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L’excubation pour libérer la créativité de l’entreprise

Jean-François Venne|Publié le 23 février 2022

L’excubation pour libérer la créativité de l’entreprise

Jacqueline Wallace, vice-présidente marketing et communications à Mitacs (Photo: courtoisie)

ENTREPRENEURIAT COLLABORATIF. L’excubation représente une formule intéressante de collaboration en innovation, qui permet de créer de la valeur rapidement en s’extrayant des contraintes internes et en diminuant les risques. Et elle n’est pas réservée aux grandes entreprises.

Cette approche offre la possibilité d’affranchir un projet d’innovation de certaines contraintes internes et de bénéficier de l’apport de partenaires externes comme une start-up, des chercheurs, des étudiants, etc. «L’excubation joue un peu le rôle d’un bac à sable, qui assure d’innover dans un contexte plus flexible, sans se heurter à des processus stricts de l’entreprise, telles les politiques d’achat ou la gestion de la propriété intellectuelle», résume Richard Chénier, directeur général de Centech. Cet incubateur opère depuis 2018 le Collision Lab, un centre d’innovation ouverte.

«L’excubation représente une voie mitoyenne entre l’innovation en entreprise et l’incubation d’une start-up complètement séparée», illustre Jacqueline Wallace, vice-présidente marketing et communications à Mitacs, un organisme canadien à but non lucratif qui crée des partenariats entre les universités et le secteur privé en matière d’innovation industrielle et sociale. Pour elle, le plus gros avantage de cette formule est de libérer la créativité, afin de pouvoir explorer et tester plus librement des idées. 

 

Un espace de créativité

L’objectif de l’excubation consiste généralement à proposer une solution novatrice, souvent disruptive, de mener le projet jusqu’à la preuve de concept. Parfois, elle permet aussi de montrer qu’un marché existe pour une innovation. Cependant, le succès n’est jamais garanti. L’opération débouche occasionnellement sur un «échec productif», qui donne des informations qui serviront à réussir d’autres innovations. «Ce n’est pas comme une start-up dans un incubateur, qui vit une grande pression pour mettre un produit ou un service sur le marché rapidement», précise Jacqueline Wallace. 

Selon Richard Chénier, l’excubation se prête mieux à des projets d’innovation assez courts (moins d’un an) qu’à des programmes lourds et complexes. Il ne s’agit pas d’un processus de R et D en continu ; ce projet doit avoir un début et une fin. «Il faut cibler un enjeu, un défi ou une thématique, mais pas de manière trop précise, poursuit-il. On doit laisser la place à la créativité et aux propositions des partenaires innovateurs.» 

Des entreprises comme Thalès, CAE ou le Port de Montréal ont utilisé cette approche avec succès au Centech. Le Port de Montréal, en particulier, l’a beaucoup employée pour collaborer avec des start-up afin de relever certains défis logistiques. «Présentement, ils cherchent à décarboner leur ligne de chemin de fer en travaillant avec la start-up Rail Vision, qui a développé un système d’optimisation d’énergie pour le transport de marchandises», souligne Richard Chénier.

Richard Chénier, directeur général de Centech (Photo: courtoisie)

Changer sa culture

Jacqueline Wallace indique que le principal défi que les sociétés rencontrent lorsqu’elles essaient l’excubation relève de la culture organisationnelle. «L’entreprise doit vraiment s’assurer de sortir une équipe de son giron, afin qu’elle puisse explorer sans subir les contraintes qu’elle vivrait à l’interne et qui nuisent à sa liberté d’expérimenter et d’innover», prévient-elle. 

Elle ajoute que les dirigeants ont parfois du mal à identifier le bon moment pour réintégrer l’innovation au sein de l’entreprise. «Ils souhaitent bénéficier d’un retour sur leur investissement, mais s’ils procèdent trop rapidement, ils risquent de provoquer un échec.»

Richard Chénier invite pour sa part ceux qui veulent utiliser l’excubation à libérer les membres de l’équipe qui s’en occupe de leurs responsabilités opérationnelles habituelles. «Sinon, ils consacreront trop d’énergie à leurs tâches opérationnelles et trop peu au projet d’excubation, note-t-il. De la même manière, les dirigeants doivent établir des politiques claires, comme le pourcentage du budget R et D qui sera octroyé à l’excubation.»

Pour être efficaces, les entreprises doivent aussi distinguer les éléments critiques qu’elles souhaitent garder à l’interne pour des questions de concurrence de ceux qu’elles peuvent partager avec l’externe pour gagner du temps.

 

Un modèle émergent

En plus de Centech, des organismes tels Montréal NewTech, Innovations Galilei 2, FormFintech et le Bureau de promotion des exportations de l’Abitibi-Témiscamingue ont mené des projets d’excubation dans les nouvelles technologies, le commerce de détail, les services financiers ou encore le secteur minier. Cependant, cette approche reste marginale au Québec, admet Richard Chénier. «Pourtant, les changements technologiques sont si rapides et les pressions, par exemple concernant les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance, augmentent tellement que les entreprises n’ont pas le choix d’excuber une partie de leur innovation, croit-il. Celles qui ne le feront pas prendront du retard.»

Les dirigeants de PME commettent d’ailleurs une erreur s’ils estiment que cette approche est réservée aux géants corporatifs, ajoute Richard Chénier. «Contrairement aux grandes entreprises, les PME ne misent pas nécessairement sur de vastes ressources de R et D à l’interne, rappelle-t-il. Pour elles, l’excubation représente une occasion d’aller chercher de la valeur très rapidement.»

L’excubation représente une formule intéressante de collaboration en innovation, qui permet de créer de la valeur rapidement en s’extrayant des contraintes internes et en diminuant les risques. Et elle n’est pas réservée aux grandes entreprises.
Cette approche offre la possibilité d’affranchir un projet d’innovation de certaines contraintes internes et de bénéficier de l’apport de partenaires externes comme une start-up, des chercheurs, des étudiants, etc. « L’excubation joue un peu le rôle d’un bac à sable, qui assure d’innover dans un contexte plus flexible, sans se heurter à des processus stricts de l’entreprise, telles les politiques d’achat ou la gestion de la propriété intellectuelle », résume Richard Chénier, directeur général de Centech. Cet incubateur opère depuis 2018 le Collision Lab, un centre d’innovation ouverte.
« L’excubation représente une voie mitoyenne entre l’innovation en entreprise et l’incubation d’une start-up complètement séparée », illustre Jacqueline Wallace, vice-présidente marketing et communications à Mitacs, un organisme canadien à but non lucratif qui crée des partenariats entre les universités et le secteur privé en matière d’innovation industrielle et sociale. Pour elle, le plus gros avantage de cette formule est de libérer la créativité, afin de pouvoir explorer et tester plus librement des idées. 
Un espace de créativité
L’objectif de l’excubation consiste généralement à proposer une solution novatrice, souvent disruptive, de mener le projet jusqu’à la preuve de concept. Parfois, elle permet aussi de montrer qu’un marché existe pour une innovation. Cependant, le succès n’est jamais garanti. L’opération débouche occasionnellement sur un « échec productif », qui donne des informations qui serviront à réussir d’autres innovations. « Ce n’est pas comme une start-up dans un incubateur, qui vit une grande pression pour mettre un produit ou un service sur le marché rapidement », précise Jacqueline Wallace. 
Selon Richard Chénier, l’excubation se prête mieux à des projets d’innovation assez courts (moins d’un an) qu’à des programmes lourds et complexes. Il ne s’agit pas d’un processus de R et D en continu ; ce projet doit avoir un début et une fin. « Il faut cibler un enjeu, un défi ou une thématique, mais pas de manière trop précise, poursuit-il. On doit laisser la place à la créativité et aux propositions des partenaires innovateurs. » 
Des entreprises comme Thalès, CAE ou le Port de Montréal ont utilisé cette approche avec succès au Centech. Le Port de Montréal, en particulier, l’a beaucoup employée pour collaborer avec des start-up afin de relever certains défis logistiques. « Présentement, ils cherchent à décarboner leur ligne de chemin de fer en travaillant avec la start-up Rail Vision, qui a développé un système d’optimisation d’énergie pour le transport de marchandises », souligne Richard Chénier.
Changer sa culture
Jacqueline Wallace indique que le principal défi que les sociétés rencontrent lorsqu’elles essaient l’excubation relève de la culture organisationnelle. « L’entreprise doit vraiment s’assurer de sortir une équipe de son giron, afin qu’elle puisse explorer sans subir les contraintes qu’elle vivrait à l’interne et qui nuisent à sa liberté d’expérimenter et d’innover », prévient-elle. 
Elle ajoute que les dirigeants ont parfois du mal à identifier le bon moment pour réintégrer l’innovation au sein de l’entreprise. « Ils souhaitent bénéficier d’un retour sur leur investissement, mais s’ils procèdent trop rapidement, ils risquent de provoquer un échec. »
Richard Chénier invite pour sa part ceux qui veulent utiliser l’excubation à libérer les membres de l’équipe qui s’en occupe de leurs responsabilités opérationnelles habituelles. « Sinon, ils consacreront trop d’énergie à leurs tâches opérationnelles et trop peu au projet d’excubation, note-t-il. De la même manière, les dirigeants doivent établir des politiques claires, comme le pourcentage du budget R et D qui sera octroyé à l’excubation. »
Pour être efficaces, les entreprises doivent aussi distinguer les éléments critiques qu’elles souhaitent garder à l’interne pour des questions de concurrence de ceux qu’elles peuvent partager avec l’externe pour gagner du temps.
Un modèle émergent
En plus de Centech, des organismes tels Montréal NewTech, Innovations Galilei 2, FormFintech et le Bureau de promotion des exportations de l’Abitibi-Témiscamingue ont mené des projets d’excubation dans les nouvelles technologies, le commerce de détail, les services financiers ou encore le secteur minier. Cependant, cette approche reste marginale au Québec, admet Richard Chénier. « Pourtant, les changements technologiques sont si rapides et les pressions, par exemple concernant les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance, augmentent tellement que les entreprises n’ont pas le choix d’excuber une partie de leur innovation, croit-il. Celles qui ne le feront pas prendront du retard. »
Les dirigeants de PME commettent d’ailleurs une erreur s’ils estiment que cette approche est réservée aux géants corporatifs, ajoute Richard Chénier. « Contrairement aux grandes entreprises, les PME ne misent pas nécessairement sur de vastes ressources de R et D à l’interne, rappelle-t-il. Pour elles, l’excubation représente une occasion d’aller chercher de la valeur très rapidement. »