(Photo: 123RF)
CHRONIQUE. Résultat de la crise sanitaire, c’est dans les secteurs de la santé, de la restauration et de l’hébergement, de la fabrication et du commerce de détail que le manque de main-d’oeuvre se fait le plus sentir au Québec. Selon l’Institut du Québec (IQ), les principales raisons de ces pénuries sont le manque de candidats (45 %), le manque de compétences générales et techniques (44 %) et le manque d’expérience (35 %).
Il y avait 265 300 chômeurs au Québec au troisième trimestre de 2021, alors que le nombre de postes vacants s’élevait à 238 500, soit un taux de vacance record de 6,1 %, ce qui démontre l’importance de la qualification. Malgré la pandémie, le nombre d’emplois «hautement qualifiés»a augmenté de 1,5 % entre février et décembre 2020 selon l’IQ , alors que l’on a perdu 5,9 % d’emplois «peu qualifiés» et 12 % d’emplois dits «qualifiés».
La pénurie de main-d’oeuvre est là pour de bon et elle aura un effet dramatique sur les finances publiques. Selon l’IQ , le nombre des 20-64 ans diminuera de 95 000 pendant la décennie 2020-2029, alors que celui des 65 ans et plus augmentera de 520 800. Avec la forte croissance des soins chez les personnes âgées, l’État aura besoin de beaucoup de contribuables pour gérer l’explosion des dépenses de santé qui s’annonce (déjà 43 % des dépenses de programmes).
L’État devra utiliser tous les leviers possibles pour contrer cette pénurie: l’immigration, la qualification des chômeurs, la participation accrue au marché du travail de certains groupes (60 ans et plus, handicapés, Autochtones, etc.), le rehaussement des compétences des personnes en emploi, l’amélioration de la scolarisation (formations longues et courtes), une meilleure intégration des immigrants (formation et reconnaissance de leurs compétences).
Il faut plus d’immigrants et réduire les dédales ainsi que les délais administratifs que leur imposent les gouvernements qui se partagent cette responsabilité. Ces obstacles touchent aussi bien les travailleurs étrangers temporaires et les étudiants internationaux que les immigrants économiques, dont on a pourtant un grand besoin.
L’éducation à la rescousse
L’éducation (23 % du budget de l’État) est un autre levier qu’il faut revigorer. Pourquoi nos élèves du secondaire ont-ils les plus faibles taux de diplomation de l’ensemble des provinces ? Par ailleurs, seulement 29 % de nos 25-64 ans ont un diplôme universitaire, comparativement à 35 % en Ontario et à 32 % pour l’ensemble du pays.
Dans les cégeps, le taux de diplomation (après quatre ans dans le secteur préuniversitaire et cinq ans dans le secteur technique) évolue autour de 64 %. Il est de 71,6 % dans le secteur préuniversitaire, mais de 61,5 % dans le secteur technique, où les abandons en cours de formation sont plus nombreux. Plusieurs initiatives continuent d’être prises pour améliorer le taux de diplomation des cégépiens. Le gouvernement veut l’amener à 70 % en 2027, un objectif ambitieux. Par contre, cela ne signifie pas que ceux qui ont abandonné en cours de route ne participent pas avec succès au marché du travail.
Dans les universités, le taux d’obtention d’un baccalauréat est de 80,4 % six ans après l’inscription et de 78,4 % pour la maîtrise quatre ans après l’inscription. L’État veut porter ces taux à 84 % et à 82 % respectivement en 2027.
Pour espérer atteindre ces cibles, la ministre de l’Enseignement supérieur, Danielle McCann, a annoncé des investissements de 450 millions de dollars (M $) sur cinq ans. Plusieurs des mesures annoncées visent la persévérance et la réussite (334 M $).
D’autres visent les transitions interordres d’enseignement et intercycles à l’université, où il manque de la fluidité. C’est le cas, notamment, entre la formation professionnelle au secondaire et celle menant à une AEC (attestation d’études collégiales), une formation technique destinée à des personnes qui ont déjà accédé au marché du travail.
Il existe certes plusieurs passerelles entre les formations collégiales et les programmes universitaires, mais il pourrait y avoir plus d’ententes menant à des DEC-BAC intégrés, grâce auxquels des étudiants peuvent réduire à quatre ans (au lieu de cinq) la durée de leurs études dans le secteur technique.
En 2014, un chantier sur l’offre de formation collégiale présidé par un spécialiste, Guy Demers, a proposé de meilleurs arrimages et de meilleures collaborations entre les transitions interordres secondaire-collégial et collégial-universitaire. On n’en fait pas assez sur ce plan, notamment à cause de la résistance de certains acteurs à renoncer à des chasses gardées et à éliminer des rigidités.
Exemple d’écueil soulevé par Guy Demers, la fameuse «épreuve uniforme de français»«condamne plus de 1 000 étudiants par année à terminer leurs années d’études sans diplôme». En a-t-on vraiment encore besoin ? Alors que le ministère semble avoir du mal à faire évoluer les programmes et que les universités jouissent d’une autonomie dans la diplomation, les cégeps évoluent dans un cadre très circonscrit par l’État. Plus de flexibilité leur permettrait d’être plus agiles.
Divulgation:l’auteur de cette chronique siège au conseil d’administration d’un cégep.
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