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Mais où est passée la peur de la récession?

Les investigateurs financiers|Publié le 19 juillet 2019

Mais où est passée la peur de la récession?

(Photo: 123RF)

BLOGUE INVITÉ. Il y a à peine 6 mois, on nous demandait ce que nous comptions faire face à la récession américaine qui s’en venait. «Qu’allez-vous faire? Allez-vous vous protéger?» Ma réponse à ce genre de question n’a pas changé au cours des 15 dernières années. Le secret réside dans l’achat de sociétés pouvant résister aux récessions grâce à leur solide modèle d’affaires. Si leurs titres sont acquis à bon prix, le risque de perte de capital à long terme devient très mince.

De toute évidence, ce genre de réponse ne plaît pas à tous les investisseurs. On préférerait sûrement un commentaire du genre : «Nous regardons un ou quelques indicateurs en particulier. Dès que nous avons un signal négatif, nous vendons presque tout et optons pour des obligations et des titres défensifs. Lorsque le signal devient positif, nous rachetons les titres à bien meilleurs prix.»  Si une telle recette existait et était à notre portée, nous serions plus qu’heureux de l’appliquer.

De temps à autre, nous entendons parler de la stratégie «stop loss», qui correspond à un ordre systématique de vente lorsqu’un titre baisse d’un pourcentage prédéterminé. Nous avions écrit à ce sujet il y a plusieurs années. Nous sommes toujours convaincus qu’il s’agit d’une stratégie perdante.

Mais revenons aux craintes de récession. Alors que le marché boursier américain (S&P 500) a rebondi de 27% depuis son creux de décembre dernier, je n’entends presque plus ce mot. Ironiquement, les actions sont plus chères, et les risques, si l’on se fie aux économistes, seraient plus élevés!

Source: WSJ.com survey of economists

Comme on peut le constater dans le graphique ci-haut, les probabilités de récession avaient touché les 25% en décembre, moment où les craintes avaient atteint leur paroxysme. Six mois plus tard, elles atteignent 30%. Voilà un 5% d’augmentation peu inquiétant pour bien des gens, car de toute façon, le marché boursier va si bien! Le S&P 500 a traversé les 3000 points depuis peu. N’est-ce pas un bon temps pour se réjouir plutôt que de se concentrer sur les probabilités?

Loin de moi l’idée de se fier aux prévisions des économistes. Je me rappelle avoir lu de nombreux articles qui indiquaient que nous étions déjà en récession, deux ou trois ans après la fin de la grande crise financière. À cette époque, le marché boursier regorgeait d’aubaines intéressantes. Nous avions l’embarras du choix. Il fallait toutefois ne pas s’arrêter sur les nombreuses prédictions de «double récession».

Un autre exemple intéressant repose dans cet article, où les économistes avaient effectivement élevé les chances de récession. C’était en décembre 2007. À combien s’élevait ce chiffre? Pas tellement loin du chiffre actuel: 38%. On avait effectivement jugé que les probabilités étaient plus grandes, mais à l’aube de la grande récession, on estimait à 62% les chances qu’il n’y ait PAS de récession.

Parfois, les économistes auront raison. Cependant, votre succès en tant qu’investisseur ne doit pas dépendre de ces pronostics. Je suis actuellement à l’aise de prédire que nous sommes plus près de la prochaine récession qu’avant. Voilà comment j’effectue mon savant calcul: étant donné que je suis certain qu’il y en aura une éventuellement, à chaque mois qui passe, nous sommes effectivement plus près de la date où elle surviendra.

Il ne faut pas s’empêcher d’investir pour autant. Si vous trouvez des compagnies solides (modèle d’affaires presque impeccable, bilan sans dette avec idéalement beaucoup de liquidités) dont le titre se transige à escompte par rapport à votre estimation, vous bénéficiez déjà d’une certaine protection. En cas de récession, l’entreprise sélectionnée devrait être capable d’accroître ses parts de marché vis-à-vis les sociétés mal financées et moins bien gérées. Et si vous avez payé un très bon prix, peu importe les fluctuations à court terme, vos chances de succès demeurent excellentes à long terme.

Rémy Morel, CIM, Associé Barrage Capital