d’une faillite, d’une perte d’un gros client, etc. Le fait de sortir l’argent de la compagnie via un salaire et/ou un dividende pour cotiser à un régime défiscalisé prouve que celui-ci gère bien son risque.

À l’aube de leur retraite, les entrepreneurs font trop souvent l’erreur de garder toutes leurs billes dans l’entreprise. Lorsque la compagnie est autosuffisante financièrement, l’entrepreneur doit en profiter pour accumuler un beau pécule via le REER, le CELI et le REEE des petits-enfants. Les stratégies pour gérer les liquidités des entrepreneurs ne manquent pas, il suffit d’un bon planificateur financier, comptable et fiscaliste pour vous aider.