L'actrice Zendaya à la première mondiale à Londres de «Dune: deuxième partie», réalisé par Denis Villeneuve. (Photo: Getty Images)
LE MOT DE LA DIRECTRICE DE L’INFO. Ceux et celles qui connaissent certains de mes textes pour Les Affaires savent à quel point j’aime faire des liens entre le cinéma et les thèmes qui passionnent notre communauté d’affaires. Laissez-moi passer de nouveau par le 7e art pour vous annoncer… que notre média a choisi de faire entrer l’intelligence artificielle (IA) par la grande porte de notre site internet, à raison de deux fois par semaine.
Si l’on remonte à une époque pas si lointaine, à la sortie de la première partie du film Dune de Denis Villeneuve en 2021, l’IA n’étaient que deux mots prononcés par les plus érudits (Yoshua Bengio, Emilio Ferrara, Kara Swisher et consorts) et/ou les plus anxieux. Je me rappelle d’ailleurs avoir terminé les 21 leçons pour le XXIe siècle de Yuval Noah Harari dans une angoisse tétanisante. Et nous voici quelques années plus tard, à la sortie de la deuxième partie de Dune, alors que des IA sont lancées à la vitesse de la lumière et qu’elles portent des prénoms trop familiers (Claude, Sophia, Ada, etc.)…
Je ne vous divulgâche rien si je vous dis que dans les mondes de Dune des années 10 191, les ordinateurs ont été bannis. Ces «thinking machines» («machines pensantes») sont interdites depuis le Jihad butlérien, une guerre ancienne qui a mis fin au règne d’une conscience d’IA (Omnius). Cette dernière avait pris le contrôle de l’ensemble de l’univers par un réseau de machines interconnectées. Rien de moins.
C’est avec ce genre de projections que les homo sapiens approchaient l’IA jusqu’à l’arrivée de ChatGPT l’an dernier, entre la peur de perdre leur emploi, leur humanité… et leur vie. Mais la peur est-elle la meilleure avenue pour appréhender ce qui est déjà à portée de doigts? Giorgio Agamben disait des dispositifs qu’ils ont la «capacité de capturer, d’orienter, de déterminer, d’intercepter, de modeler, de contrôler et d’assurer les gestes, les conduites, les opinions et les discours des êtres vivants.» L’IA étant le dispositif le plus à jour de notre monde, «quelle stratégie devons-nous adopter dans le corps à corps quotidien qui nous lie aux dispositifs?»
À Les Affaires, nous avons décidé de prendre l’IA à bras le corps et de répondre positivement à la proposition de l’entreprise québécoise Welcome Spaces Technologies de diffuser Le courrier de Sérafin. Cet assistant web spécialisé en finances personnelles propulsé par l’IA répondra les mercredis et les vendredis à vos questions qui concernent les finances personnelles.
À 95 ans bien sonnés, Les Affaires ne se lance toutefois pas dans le vide. Votre portefeuille est en jeu, tout comme la crédibilité de notre média! Les conseils de l’IA seront donc validés par des experts et par nos journalistes.
Bien sûr, vous n’aurez pas à lire les erreurs qui pourraient potentiellement se glisser dans les réponses de l’assistant, comme vous l’avez peut-être expérimenté de votre côté en faisant des tests avec différentes IA.
Quel message Les Affaires envoie-t-il en choisissant de faire confiance à l’IA pour produire en partie du contenu? Premièrement, cela nous permet de concentrer les forces d’un de nos journalistes sur ses nombreux talents que l’IA est encore loin d’avoir remplacé (vérification des faits, curiosité, écoute et échange, rigueur, etc.). Deuxièmement, de plus en plus de voix s’élèvent pour dire que l’IA ne volera jamais votre travail, mais que les gens qui savent l’utiliser pourraient le faire!
C’est donc aussi pour être en avant de la parade que nous plongeons dans cette aventure, tout en étudiant de notre côté toutes les immenses possibilités — et les nombreuses dérives, nous ne sommes pas naïfs! — de l’IA dans une salle de rédaction. Restez à l’affût de nos découvertes.
Bien sûr, nous ne voulons pas aller dans le sens des commandements radicaux de la Bible catholique orange de Dune qui stipulait que «tu ne feras pas de machine à l’effigie d’un esprit humain». L’IA est là et ne disparaîtra pas demain. Avançons toutefois avec en tête les mots de Leto II Atréides, dans L’Empereur-Dieu de Dune (1981):
«Les humains avaient configuré ces machines pour usurper notre sens de la Beauté, notre nécessaire autonomie à partir de laquelle nous portons des jugements vivants. Naturellement, les machines ont été détruites.»
Bonne lecture!
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