(Photo: Michael Browning pour Unsplash)
BLOGUE INVITÉ. De Mexico à Montréal, les restaurateurs ont dû repenser leurs opérations afin de se plier aux mesures sanitaires qui tentent de réduire la propagation de la COVID-19.
Depuis le début de la pandémie, les revenus de Moishes reposent uniquement sur sa branche de vente au détail. La demande élevée dans les supermarchés pour ses paquets de viande ou sa célèbre salade de chou ne permet toutefois pas d’éponger les pertes engendrées par la fermeture de sa salle à manger.
Le propriétaire du restaurant Park, Antonio Park, a, en revanche, mobilisé son personnel afin que le restaurant reprenne ses activités le plus rapidement possible.
« J’ai cuisiné pendant deux semaines à la maison et c’était bien, mais je savais que ce n’était pas suffisant. Il fallait que je fasse quelque chose de plus », raconte le chef.
M. Park propose un menu à emporter pour le dîner et le souper composé de sushis et d’autres plats japonais et coréens, semblables à ceux proposés dans son établissement avant la pandémie.
Le restaurant a réduit le prix de vente de ses plats et dépense moins en termes de personnel, mais il continue à commander du poisson du Japon, d’Hawaï, de Nouvelle-Zélande et du Mexique, dont les coûts sont 30 % plus chers qu’avant le début de la pandémie.
Bien que l’établissement reçoive de nombreuses commandes quotidiennement, lui non plus ne parvient pas à essuyer entièrement ses pertes.
« Je pourrais réduire la qualité et faire la même chose et gagner de l’argent, mais je ne veux pas faire cela, explique M. Park. Je veux maintenir la même qualité parce que le restaurant est connu pour la qualité de son poisson. »
Comme M. Park, Dennis Stevens a également mis l’accent sur la qualité de ses produits tout au long de la pandémie. Depuis le début du confinement, le Nostos, qui a pignon sur rue à Mexico, a cessé d’offrir du saumon et du homard canadiens, mais continue de faire venir chaque jour du poisson frais de la côte mexicaine. Si le coût de la cargaison n’a pas eu d’impact sur les finances du restaurant, le choix de poissons est plus limité.
Son service de livraison a été retravaillé. Les clients peuvent encore choisir leur poisson comme ils le feraient s’il était assis chez Nostos, mais en ces temps de distanciation sociale, ils le font par SMS. Les plats sont livrés sur la vaisselle du restaurant, qui sera retournée par un employé de l’établissement ou par le client lui-même afin qu’il récupère son dépôt. Ceux qui commandent le poisson en croûte de sel reçoivent même une vidéo leur expliquant comment ouvrir leur poisson à la maison.
Un retour à l’«a»normal
À Montréal, les restaurants ont pu rouvrir leur salle à manger à partir du 22 juin. Cependant, M. Park et M. Lighter ne pourront plus offrir la même expérience de restauration qu’auparavant, en vertu des dernières directives de santé publique. Le personnel devra porter des visières, les menus seront accrochés aux murs et les clients devront être assis à deux mètres les uns des autres.
M. Lighter note que de diminuer de la capacité des restaurants sans trouver de compromis afin d’alléger d’autres dépenses comme le loyer nuira aux restaurants et à leurs propriétaires.
« Les marges dans ce secteur sont très minces par définition, dit M. Lighter. Avoir les mêmes dépenses qu’avant la pandémie, mais ne fonctionner qu’à 50 % de la capacité sera extrêmement difficile. »
M. Park prévoit maintenir ses services de plats à emporter et de livraison pour atténuer les conséquences financières de la réduction de la capacité de sa salle à manger.
À Mexico, les restaurants ont rouvert le 15 juin. M. Stevens a travaillé dur, de concert avec le gouvernement local, pour imaginer à quoi ressemblera le restaurant post-pandémie. Il recommande de ne manger qu’en plein air et de respecter une distance de deux mètres entre les dossiers des chaises.
Bien que Nostos dispose d’un grand espace extérieur, M. Stevens a recommandé au maire de la ville d’accorder aux autres restaurants locaux un permis temporaire pour d’utiliser le trottoir ou la rue pour pouvoir accueillir davantage de clients.
Nostos est équipé de caméras thermiques pour détecter les fièvres et tous ses serveurs et employés portent des masques. M. Stevens s’est également engagé à offrir gratuitement des masques à tous ses clients, qu’ils doivent porter dès qu’ils quittent leur table.
« Nous voulons mettre en place autant de barrières que possible pour que le virus ne puisse pas être transmis dans les restaurants », explique M. Stevens.
Tandis que les restaurants commencent à rouvrir dans le monde entier, les paroles de M. Stevens résonneront pour tous les propriétaires qui tentent de protéger leur entreprise et leurs clients.
Karl Moore et Marie Labrosse. Karl est professeur agrégé à la Faculté de gestion Desautels et Marie est étudiante à la maîtrise en littérature anglaise de l’Université McGill.